Grands Lacs : Agriculteurs, la majorité silencieuse oubliée

Redigé par IGIHE
Le 12 octobre 2012 à 06:40

Pourquoi les agriculteurs qui représentent 80 à 90 % de la population du Burundi, de la RD Congo et du Rwanda, qui pèsent parfois presqu’autant dans l’économie, qui produisent souvent l’essentiel des produits exportés sont-ils toujours aussi négligés par leurs gouvernements ? Est-ce parce qu’ils sont des ruraux considérés comme peu "évolués" par les citadins qui les dirigent, comme peu dangereux car isolés dans leurs campagnes ? Peu importe alors qu’ils vivent dans la misère, ne mangent pas à leur faim, ne (...)

Pourquoi les agriculteurs qui représentent 80 à 90 % de la population du Burundi, de la RD Congo et du Rwanda, qui pèsent parfois presqu’autant dans l’économie, qui produisent souvent l’essentiel des produits exportés sont-ils toujours aussi négligés par leurs gouvernements ? Est-ce parce qu’ils sont des ruraux considérés comme peu "évolués" par les citadins qui les dirigent, comme peu dangereux car isolés dans leurs campagnes ? Peu importe alors qu’ils vivent dans la misère, ne mangent pas à leur faim, ne puissent pas se soigner…

Comme si cette majorité silencieuse n’avait pas les mêmes droits que les autres, mais seulement le devoir de nourrir au moindre coût leurs concitoyens. En témoignent les budgets dérisoires dévolus au secteur agricole par les États qui sont loin, sauf depuis peu au Burundi, d’atteindre les 10% du budget national préconisés par les accords de Maputo de 2009. Pour l’instant, surtout en RD Congo, ils n’en ont que des miettes bien insuffisantes pour améliorer leur sort. Confrontés à l’exiguïté des terres et à leur baisse de fertilité au Nord Kivu comme au Burundi, les familles de paysans s’enfoncent dans une spirale de pauvreté dont ils ne peuvent sortir seuls. Certains subissent en outre régulièrement les exactions des bandes armées qui dévastent leurs champs, pillent leurs récoltes ou les poussent à fuir.

Tous sont confrontés aux changements climatiques qui perturbent les cycles culturaux et réduisent les rendements. Ils doivent aussi faire face, en particulier en RD Congo, à la concurrence des produits importés qui dévalorise encore un peu plus leurs produits dont les prix sont bien loin de couvrir leurs frais et surtout leur travail. Seul le Rwanda mène aujourd’hui une politique vigoureuse pour intensifier la production et passer d’une agriculture d’autosubsistance à des productions commerciales. Pour ce faire, le gouvernement mène des réformes à marche forcée et offre des facilités aux agriculteurs, mais à condition qu’ils respectent les mesures souvent contraignantes et parfois inadaptées qui leur sont imposées.

Le Burundi, poussé par la communauté internationale, montre aujourd’hui un peu plus d’intérêt pour ce secteur en perdition qui n’arrive plus à nourrir sa population, ni même souvent ceux qui produisent. Il est plus que temps et les efforts à fournir sont considérables pour inverser la tendance.

En RD Congo, les agriculteurs ne comptent pas sur l’État. Au Sud Kivu, le développement rural ne vient-il pas au tout dernier rang des préoccupations du gouvernement provincial. Seules des initiatives individuelles ou d’associations permettent ici et là quelques avancées intéressantes. La mise en œuvre de la nouvelle loi agricole marquera-t-elle un tournant pour les ruraux de ce pays ? Aujourd’hui dans tous ces pays, les temps sont durs, très durs pour ces "braves" paysans, comme les appellent souvent les gens des villes, avec beaucoup de condescendance. Pourtant la bravoure de ces agriculteurs force l’admiration.

Marie-Agnès Leplaideur (guinee7)


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