Ce sont les mots du Général (Rtd) James Kabarebe, décrivant comment l’Armée patriotique rwandaise (APR) a surmonté tous les obstacles pour libérer le Rwanda. À ce jour, 31 ans se sont écoulés depuis cette victoire historique.
Toute guerre exige une stratégie, mais le conflit militaire en particulier requiert des tactiques innovantes et adaptables. Lorsque l’APR a lancé la guerre de libération en 1990, elle avait passé des années à se regrouper et à se préparer. La plupart des hommes ayant déclenché la lutte avaient servi dans l’armée ougandaise à divers postes.
Le Major Général Fred Rwigyema a mené la première attaque le 1er octobre 1990. C’était un commandant chevronné qui avait joué un rôle clé dans la guerre de libération de l’Ouganda, servant comme adjoint du Général Elly Tumwine, qui fut blessé au début du conflit, Rwigyema ayant alors pris la relève.
Cependant, la libération du Rwanda ne s’est pas déroulée comme prévu. Le 2 octobre, seulement un jour après le début de la guerre, le Major Général Rwigyema fut tué. D’autres commandants supérieurs, dont le Major Chris Bunyenyezi et le Major Peter Bayingana, ont également été tués peu après. Bayingana est tombé dans une embuscade sur la route de Kagitumba - Gabiro, et Bunyenyezi, sur le chemin de Nyagatare.
Au départ, l’APR utilisait la guerre dite conventionnelle, caractérisée par des affrontements ouverts et directs où les forces opposées établissent des lignes de front bien définies. Cette forme de combat remonte à plusieurs siècles, à l’époque où l’on se battait à la lance et à l’épée. Plus tard, elle a évolué avec l’apparition des armes à feu, de l’artillerie lourde, des chars et des avions.
Pendant les deux guerres mondiales, les chars et les avions sont devenus des éléments dominants de la guerre conventionnelle. Chaque camp creusait des tranchées, installait des lignes défensives et luttait pour le contrôle des positions ennemies. Mais cette méthode comporte de sérieux inconvénients : elle est coûteuse, prévisible et entraîne de lourdes pertes en raison de la concentration massive de troupes en un même endroit.
Cette approche conventionnelle était celle sur laquelle l’APR comptait dans les premiers jours de la guerre. Mais tout a changé lorsque le Major Général Paul Kagame est revenu d’une formation militaire aux États-Unis et a pris le commandement d’une armée démoralisée et dispersée.
Lorsque Kagame est arrivé à Kagitumba, de nombreux soldats cherchaient déjà des moyens de se replier en Ouganda. Même le Général (Rtd) Fred Ibingira a reconnu qu’il se préparait à retourner en Ouganda, car la bataille semblait perdue.
Kagame, surnommé « Afande PC », a immédiatement ordonné le regroupement des troupes. Lors de réunions avec les commandants supérieurs, il les a exhortés à renoncer à l’idée de battre en retraite, affirmant que revenir en arrière n’était pas une option, et que leur seul objectif devait être de libérer le Rwanda et de mettre fin aux massacres en cours contre les Tutsi.

À ce moment-là, les Forces armées rwandaises (FAR) célébraient, convaincues d’avoir complètement vaincu l’APR. Ceci-dit, Paul Kagame introduisit une nouvelle stratégie de combat : passer de la guerre conventionnelle à la guerre mobile et de guérilla.
La première opération sous cette nouvelle tactique fut l’attaque de Gatuna au début novembre, menée par le Colonel (Rtd) Twahirwa Ludovic, surnommé Dodo. Ce fut une offensive très organisée qui redonna un grand moral aux troupes, en particulier à celles qui arrivaient tout juste au combat et n’avaient pas connu le chaos des premiers jours.
Le jour même où Gatuna fut pris, l’annonce officielle de la mort de Fred Rwigyema fut faite, une nouvelle qui suscita tristesse mais aussi une détermination renouvelée parmi les combattants.
La combinaison des tactiques de guerre mobile et de guérilla renversa le cours de la lutte de libération. Les troupes de l’APR se déplacèrent de Mutara vers les montagnes des Virunga, d’où elles lancèrent des opérations et effectuèrent des entraînements.
La guerre de guérilla implique de petites unités très mobiles qui lancent des attaques surprises contre des positions ennemies avant de se replier. Même trois soldats pouvaient semer le chaos, créant l’illusion d’une force bien plus importante. Cette méthode est idéale pour les embuscades, le sabotage (par exemple, la destruction de ponts) et la guerre psychologique, provoquant confusion et désorientation dans les rangs ennemis.
Bien que le sabotage soit courant dans la tactique de guérilla, l’APR évitait de détruire les infrastructures clés, car leur reconstruction serait une priorité après la libération.
D’anciens soldats des FAR ont témoigné qu’ils se sentaient souvent désorientés, ne sachant pas où concentrer leur défense ni quelle serait la prochaine action de l’APR.

La guerre mobile, bien que similaire aux tactiques de guérilla, met davantage l’accent sur l’identification et la cible des faiblesses ennemies. Elle consiste à couper les routes d’approvisionnement, encercler l’ennemi et le vaincre de manière décisive. Cette approche est plus rapide et repose fortement sur le renseignement et la coordination entre les unités.
Historiquement, la guerre mobile a été utilisée efficacement par l’Allemagne lors des campagnes de Blitzkrieg entre 1939 et 1941, permettant la conquête rapide de la Pologne, de la France et des territoires soviétiques. Pendant la guerre de Corée (1950–1953), les forces chinoises ont employé des raids nocturnes et des mouvements rapides pour submerger leurs ennemis. En 1967, durant la guerre des Six Jours, les forces israéliennes ont également appliqué des tactiques de guerre mobile pour vaincre rapidement les armées arabes voisines.
L’objectif principal de la guerre mobile est de remporter la victoire rapidement, en s’appuyant sur une forte coordination interne et sur un renseignement en temps réel concernant les mouvements et les vulnérabilités de l’ennemi.
Grâce à l’adaptation de ces tactiques, l’APR a réussi à résister à une puissance de feu supérieure, à déjouer un ennemi mieux équipé et, finalement, à libérer le pays — démontrant que la stratégie, le courage et l’adaptabilité peuvent triompher face à des obstacles écrasants.




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