Dans la nuit du 9 au 10 octobre 2025, des affrontements ont éclaté entre les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et leurs alliés supposés, les miliciens dits « Wazalendo » après l’assassinat d’un chef de quartier, tué à la suite d’un différend sordide autour d’une somme d’argent.
Au matin, une population en colère est descendue dans la rue, réclamant le départ immédiat de ces supplétifs devenus, dans bien des localités, synonymes de terreur plutôt que de protection.
Cet épisode n’est ni isolé ni surprenant : il est le symptôme d’une faillite sécuritaire désormais structurelle. L’État congolais, incapable d’assurer par lui-même l’intégrité territoriale et la sécurité des populations, a choisi depuis plusieurs années la voie du contournement : déléguer sa souveraineté à une mosaïque de milices, baptisées « forces patriotiques » pour maquiller la précarité de sa propre autorité.
Ces supplétifs, dont l’encadrement est souvent improvisé, l’idéologie floue et la loyauté fluctuante, se comportent en réalité comme des seigneurs de guerre de proximité, multipliant rackets, exactions et règlements de comptes sanglants.
Kamituga, autrefois symbole d’un territoire minier prospère, devient aujourd’hui le théâtre d’un chaos rampant, où l’uniforme patriotique sert de paravent aux plus basses prédations. L’ironie tragique est que ceux-là mêmes qui prétendent défendre la patrie deviennent les bourreaux de ceux qu’ils étaient censés protéger.
Quand l’armée régulière s’affronte à ses propres auxiliaires, c’est la fiction même de l’unité nationale qui s’effondre. L’ennemi n’est plus seulement extérieur ; il est désormais logé au cœur même de l’appareil sécuritaire.
La colère populaire qui s’est exprimée dans les rues de Kamituga n’est pas une émotion passagère : elle traduit une rupture profonde de confiance entre l’État et ses citoyens. Les slogans hostiles aux Wazalendo, relayés par les vidéos circulant sur les réseaux, sont l’écho d’un peuple abandonné, las d’être sacrifié sur l’autel d’une guerre sans front ni fin, où la ligne entre protecteurs et prédateurs s’estompe chaque jour davantage.
Ce qui se joue ici dépasse le seul cas de Kamituga. Il s’agit de la légitimité même du pouvoir central, de sa capacité à imposer un monopole légitime de la force et à restaurer une chaîne de commandement crédible.
La stratégie de miliciarisation, censée pallier les insuffisances militaires, s’est muée en une bombe à fragmentation politique et sécuritaire. En externalisant la guerre, Kinshasa a fragmenté sa souveraineté et créé un monstre polymorphe qui lui échappe de plus en plus.
Si rien n’est entrepris pour désarmer, démanteler et traduire en justice ces groupes, la spirale de violences locales continuera de miner la stabilité nationale. Les événements de Kamituga rappellent, avec une cruauté limpide, que l’État qui abdique son autorité au profit de supplétifs finit toujours par en être prisonnier. La colère populaire pourrait n’être que le premier acte d’un rejet plus large de ce système de délégation mortifère.
Il n’est plus temps de gérer la violence : il faut la défaire. Kamituga, loin d’être une simple actualité locale, est un signal d’alarme une épreuve de vérité pour un État qui doit choisir entre l’effondrement silencieux et la reconquête de sa propre souveraineté.

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