La RDC entre cendres et concessions

Redigé par Tite Gatabazi
Le 29 mai 2025 à 04:58

Alors même que l’Est de la République démocratique du Congo est en proie à l’un des épisodes les plus graves de délitement sécuritaire depuis les guerres qui ont ravagé la région au tournant du millénaire, une étrange partition diplomatique se joue dans les coulisses du pouvoir.

Tandis que la grande coalition militaro-insurrectionnelle composée des FARDC, des combattants FDLR, des groupes dits wazalendo, ainsi que des troupes burundaises et des forces de la SADC ont essuyées une débâcle stratégique face à la poussée inexorable des forces de l’AFC/M23, et que les villes névralgiques de Goma et de Bukavu ont basculées lentement vers une incertitude pesante et un effondrement logistique jusqu’à l’arrivée des hommes du Général Makenga dans les deux villes désormais sous leur contrôle.

A Kinshasa, le pouvoir central chancelle, en proie à une désagrégation institutionnelle inquiétante. La scène politique, disloquée par les luttes intestines, peine à articuler un discours de souveraineté cohérent, tandis que la cacophonie règne au sommet de l’État. Et pourtant, au cœur de cette tourmente nationale, un ballet feutré de négociations s’intensifie, révélant le visage impassible d’une realpolitik implacable.

En effet, malgré l’état de guerre latent, les gouvernements de Kigali et de Kinshasa poursuivent discrètement mais résolument des pourparlers relatifs à de juteux accords environnementaux, énergétiques et miniers, sous la médiation active du Département d’État américain.

Du côté rwandais, un protocole d’accord aurait d’ores et déjà été signé, consacrant ainsi une avance diplomatique dans ce bras de fer économique où l’influence prime sur la légitimité. A Kinshasa, les tractations continuent, portées à la fois par les canaux classiques du ministère des Affaires étrangères et par le truchement de relais stratégiques installés à Washington. Parmi ces derniers, le cabinet Von Batten-Montague-York, spécialisé dans le lobbying et le conseil d’influence, joue un rôle pivot dans la tentative congolaise de capter les faveurs du Congrès américain et d’attirer les investisseurs privés.

L’accord en gestation dépasse de loin les enjeux locaux du Katanga ou du Kivu : il s’agit d’une entreprise tentaculaire visant l’ouverture de vastes segments du sous-sol congolais à l’exploration industrielle, dans un cadre contractuel qui pourrait s’étendre sur plusieurs décennies. Kinshasa cherche à imposer une clause de transformation locale des matières premières, revendiquant ainsi une forme de réhabilitation économique par la création d’une chaîne de valeur sur son propre territoire. Toutefois, cette exigence, bien que louable en principe, demeure encore incertaine dans son application concrète, notamment à court terme, face aux réticences structurelles des investisseurs étrangers.

La Première ministre congolaise est attendue aux États-Unis pour mener une opération de séduction économique, destinée à rassurer les milieux d’affaires quant à la stabilité au moins apparente du pays, et à promouvoir les potentialités inexplorées de son sol, malgré le chaos régnant.

Dans ce contexte, un dilemme moral et géopolitique se dessine avec une acuité troublante : peut-on construire un avenir économique durable sur les ruines d’une souveraineté écornée ? La diplomatie actuelle, si elle n’est pas encadrée avec rigueur et transparence, risque fort de perpétuer les logiques prédatrices qui, depuis des décennies, réduisent le Congo à une mine ouverte sous tutelle étrangère, plutôt qu’à une nation émancipée.

Alors que l’Est de la RDC traverse une grave crise sécuritaire, une étrange manœuvre diplomatique se trame en coulisses

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