La purge au sein des forces armées en RDC

Redigé par Tite Gatabazi
Le 22 décembre 2025 à 01:30

La récente mise en jugement de certains militaires et policiers ayant fui Uvira, lors de la prise de cette ville par l’AFC/M23, illustre une dynamique sans précédent au sein des forces armées et de la police nationale congolaise.

Les audiences foraines, organisées par le tribunal militaire de garnison de Kalemie et se tenant au Camp Marin depuis le vendredi 19 décembre, matérialisent un effort systématique de reprise en main et de contrôle de la discipline militaire.

Le Lieutenant-Général YAV IRUNG Philémon, arrêté le 19 septembre 2022 et poursuivi pour incitation des militaires à commettre des actes contraires au devoir ou à la discipline, ainsi que pour trahison.

Cette mise en accusation révèle non seulement la gravité des manquements allégués, mais également la volonté des autorités militaires et judiciaires de procéder à une épuration ciblée des éléments jugés défaillants au sein des forces armées, afin de restaurer l’autorité, la loyauté et la cohésion dans un contexte de crise sécuritaire.

Cette purge, qui se manifeste par des procédures judiciaires rigoureuses et des procès publics, s’inscrit dans une logique de réaffirmation du contrôle étatique sur ses forces armées, souvent mises à l’épreuve par des pressions internes et externes.

Elle traduit la reconnaissance tacite que la fuite, l’indiscipline et la complicité avec des forces rebelles constituent non seulement une atteinte au devoir militaire, mais également une menace directe à la sécurité nationale et à la stabilité de la République.

Dans cette perspective, la justice militaire ne se limite pas à la sanction des individus : elle opère comme un instrument de purification institutionnelle, destiné à prévenir la propagation de comportements déviants et à envoyer un message clair sur la gravité des manquements, tant au sein des forces armées qu’au regard de la société civile.

Conséquences juridiques et stratégiques de la purge

Au-delà de sa portée disciplinaire immédiate, la purge des militaires ayant failli à leur devoir engage des conséquences politiques et juridiques majeures.

Sur le plan juridique, ces procès se présentent comme l’application ostensible du code militaire et de la législation républicaine, mais ils révèlent également une lecture instrumentalisée de la discipline : le sommet de l’État se réfugie derrière des manquements imputés au commandement et des incohérences internes pour masquer sa propre responsabilité dans les failles structurelles des forces armées.

La mise en cause des officiers et des soldats, prétendument fautifs, devient ainsi un écran destiné à détourner l’attention des véritables carences organisationnelles et des choix stratégiques contestables.

Sur le plan stratégique, cette épuration sert moins à restaurer une loyauté intrinsèque qu’à envoyer un signal de contrôle et de domination au sein des forces armées.

Elle met en exergue la rigueur et le sens du devoir comme principes invoqués pour légitimer une sanction sélective, tout en dissimulant la complexité des situations de terrain et les incohérences qui émanent du commandement central.

Loin d’être une simple mesure disciplinaire, elle s’impose comme un instrument politique destiné à renforcer l’autorité apparente du pouvoir, tout en donnant l’illusion d’un rétablissement de la discipline et de la cohésion militaire dans un contexte marqué par l’incursion régulière de forces rebelles et la fragilisation persistante du territoire national.

La purge militaire, tout en rétablissant la hiérarchie et la discipline, interpelle également l’opinion publique et la communauté internationale sur l’état de l’armée congolaise : elle révèle les tensions internes, les failles organisationnelles, mais aussi la détermination du commandement à assumer ses responsabilités et à protéger l’intégrité de la nation.

Ces mesures disciplinaires, si elles sont menées dans le respect des procédures et de la justice, peuvent ainsi servir de pierre angulaire pour la consolidation d’une armée cohérente, capable de répondre aux défis sécuritaires tout en respectant les principes de loyauté, d’honneur et de discipline qui fondent le métier des armes.

La mise en jugement de militaires et policiers ayant fui Uvira lors de sa prise par l’AFC/M23 révèle une dynamique inédite au sein des forces congolaises

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