Le Cadeau d’adieu de Joe Biden à Cuba

Redigé par Tite Gatabazi
Le 17 janvier 2025 à 03:10

La décision de Joe Biden de retirer Cuba de la liste des États soutenant le terrorisme marque un tournant symbolique dans les relations entre les États-Unis et l’île, mettant en lumière les dynamiques complexes qui ont marqué plusieurs décennies d’histoire partagée et conflictuelle.

Cette décision s’inscrit dans une longue trajectoire d’ambiguïtés, de tensions et d’efforts de réconciliation entre les deux nations, une relation marquée par des épisodes dramatiques tels que la crise de la Baie des Cochons, la guerre froide et les tentatives incessantes d’assassinat de Fidel Castro, qui ont forgé une atmosphère d’animosité et de méfiance mutuelle.

L’histoire des relations américano-cubaines remonte à l’ère de la Révolution cubaine, lorsque Fidel Castro renversa le dictateur pro- américain Fulgencio Batista en 1959. Dans le sillage de cette révolution, Cuba adopta des réformes socialistes qui entrèrent en conflit direct avec les intérêts géopolitiques et économiques des États-Unis, alors en pleine guerre froide.

Cette époque fut marquée par une hostilité flagrante, illustrée par l’échec de l’invasion de la Baie des Cochons en 1961. En dépit du soutien direct et indirect des États-Unis aux exilés cubains, cette tentative d’invasion se solda par une défaite cinglante pour l’armée de la CIA, renforçant ainsi l’image de Cuba comme un bastion idéologique et politique défiant l’hégémonie américaine.

Le climat de guerre froide exacerba encore les tensions, avec des tentatives répétées des États-Unis de renverser Castro, qui se traduisirent par des complots d’assassinat, des embargos économiques et des actions secrètes visant à affaiblir le régime. Les relations bilatérales se détériorèrent davantage après la crise des missiles de Cuba en 1962, un affrontement où les deux superpuissances, les États- Unis et l’Union soviétique, frôlèrent la guerre nucléaire en raison de l’installation de missiles soviétiques à Cuba.

Cet événement dramatique plongea l’hémisphère occidental dans un climat de peur, dont les répercussions se firent sentir sur plusieurs décennies.

Cuba fut ainsi pris dans un étau géopolitique, ostracisé par les États- Unis et isolé sur la scène internationale, tandis que le gouvernement cubain chercha à se protéger de l’agression américaine en s’alignant avec les Soviétiques. Cet isolement fut exacerbé par l’imposition d’un embargo commercial rigide par Washington en 1960, une mesure qui fut réaffirmée et renforcée à plusieurs reprises au cours des années suivantes, notamment sous les présidences de Ronald Reagan et George W. Bush.

Le régime cubain, bien qu’affrontant des difficultés économiques sévères, notamment après l’effondrement de l’Union soviétique, résista avec une résilience surprenante, s’efforçant de maintenir une ligne politique indépendante, quitte à opprimer une partie de sa population.

Il fallut attendre la présidence de Barack Obama pour voir un premier mouvement de détente dans les relations entre les deux pays. En 2014, après plus d’un demi-siècle de confrontation, Obama annonça une politique de « réengagement » avec Cuba, marquée par la réouverture des ambassades et une levée partielle des restrictions économiques et commerciales.

Ce geste symbolique visait à ouvrir un nouveau chapitre dans les relations bilatérales, bien que l’embargo restât en place et que d’importants obstacles demeuraient. Cependant, cette politique de rapprochement fut inversée par l’administration de Donald Trump, qui rétablit certaines sanctions et conserva le statut de Cuba comme pays soutenant le terrorisme, alimentant ainsi un retour aux tensions historiques.

C’est dans ce contexte qu’intervient la décision de Joe Biden, qui, après une réflexion mûrie et des conseils d’autres dirigeants mondiaux, choisit de lever cette désignation, en dépit de l’opposition de certains cercles politiques aux États-Unis. Il est intéressant de noter que cette décision survient en fin de mandat, comme un acte symbolique, probablement pour clore un chapitre de tensions tout en offrant un geste d’ouverture pour l’avenir.

La levée de la désignation de Cuba comme État soutenant le terrorisme intervient parallèlement à la libération de prisonniers politiques cubains, dans un cadre négocié avec l’aide de l’Église catholique, et constitue un pas significatif, bien que limité, vers la normalisation des relations entre les deux nations.

Cependant, malgré ce geste, l’embargo commercial imposé à Cuba reste en place, et la levée de cette désignation ne constitue qu’un compromis partiel dans une relation marquée par des décennies de méfiance et de stratégies conflictuelles. Il est important de souligner que les concessions de la part des États-Unis, bien qu’ayant une portée symbolique, ne résolvent pas les profondes inégalités économiques et sociales que le régime cubain a dû affronter au cours des dernières décennies.

Cuba, malgré les gestes diplomatiques, reste dans un état de dépendance économique et géopolitique, alors même qu’il cherche à réaffirmer son autonomie face à la pression des États-Unis.

Ainsi, cette décision de Joe Biden, bien qu’elle marque une avancée diplomatique, ne fait qu’effleurer la surface des problèmes sous-jacents. Les relations entre Cuba et les États-Unis, tout en ayant connu des soubresauts de rapprochement, restent figées dans une dynamique complexe, où les héritages du passé, les divergences idéologiques et les intérêts géopolitiques se heurtent.

Le chemin vers une véritable réconciliation entre ces deux nations reste semé d’obstacles, mais ce geste de Biden, aussi tardif soit-il, rappelle l’importance de la diplomatie dans la construction de ponts, même au sein de relations aussi tumultueuses et marquées par des décennies d’histoire conflictuelle.

La décision de Joe Biden de retirer Cuba de la liste des États soutenant le terrorisme marque un tournant symbolique dans les relations entre les États-Unis et l’île de Cuba.

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