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Le dialogue de sourds entre le Burundi et le FMI

Redigé par Tite Gatabazi
Le 4 février 2025 à 05:18

Le président Evariste Ndayishimiye traverse une période des plus sombres, confronté à une réalité inéluctable qui ne lui laisse plus l’opportunité de se réfugier derrière quelque bouc émissaire que ce soit.

Cette fois, ce ne sont ni des adversaires politiques ni des contingences internes qu’il peut accuser, mais bien les institutions de Bretton Woods elles-mêmes, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, qui resserrent l’étau autour de lui.

Jadis perçues comme des partenaires financiers incontournables, elles se muent aujourd’hui en juges implacables, mettant à l’épreuve la viabilité de la gouvernance et la crédibilité des engagements économiques du Président Ndayishimiye.

Face à ces puissances financières, toute tentative de diversion rhétorique s’effondre, laissant place à l’inévitable confrontation avec les dures réalités de la gestion étatique.

Le pouvoir d’Evariste Ndayishimiye se trouve dans une impasse économique majeure, marquée par l’échec d’un programme d’assistance financière du Fonds monétaire international (FMI), conséquence directe du refus catégorique du chef de l’État burundais de procéder à une nouvelle dévaluation de la monnaie nationale.

Il y a dix-huit mois, l’annonce de l’accord conclu entre le FMI et le gouvernement burundais, assorti d’une facilité de crédit de 261 millions de dollars sur une période de quarante mois, avait suscité de nombreuses attentes dans un pays en proie à une crise socio-économique aiguë.

Cette dernière se traduit par une pénurie critique de devises étrangères et un déficit sévère en carburant. Toutefois, la mise en œuvre de cet accord s’est rapidement heurtée à un obstacle de taille : la proposition du FMI d’aligner le taux officiel du franc burundais sur celui du marché parallèle, impliquant ainsi une nouvelle dévaluation.

Cette suggestion a immédiatement été rejetée par le président Ndayishimiye, qui a fermement exprimé son opposition, jugeant une telle mesure inacceptable. À ce jour, l’écart entre le taux officiel et celui du marché noir demeure abyssal, ce dernier étant 2,5 fois plus élevé.

Malgré les interventions successives de hauts représentants du FMI et de la Banque mondiale, ainsi que les visites d’experts dépêchés pour convaincre les autorités burundaises de la nécessité d’une telle réforme, le président est resté inébranlable. Ancien militaire, il s’est fermement opposé à toute dévaluation supplémentaire, estimant qu’elle ne ferait qu’exacerber une inflation déjà hors de contrôle, laquelle atteignait 36 % en décembre 2024, selon la Banque centrale du Burundi.

Le 18 janvier 2025, soit exactement dix-huit mois après la signature de l’accord, celui-ci a été rendu caduc. En conséquence, les quelque 200 millions de dollars que le FMI n’avait pas encore décaissés resteront indisponibles pour le Burundi.

Cette issue, loin d’être fortuite, relevait d’une inéluctabilité dont les autorités burundaises avaient pleine conscience. Lucides face aux impératifs de l’échéance, elles ont opté, en toute responsabilité, pour une décision assumée.

« C’est un choix réfléchi », confie une source avisée, précisant que ses répercussions seront multiples et d’une ampleur considérable. Au-delà du caractère immédiat de cette orientation, c’est l’équilibre même des dynamiques économiques et diplomatiques du pays qui se voit durablement redéfini.

Sur le plan financier, l’aide budgétaire de la Banque mondiale, qui était conditionnée à la réussite de cet accord, est également compromise. Sur le plan économique, les prévisions pour 2025 s’annoncent particulièrement préoccupantes, plusieurs analystes anticipant une année marquée par de graves difficultés.

En outre, le pays fait face à une situation critique en matière d’approvisionnement en carburant, les stations-service étant pratiquement à sec depuis plusieurs mois. Il est à noter que le gouvernement burundais avait entrepris la mise en œuvre de certaines réformes recommandées par le FMI avant l’échec de l’accord, notamment une première dévaluation de 38 %, à la suite de laquelle une première tranche de 62 millions de dollars avait été débloquée.

Cependant, la suspension de ce programme ébranle profondément la trajectoire économique projetée, compromettant les perspectives de stabilité et d’essor tant ambitionnées.

Elle précipite le pays dans une incertitude grandissante, où les marges de manœuvre se resserrent inexorablement. Loin d’être une simple entrave conjoncturelle, cette rupture impose une réévaluation drastique des orientations stratégiques, laissant planer une ombre inquiétante sur l’avenir et confinant le pays dans une spirale d’appréhensions et de désillusion.

Le président Evariste Ndayishimiye traverse une période des plus sombres.

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