Après six mois d’une brouille diplomatique âpre entre Bruxelles et Kigali, ce retour à une parole mesurée sonne comme une tentative de rétablir le contact, non par la fermeté ou la clarté, mais par une générosité verbale qui apaise à bon compte. Ce type de rhétorique, bien connu dans les annales diplomatiques, constitue un geste de neutralisation plutôt qu’une démarche de vérité : elle détourne l’attention des responsabilités concrètes et substitue au courage de l’action le confort d’un discours sans conséquence.
Or, la sincérité véritable en politique est une vertu rare et coûteuse. Elle ne se contente pas d’une mise en scène lexicale ; elle requiert le renoncement aux faux-semblants, la reconnaissance explicite des erreurs et l’acceptation pleine de leurs conséquences.
Elle suppose d’ôter le masque, de dévoiler les intentions et de se soumettre au jugement, parfois implacable, de l’opinion et de l’Histoire. Rien de tel n’apparaît dans l’attitude du ministre belge des Affaires étrangères : son propos n’est pas l’éclat d’une lucidité courageuse mais l’illustration d’un calcul de circonstance, destiné à se maintenir dans le jeu diplomatique sans trop s’y compromettre.
Le constat est d’autant plus sévère que les pérégrinations de Maxime Prévot au sein des institutions européennes et internationales ne lui ont guère permis de s’imposer comme une voix singulière ou structurante. Là où certains diplomates belges du passé, pensons à un Pierre Harmel, qui sut au cœur de la guerre froide concevoir une doctrine originale conciliant fermeté atlantique et ouverture au dialogue Est-Ouest, ou à un Louis Michel, dont la parole, parfois controversée mais toujours affirmée, marqua durablement la politique africaine de la Belgique, surent donner une direction et une identité à leur action, Prévot s’est trop souvent réfugié dans les circonvolutions tactiques.
Ses interventions, marquées par le compromis prudent et les déclarations de convenance, traduisent moins une vision d’ensemble qu’une volonté d’éviter l’écueil, quitte à renoncer à toute audace.
Comparé encore à certaines figures européennes contemporaines, un Josep Borrell, haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères, dont les déclarations, parfois abruptes, visent néanmoins à donner à l’Europe un poids stratégique, ou une Catherine Ashton avant lui, qui sut inscrire son action dans des négociations décisives comme l’accord nucléaire iranien, Maxime Prévot peine à imposer une empreinte discernable.
Sa parole ne tranche pas, elle se dilue ; elle n’inspire pas, elle rassure à la marge. De sorte que sa trajectoire politique, plus marquée par l’usure des compromis internes et l’érosion des opportunités que par de véritables conquêtes diplomatiques, s’apparente davantage à une succession d’occasions manquées qu’à une ascension structurante.
Ainsi, son assertion sur l’inefficacité des sanctions, loin d’incarner un moment de lucidité stratégique, illustre au contraire cette incapacité chronique à dépasser le registre de la déclaration mesurée pour atteindre celui de la parole structurante. Elle ne trace ni perspective ni horizon : elle se contente d’entretenir l’illusion d’une action réfléchie, alors qu’elle n’est en réalité que le symptôme d’un échec à penser le rôle de la Belgique et au-delà de l’Europe face aux drames qui déchirent la région des Grands Lacs.

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