Le dialogue politique est un pari à haut risque en RDC

Redigé par Tite Gatabazi
Le 27 mars 2025 à 09:52

A force de multiplier les options sans les inscrire dans une architecture stratégique cohérente, Félix Tshisekedi s’expose à une dilution progressive de son autorité. Son approche, dépourvue d’un cap nettement défini, le condamne à un affaiblissement insidieux, où chaque initiative avortée entame davantage sa crédibilité.

En l’absence d’une doctrine lisible et d’un dessein diplomatique rigoureusement articulé, son action oscille entre velléités contradictoires et approximations tactiques, creusant un déficit de confiance tant auprès de ses alliés que de ses interlocuteurs régionaux.

Pris dans un balancier hésitant entre la confrontation assumée et le dialogue tronqué, le président congolais peine à rallier des soutiens déterminants. Ses tentatives de conciliation, souvent éclipsées par des postures martiales, peinent à s’imposer face à des adversaires mieux structurés, plus méthodiques dans leur approche.

Dès lors, le flou stratégique qui entoure son action se fait le terreau d’une fragilisation progressive, où chaque avancée apparente se heurte à l’absence d’une vision d’ensemble susceptible d’inverser durablement le rapport de forces.

A rebours, l’AFC/M23 orchestre une diplomatie plus méthodique, s’inscrivant dans une rhétorique panafricaine habilement construite et tirant parti de l’épuisement croissant de la communauté internationale vis-à-vis du pouvoir de Tshisekedi.

Là où Kinshasa vacille, c’est avant tout sur le terrain militaire : la réalité du rapport de forces s’impose avec une implacable évidence. Une campagne mal maîtrisée, des revers successifs et une capacité opérationnelle mise à l’épreuve confèrent un ascendant stratégique à l’AFC/M23.

Sur le front diplomatique, l’incapacité de la RDC à imposer son agenda conforte son isolement relatif, tandis que sur le plan économique, la volatilité ambiante dissuade les investisseurs, exacerbant une instabilité déjà préoccupante. A mesure que le conflit s’enlise, un dilemme s’impose à Tshisekedi : persévérer dans une guerre dont il ne maîtrise plus les contours ou reconfigurer en profondeur sa politique étrangère en admettant l’impérieuse réalité du rapport de forces. Or, le temps ne joue guère en sa faveur.

À défaut d’un infléchissement stratégique majeur, Kinshasa risque de s’enfermer dans une impasse militaire et diplomatique dont elle pourrait ne jamais se départir. Dans cette perspective, le retrait de l’AFC/M23 des pourparlers de Luanda, pourtant cruciaux ne saurait être interprété autrement que comme une victoire purement conjoncturelle du chef de l’État congolais, dénuée d’incidence tangible sur le terrain.

Parallèlement, la réunion de Doha, bien qu’ayant constitué un précieux jalon de conciliation, demeure d’une fragilité inquiétante, tant qu’aucune garantie ferme ne vient en sceller les engagements. Sans un cadre structuré reposant sur des préalables clairement définis et des garanties réciproques entre le gouvernement congolais et l’AFC/M23, toute velléité de règlement négocié restera chimérique. C’est, à bien des égards, l’unique voie de sortie envisageable.

Kayikwamba Wagner, ministre des affaires étrangères de la RDC

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