Le retrait d’Uvira présenté comme geste de confiance

Redigé par Tite Gatabazi
Le 16 décembre 2025 à 06:30

L’annonce, par l’Alliance Fleuve Congo / M23, d’un retrait unilatéral de ses forces de la ville d’Uvira s’inscrit dans une rhétorique désormais bien établie des processus de désescalade armée : celle du geste de confiance destiné à créer une dynamique favorable à la négociation.

En se réclamant explicitement du processus de paix de Doha le mouvement entend donner à sa décision une portée politique et diplomatique qui dépasse le strict registre militaire. Il s’agit moins d’un simple redéploiement tactique que d’un acte présenté comme fondateur, supposé démontrer une volonté d’apaisement malgré, selon ses termes, des provocations répétées et des abus persistants imputés aux FARDC et à leurs alliés.

Toutefois, ce retrait est assorti de conditions substantielles qui en révèlent la fragilité intrinsèque. L’AFC/M23 subordonne en effet la mise en œuvre effective de cette décision à l’établissement de garanties de sécurité robustes et crédibles.

La démilitarisation complète de la zone d’Uvira, l’exclusion de toute présence armée qu’il s’agisse des FARDC, des FDLR, des groupes dits Wazalendo ou de troupes étrangères ainsi que le déploiement d’une force neutre chargée du contrôle du cessez-le-feu, constituent, aux yeux du mouvement, des préalables non négociables.

Cette exigence traduit une méfiance profonde, nourrie par des précédents où des mesures de confiance ont été, selon lui, instrumentalisées pour reconquérir militairement des territoires et exercer des représailles contre des populations perçues comme favorables à l’Alliance.

La sécurité des civils comme impératif supérieur

Au cœur de cette proclamation se trouve une affirmation centrale : la primauté absolue de la protection des civils. L’AFC/M23 met en garde contre toute tentative de tirer avantage du vide sécuritaire que pourrait engendrer son retrait, dénonçant par avance les manœuvres opportunistes susceptibles de replonger la ville dans un cycle de violences et de règlements de comptes.

En appelant les garants du processus de paix à assumer la gestion transitoire d’Uvira, le mouvement cherche à transférer la responsabilité sécuritaire à des acteurs tiers, censés incarner l’impartialité et prévenir les dérives. Cette posture s’inscrit dans un contexte régional et international particulièrement sensible et révèle également la crainte d’une manipulation politique du calendrier et des symboles du processus de paix, où les impératifs diplomatiques primeraient sur la réalité du terrain.

En proclamant que « la sécurité de la population passe avant toute chose », l’AFC/M23 tente de se placer sur le terrain moral et humanitaire, tout en rappelant que la paix ne saurait être décrétée sans mécanismes concrets de protection et de contrôle.

Ainsi, le retrait annoncé d’Uvira apparaît moins comme une fin en soi que comme une épreuve de vérité pour les garants du processus de Doha. S’il est accompagné d’une démilitarisation effective, d’une protection réelle des civils et du déploiement d’une force véritablement neutre, il pourrait constituer un jalon vers une désescalade durable.

A défaut, il risquerait de n’être qu’un épisode supplémentaire dans une longue succession de gestes avortés, où la manipulation politique l’emporte sur l’exigence fondamentale : préserver la vie et la dignité des populations prises en étau par la conflictualité armée.

Le retrait unilatéral de l’AFC/M23 d’Uvira s’inscrit dans une logique de désescalade visant à instaurer un climat favorable aux négociations

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