Le 13 mars 2024, dès 16h00, ils se sont dirigés vers différentes ambassades avec des documents détaillant l’histoire de leur exil, la situation actuelle des Tutsis en RDC, et leurs aspirations pour la résolution de ces crises.
Les ambassades des États-Unis, de Belgique, de Chine, du Royaume-Uni, du Burundi, du Kenya, les bureaux de l’Union Européenne et de la République Démocratique du Congo (RDC) ont été les principales cibles de ces remises de documents, qui se poursuivent en fonction du rôle que chaque acteur peut jouer dans la résolution de leur situation.
À 13h53, les premiers réfugiés sont arrivés à l’ambassade de la RDC au Rwanda. Après une attente de six minutes et un échange tendu avec le responsable de la sécurité, un employé de l’ambassade leur a finalement permis d’entrer, bien qu’il ait exprimé son mécontentement quant à la présence des médias, s’interrogeant sur la pertinence de leur accompagnement par des caméras lors d’une manifestation.
Les documents signés par les représentants des réfugiés révèlent que plus de 200 Tutsis sont actuellement emprisonnés pour leur ethnie, tandis que plus de 35 000 Banyamulenge et 15 000 Bahema de l’est du Congo ont fui leurs foyers. Plus de 1,4 million de vaches ont été tuées par les milices Wazalendo et FDLR.
L’ambassade de la RDC reste inflexible
John Nsengiyera, 27 ans, un des leaders du groupe ayant accédé à l’ambassade de la RDC au Rwanda, a rapporté qu’après une discussion de près d’une heure et vingt minutes avec un employé de l’ambassade, il est clair que celle-ci nie catégoriquement toute génocide contre les Tutsis en Congo.
"Ils n’admettent pas qu’ils nous tuent, ils n’admettent pas leur collaboration avec les FDLR, mais les preuves sont là. C’était le cœur de notre discussion, presque comme un débat," a-t-il déclaré.
Stupeur face à l’ignorance des conditions des réfugiés
Lors des discussions avec l’ambassade de la République Démocratique du Congo (RDC) au Rwanda, les représentants des réfugiés congolais ont été stupéfaits par le manque de connaissance des diplomates concernant les camps de réfugiés congolais présents au Rwanda.
John Nsengiyera, porte-parole des réfugiés, a exprimé son étonnement face à l’ignorance des responsables, notamment sur le nombre de camps et la durée de leur séjour au Rwanda, ce qui révèle un désintérêt flagrant pour leur situation.
"Une ignorance choquante"
Nsengiyera a rapporté que les questions posées par les diplomates concernant le nombre de camps de réfugiés congolais et la période de leur exil au Rwanda ont révélé un désintérêt marqué pour les enjeux des réfugiés.
"C’est surprenant qu’ils ne sachent pas combien de camps abritent des Congolais au Rwanda. Lorsqu’ils nous demandent combien de camps nous avons, et que nous répondons, il devient clair qu’ils ne se soucient pas de notre statut de réfugiés ici", a-t-il déclaré.
Accusations de politisation et de richesse infondées
Les réfugiés ont également été confrontés à des accusations de politisation de leur situation et de prétendue richesse, basées uniquement sur leur apparence.
"Ils nous ont vus vêtus de t-shirts [achetés 5000 Frw] et ont conclu que nous étions riches et privilégiés. Comment peuvent-ils juger de notre situation sur la base de vêtements ?", s’interroge Nsengiyera, dénonçant cette superficialité.
Un appel au silence ou à la défense
Face à la gravité de la situation en RDC, où Tutsis, Banyamulenge, et Bahema sont victimes d’un génocide, Nsengiyera souligne le silence complice de la communauté internationale.
"Les gens sont brûlés vifs, enterrés vivants, et on nous dit de reculer ? Nous demandons à ne pas être ignorés. Si le monde continue de se taire alors que nous mourons, qu’il reste silencieux quand nous nous défendrons", affirme-t-il.
28 ans d’exil et un appel à l’action
Après 28 ans d’exil, les réfugiés demandent aux ambassades de prendre leur défense et de reconnaître la responsabilité historique de certains pays, comme la Belgique, dans leur situation actuelle.
"Nous leur demandons de parler, car ils connaissent notre situation.
Les Belges en sont en partie responsables, mais ils refusent de reconnaître que nous sommes Congolais", conclut Nsengiyera, appelant à une prise de conscience et à une action internationale.
Ce n’est pas la première fois qu’ils s’adressent aux ambassades
Le 13 janvier 2023, les réfugiés congolais ont déjà adressé des lettres à différentes ambassades pour solliciter leur soutien face aux violences subies par leurs proches restés dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), une démarche qui s’est avérée fructueuse.
Selon Nsengiyera, cette action avait immédiatement provoqué une réaction internationale.
"Des communiqués ont été publiés, le monde s’est réveillé et a appelé à cesser les discours de haine.
C’est alors qu’a été rédigé le rapport mentionnant qu’un génocide pourrait se produire en RDC, visant spécifiquement les Tutsis."
"Si auparavant ils reconnaissaient la possibilité d’un génocide, aujourd’hui nous sommes là pour leur rappeler qu’il se produit réellement. Nous faisons notre part, à eux de faire la leur."
Persistance du Dénigrement
En tentant de convaincre les représentants des ambassades de la réalité du génocide en cours, les réfugiés ont été confrontés à un déni obstiné, malgré la présentation de documents officiels attestant de leur appartenance ethnique.
"Ils n’ont jamais admis qu’ils nous tuaient. Ils nous ont montré des documents en disant, comment pourrions-nous vous tuer si nous donnons des papiers à un Tutsi ? Même dans leurs documents, il est écrit ’ethnie : Tutsi’."
Prêt à lutter pour leur droit
Les réfugiés expriment leur épuisement face à la longueur de leur exil, pendant que leurs terres sont exploitées par les FDLR et que leurs familles subissent des atrocités sous le regard indifférent du monde.
"Nous nous défendrons et retrouverons notre pays, sans détours. Nous agissons pour voir si quelque chose peut être fait. Si cela échoue, nous, les centaines de milliers dans les camps à travers différents pays, ne resterons pas à l’écart. Nous combattrons jusqu’à ce que nous retrouvions notre pays. Si on ne nous le rend pas de bon gré, alors nous luttons."
Le directeur du camp de Nyabiheke, situé dans le district de Gatsibo, souligne que les massacres perpétrés dans le Sud-Kivu, et les interventions des forces M23 et Twirwaneho pour protéger les populations menacées sont perçues comme problématiques, ignorant ainsi le sort des victimes.
"Nous savons que nous retournerons un jour dans notre pays, la RDC, que cela plaise ou non. Ils peuvent accepter de vivre en paix avec nous, ou refuser, mais nous nous battrons jusqu’à notre dernier souffle ou jusqu’à notre retour."
Les réfugiés demandent l’application des résolutions issues des dialogues de Nairobi et Luanda, notamment le désarmement de la FDLR, identifiée comme la racine de leur exil.
Parmi eux, certains sont au Rwanda depuis 28 ans, ayant fui les violences, et d’autres y sont nés, exprimant leur désespoir de ne pas connaître leur patrie.
À la date de janvier 2024, le Rwanda compte 135.343 réfugiés dont la majorité sont des congolais et des burundais
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