Pourquoi le Rwanda a expulsé des pseudo-chirurgiens venus de Belgique

Redigé par Tom Ndahiro
Le 23 mai 2025 à 10:56

Face à cette persécution persistante, le Rwanda a fait le seul choix rationnel : couper les ponts avec la Belgique. La décision de rompre les relations diplomatiques avec le Royaume n’a pas été un acte d’agression, mais un acte d’autoprotection.

Ce n’était pas un geste impulsif, mais un rejet nécessaire d’une relation toxique.

La réaction de la Belgique fut prévisible et théâtrale — une indignation feinte, une innocence blessée, les sempiternels lamentations sur « l’hostilité » du Rwanda. Mais la vérité est simple : le Rwanda ne doit rien à la Belgique. Ni reconnaissance, ni obéissance, ni silence.

Comment le Rwanda pourrait-il continuer à collaborer avec un pays qui abrite des fugitifs du génocide, donne une tribune aux négationnistes du génocide et sape constamment sa souveraineté ? Aucune nation ne tolérerait cela.

Imaginons, un instant, que le Rwanda ait fait à la Belgique ce que la Belgique a fait au Rwanda. Imaginez une administration coloniale rwandaise arrivant à Bruxelles en 1920 et décidant que les Belges devaient être divisés en races supérieures et inférieures.

Imaginez aussi des bureaucrates rwandais mesurant les crânes des Belges, concluant que les Wallons étaient « plus proches des Africains » et donc aptes à gouverner, tandis que les Flamands étaient des « travailleurs primitifs » devant être réprimés.

Imaginez qu’après des décennies à encourager cette hiérarchie raciale, le Rwanda renverse soudainement sa politique, incite les Flamands à massacrer les Wallons, puis se retire, laissant derrière lui un bain de sang.

Maintenant, imaginez que, 70 ans plus tard, le Rwanda ait l’audace de faire la leçon à la Belgique sur la démocratie, les droits de l’homme et la bonne gouvernance — tout en refusant simultanément de reconnaître ses propres crimes.

La Belgique accepterait-elle une telle hypocrisie ? Filip Reyntjens trouverait-il cela un exercice intellectuel amusant ? Bien sûr que non. L’esprit belge recule devant une telle idée. Parce que la Belgique s’accroche au mythe de sa supériorité morale, même lorsque l’histoire prouve le contraire.

Revenons à la réalité. Imaginez un hôpital pas comme les autres — un lieu où les médecins et les infirmiers ne sont pas là pour guérir le patient, mais pour s’assurer que la maladie prospère, que les blessures s’infectent, et que le corps dépérisse lentement, tandis que des visiteurs souriants applaudissent leur manière de faire auprès du lit.

Dans ce service particulier, le patient, c’est le Rwanda — autrefois un organisme robuste, doté d’une vitalité et d’une cohésion ancestrales, aujourd’hui poussé dans un fauteuil, meurtri et à peine respirant après avoir subi les tortures prolongées de la chirurgie coloniale, de l’infection idéologique et des erreurs médicales post-génocide.

Surveillant ce patient, en blouses blanches et armés de carnets de moralité, se trouvent rien moins que les héritiers de l’administration hospitalière du roi Léopold : les Belges.

Il est important de se rappeler qu’avant la colonisation, le Rwanda n’était pas toujours dans ce service. C’était autrefois une société remarquablement bien organisée, dotée d’un système de gouvernance complexe et avancé.

Bien avant que le scalpel impur européen ne l’ouvre, le Rwanda possédait une monarchie centralisée, un système juridique structuré et un puissant sentiment d’unité.

Mais lorsque le gouvernement colonial belge arriva — ayant déjà perfectionné sa doctrine de cruauté et de contrôle au Congo — il ne vint pas avec des outils de guérison.

Il apporta un carnet de prescriptions déjà rempli d’anthropologie raciste, d’arrogance ecclésiastique et d’une soif de domination totale. La maladie à diagnostiquer ? L’identité tutsi. Le remède ? Diviser pour mieux régner.

La Belgique hérita du Rwanda de l’Allemagne après la Première Guerre mondiale, et ne perdit pas de temps pour ouvrir le corps de la nation à une chirurgie pour le moins contraire à l’éthique.

Le Royaume se mit au travail avec scalpels et seringues, impatient de remodeler la société rwandaise à son image raciste. Il injecta au Rwanda le pathogène le plus mortel qui soit : l’idéologie de la supériorité raciale.

Avant l’ingérence belge, l’identité rwandaise était fluide. Hutu, Tutsi et Twa étaient des classifications sociales et économiques, non des catégories raciales rigides.

Mais la Belgique — armée de ses théories raciales européennes et de son besoin pathologique de contrôle — déclara que les Rwandais devaient être soumis à un tri « scientifique ».

Elle mesura des crânes, examina des nez, et déclara que les Tutsis étaient « grands, aristocratiques, et plus proches de l’idéal européen », tandis que les Hutus étaient « petits, trapus, et mieux adaptés au travail manuel ». Les Twa ? Une simple pensée secondaire.

Cette classification raciale absurde n’était pas une simple observation, mais une injection — celle d’un pathogène importé destiné à attiser des divisions là où il n’en existait pas auparavant.

Pour formaliser cette folie, la Belgique émit en 1935 des cartes d’identité qui figèrent ces distinctions sociales en catégories raciales rigides.

Les conséquences furent immédiates et désastreuses. Le régime colonial belge éleva les Tutsis au rang d’élite dirigeante tout en opprimant systématiquement les Hutus, créant ainsi les conditions parfaites pour le ressentiment, la discorde et la catastrophe à venir.

Puis, comme un médecin peu éthique lassé de son propre expérience, la Belgique changea de cap dans les années 1950 et commença à attiser la rancune des Hutus contre les Tutsis, encourageant la violence et orchestrant les premiers massacres de Tutsis en 1959.

Voici le chirurgien, scalpel encore en main, feignant maintenant l’horreur devant le patient qui saigne.

Le Congo de Léopold II fut le terrain d’entraînement de cette médecine toxique. Là-bas, le serment du médecin fut réécrit pour servir le profit plutôt que la vie.

On coupait des mains non pas pour sauver des vies, mais pour rappeler aux esclaves que même un travail sans membres était attendu d’eux. Ce que le Congo a vécu enchaîné, le Rwanda le subirait en idéologie.

Les colonisateurs belges — accompagnés de leurs assistants ecclésiastiques — abordèrent le Rwanda non pas comme des gardiens de la dignité humaine, mais comme des taxonomistes de la biologie tribale.

Ils arrivèrent avec leurs mètres de phrénologie, leurs compas à crâne et leurs carnets qui proclamaient que les Tutsi étaient plus « nobles » et les Hutu plus « enracinés », sur la base de théories raciales farfelues importées d’Europe.

Mais ce diagnostic n’a jamais concerné la vérité. Il s’agissait d’ingénier des lignes de fracture permanentes — de figer les populations dans des catégories tribales rigides. Le Rwanda fut condamné à une pathologie de division à lente hémorragie.

La Belgique n’a pas seulement colonisé le Rwanda ; elle l’a infecté. Elle a joué le rôle d’un savant fou, injectant ses propres théories raciales perverses dans le sang de la société rwandaise.

Les classifications pseudo-scientifiques imposées par la Belgique — distinguant Hutu et Tutsi selon des lignes raciales fabriquées — n’étaient pas de simples particularités administratives. Elles constituaient une condamnation à mort ; une bombe à retardement.

Dès les années 1930, les administrateurs belges, avec le soutien enthousiaste des missionnaires catholiques, menèrent une campagne d’ingénierie ethnique.

Ils dépouillèrent les Tutsi de leur identité autochtone pour les requalifier en race étrangère — une aristocratie alien supposée avoir subjugué les Hutu « indigènes ».

L’absurdité de ce récit était sans importance ; ce qui comptait, c’était son utilité. Il offrait à la Belgique un levier pour diviser et régner, un mécanisme pour fracturer la société rwandaise en camps irréconciliables.

Les infâmes cartes d’identité n’étaient pas de simples documents ; elles étaient des incisions chirurgicales contaminées, découpant les Rwandais en catégories raciales rigides.

D’un simple coup de stylo, la Belgique institutionnalisa la division, s’assurant que les Rwandais ne se considéreraient plus comme un seul peuple.

Ces documents serviraient plus tard de listes d’exécution lors du génocide contre les Tutsi en 1994, quand les tueurs demandaient une pièce d’identité avant de décider qui vivrait et qui mourrait.

Les Belges — ce même empire qui avait exploité un zoo humain à Bruxelles — avaient réussi à injecter au Rwanda une maladie étrangère : le racisme comme politique d’État.

Puis, dans un acte de détachement cynique familier à tous les mauvais médecins, la Belgique s’en est simplement allée.

Lorsqu’elle quitta le Rwanda au début des années 1960, elle ne remit pas au patient un protocole de soins. Elle tendit le scalpel à ceux déjà formés à la dissection.

À la place d’un peuple souverain, elle laissa une société fracturée, affaiblie par l’idéologie et manipulée par la peur.

Elle arma des factions extrémistes qui avaient intériorisé la hiérarchie raciale, leur remit des instruments de répression, puis documenta les pogroms qui en résultèrent comme s’il s’agissait de symptômes sans lien du « tribalisme africain ».

Si le colonialisme avait un service hospitalier, le Rwanda en aurait été le patient le plus tragique. Le médecin colonial n’a jamais été seul dans sa faute. Il avait des infirmières — fidèles — vêtues de soutanes, se signant en murmurant des bénédictions sur du poison.

La Belgique était le médecin principal, clipboard en main, tandis qu’une infirmière nommée Église catholique ajustait le kit de perfusion d’idéologie et de sédation. L’Église catholique n’a pas été une simple spectatrice dans la pathologie coloniale du Rwanda. Elle fut, dans bien des cas, la main opérante.

Même après le génocide, nombre de ces « infirmières » ecclésiastiques refusèrent de confesser. Certaines s’enfuirent en Europe — notamment en Belgique et en France — où elles furent protégées ou ignorées, malgré des accusations de complicité dans des crimes contre l’humanité. D’autres restèrent, voilées de sacrements, parlant de pardon tout en refusant toute responsabilité.

Ensemble, elles tracèrent un protocole de traitement qui n’avait rien à voir avec la guérison, mais tout avec la déformation de l’âme d’une nation. Elles ne voulaient pas que le Rwanda guérisse.

Elles voulaient qu’il reste dépendant, soumis et irrémédiablement brisé. Et maintenant, alors que le Rwanda commence — contre toute attente — à recoudre ses blessures, les mêmes mains qui resserraient autrefois le bandage sur son sang vital sont revenues, non pas avec des excuses, mais avec un mépris pour le chirurgien qui prétend sauver le patient.

Le génocide contre les Tutsi en 1994 n’a pas été une fièvre soudaine, mais l’échec catastrophique d’un empoisonnement long et délibéré.

La Belgique, avec l’arrogance d’un médecin dont la faute professionnelle est protégée par la distance et la couleur de peau, avait transformé les classifications ethniques en scalpels, découpant une société qu’elle prétendait diagnostiquer.

Elle a fabriqué les Hutu et les Tutsi en catégories immuables et injecté au Rwanda la haine, la division et la distorsion spirituelle. Lorsque le corps convulsa enfin dans une agonie génocidaire, le médecin haussa les épaules, fit ses valises et quitta l’hôpital.

Voici la tragédie du Rwanda : son génocide n’a pas commencé en 1994. Il n’a été que le point culminant d’une longue maladie non traitée, délibérément mal gérée par des acteurs coloniaux et postcoloniaux. Et la Belgique, ce médecin colonial qui a semé le cancer, siège aujourd’hui dans des forums internationaux pour donner des leçons sur les « droits humains » et la « démocratie » comme si elle était une autorité en matière de guérison.

La reconstruction du Rwanda

Le Rwanda — meurtri mais pas brisé — a entamé sa propre reconstruction. Contre toute attente, il a réussi à se recoudre à travers la vérité, la réconciliation, la réforme économique et la diplomatie régionale. Il a mis en place des mécanismes de responsabilité, reconstruit ses institutions et refusé d’accepter la victimisation comme identité.

Pourtant, les anciens médecins et infirmières ne sont pas satisfaits. Ils froncent les sourcils devant la volonté du patient. Ils réprimandent le Rwanda pour son affirmation de soi, pour sa quête de justice, pour son refus d’être manipulé. Ils chuchotent que le Rwanda est « autoritaire », qu’il réprime « l’opposition », comme si l’alternative était un retour au pluralisme malade qui a conduit au génocide.

Pendant ce temps, la même Belgique qui héberge les négationnistes du génocide tolère aussi la vente de littérature haineuse, ferme les yeux sur les prêtres fugitifs et offre une tribune à des « experts » prétendant que le génocide n’était pas vraiment un génocide — juste une guerre civile avec des excès regrettables.

Certains de ces « experts » vont même jusqu’à prétendre que le Front patriotique rwandais (FPR), qui a stoppé le génocide, ne faisait que « s’emparer du pouvoir ». C’est comme accuser le chirurgien qui arrête une hémorragie de vouloir monopoliser la salle d’opération.

Alors, il faut se demander : que veut le médecin ? Pour quoi prie l’infirmière ? Il devient inquiétant de constater que la guérison n’est pas le but. Un Rwanda en bonne santé expose leur propre complicité. Un Rwanda prospère et assuré contredit le récit selon lequel l’Afrique doit être gérée, sermonnée ou sauvée par ses anciens colonisateurs.

Le refus du Rwanda de s’agenouiller est perçu non comme une guérison, mais comme une défiance. Et la défiance, pour ceux qui croyaient écrire l’histoire de l’Afrique, est la trahison ultime.

Dans ce drame, la RDC joue le rôle d’un service voisin dans le même hôpital. Mais ici, la maladie a été laissée à métastaser. L’État congolais, sous la conduite de dirigeants successifs, a permis à des idéologies génocidaires de prospérer, en particulier contre les Tutsi congolais.

Des groupes armés comme les FDLR, composés de rescapés des génocidaires rwandais, circulent librement et sont même intégrés dans l’armée congolaise. Des discours de haine sont diffusés, des communautés tutsi sont attaquées, et la communauté internationale détourne le regard.

Et la Belgique ? Elle publie des déclarations soigneusement équilibrées, appelant « les deux parties » à faire preuve de retenue, comme si le Rwanda était également responsable du réveil de son propre traumatisme dans un pays voisin.

La même Belgique qui ne parvient pas à arrêter des suspects connus du génocide sur son territoire donne des leçons au Rwanda sur la discipline militaire et la paix régionale. Ce n’est pas de la diplomatie. C’est une faute professionnelle spirituelle.

Dans un véritable hôpital juste, le médecin s’excuserait, et l’infirmière confesserait. Ils soutiendraient la guérison du patient sans arrogance ni sabotage. Mais dans l’hôpital des relations internationales, le Rwanda est souvent traité non pas comme un survivant, mais comme un sujet problématique — un sujet qui insiste sur l’autodétermination, la responsabilité et la mémoire.

Pourtant, le Rwanda persiste. Il est devenu son propre médecin. Il a rédigé de nouvelles prescriptions — mettant l’accent sur l’unité plutôt que la division, la compétence plutôt que la dépendance, et la vérité plutôt que les convenances narratives. Et il a averti le monde : plus jamais n’est pas un slogan. C’est un engagement.

Pourtant, les anciens médecins refusent de quitter la pièce. Ils rôdent au pied du lit, murmurant des diagnostics qui servent leur réputation, pas le patient. Mais le Rwanda ne les écoute plus. Il se rétablit. Non pas grâce à eux, mais malgré eux.

Et voilà le vrai scandale. Mais la tragédie, pour eux, c’est que le patient n’est pas mort.

Sous le Front patriotique rwandais (FPR), les nouveaux gardiens ont refusé de laisser le corps pourrir. Ils n’ont pas suivi les prescriptions de la décomposition. Au contraire, ils ont nettoyé les blessures, cautérisé les sources d’infection et exigé des comptes à ceux qui avaient transformé les scalpels en machettes. Pour les médecins sans éthique, c’était de l’hérésie.

Vous voyez, si le patient guérit sans eux, si le corps retrouve sa force sans leur guide, alors toute leur carrière — tout leur mythe — s’effondre. Ils deviennent le méchant, non le sauveur. C’est ce que la Belgique ne peut pas supporter.

Cela explique ce besoin obsessionnel de miner la reconstruction du Rwanda. Les médias occidentaux, alimentés par une « préoccupation » teintée de nostalgie coloniale, diagnostiquent l’autoritarisme là où il y a discipline, la répression là où il y a justice, et le silence là où il y a une guérison digne.

La Belgique, en particulier, a maîtrisé le langage du paternalisme post-génocide. Elle ne crie plus ; elle murmure ses inquiétudes lors de conférences, rédige des résolutions, et acquiesce avec approbation aux révisionnistes et négationnistes déguisés en opposition.

Elle amplifie des voix pestilentielles comme celle de Victoire Ingabire, promotrice condamnée d’idéologie génocidaire, non pas parce qu’elle croit en la liberté d’expression, mais parce que chacun de ses mots rouvre une blessure.

Ils portent aux nues des groupes comme Jambo Asbl — non pas malgré leurs liens avec les génocidaires, mais à cause de ces liens. Jambo Asbl est un groupe qui blanchit les massacres de masse avec une allure académique et un charme juvénile.

Ce n’est pas de la négligence. C’est la poursuite d’une malveillance. L’infirmière prétend désormais être une lanceuse d’alerte, accusant le FPR de maltraiter le patient, tout en passant discrètement le poison sous la table.

Et où circule ce poison ? Dans le discours international, le Rwanda est réprimandé pour sa «  présence  » en RDC, tandis que les FDLR — descendants des génocidaires — opèrent librement sous un bandeau global.

Quand le Rwanda renforce ses frontières, on l’accuse de militarisme. Quand il parle de justice, on lui dit de se réconcilier. Quand il refuse de mourir, on l’accuse d’arrogance.

Le mécontentement de la Belgique à l’égard du FPR n’est pas politique — il est psychologique. Elle ne supporte pas de voir son ancien patient marcher. Pire encore, elle déteste que ce patient refuse de lui dire merci.

Un Rwanda guéri, qui se tient droit et parle sans trembler, est insupportable pour un système dont l’ego s’est construit sur l’effondrement de l’Afrique.

N’oublions pas le Congo du roi Léopold, ce théâtre cauchemardesque où la même doctrine d’extraction et de mutilation a été perfectionnée. C’est la même illusion médicale qui guidait ce régime — la croyance que les Africains sont de la matière première, pas des êtres humains.

Dans le Congo de Léopold, on coupait des membres pour quotas non atteints ; dans le Rwanda colonial, on séparait les esprits de la vérité. Aujourd’hui, lorsque la Belgique exhibe ses titres en matière de droits humains, elle le fait sur les tombes qu’elle a creusées puis abandonnées.

La preuve la plus accablante de cette hypocrisie réside dans leur traitement de la justice. La Belgique héberge, protège et, parfois, donne une tribune à des négationnistes et sympathisants du génocide notoires. Le gouvernement belge offre une plateforme à des hommes comme Gaspar Musabyimana, l’architecte des émissions de la RTLM, qui reconditionne la douleur d’un million de morts en bile conspirationniste.

Le médecin qui supervisait la mutilation remet aujourd’hui en question les méthodes de celui qui recoud les plaies.

Non, le Rwanda n’est pas parfait. Aucun chirurgien n’opère sans risque. Mais il est obscène de prétendre que ceux qui ont laissé le pays saigner pendant des décennies détiennent désormais l’autorité morale pour critiquer sa guérison.

Le FPR a refusé de traiter le Rwanda comme un cadavre. Il a défié l’obsession maladive du monde pour la fragilité africaine. Il a déclaré : nous ne mourrons pas en silence pour que vos manuels d’histoire restent propres.

Le Rwanda est en train de guérir — lentement, douloureusement, délibérément. Et ceux que cela dérange le plus ne sont pas les victimes, mais les anciens médecins qui pensaient avoir rédigé le diagnostic final.

Nous devons nommer les choses telles qu’elles sont. Le ressentiment de la Belgique envers le FPR ne concerne ni la démocratie, ni la justice, ni les droits humains. Il s’agit de contrôle, d’un refus d’accepter que les Africains puissent être les auteurs de leur propre résurrection. Le scalpel colonial a peut-être changé de main, mais son appétit demeure.

Le Rwanda n’a pas à mourir pour que la Belgique se sente moins coupable. Il n’a pas à apaiser les égos européens par le silence, ni à déformer son système judiciaire pour accommoder des tueurs qui portent désormais des costumes.

L’histoire du Rwanda est celle d’une résistance miraculeuse. C’est l’histoire d’un patient qui, privé d’anesthésie, s’est réveillé pendant l’opération, a arraché les instruments des mains des médecins, et a commencé à se soigner lui-même. Cette histoire est trop puissante, trop dangereuse pour ceux qui ont bâti leur réputation sur sa mort.

Aujourd’hui, la Belgique se donne des airs d’infirmière bienveillante. Elle fronce les sourcils devant les défis du Rwanda, secouant la tête avec inquiétude. Mais derrière les gants blancs se cache une main qui finance, héberge et protège les négationnistes du génocide, les génocidaires en fuite, et des organisations comme Jambo Asbl — un groupe qui enjolive le massacre de masse avec une élégance académique et un charme juvénile.

Ce qui blesse le plus la Belgique et ses sympathisants, c’est que le Rwanda n’est pas resté mort. Le Front Patriotique Rwandais (FPR), surgissant des camps de réfugiés en Ouganda et des cendres d’un génocide que le monde a regardé en silence, a refusé le pronostic.

C’est le FPR qui a arrêté le génocide — pas l’ONU, pas la France, et certainement pas la Belgique.

Elle a construit un système de santé, sorti des millions de la pauvreté, instauré l’éducation universelle, et créé l’une des sociétés les plus sûres du continent. Elle a réappris au patient à marcher, à parler, et à être fier de ses cicatrices.

La culpabilité du docteur et l’envie de l’infirmière

Si le Rwanda saignait encore, ils organiseraient des sommets. Si le Rwanda était un État en faillite, ils enverraient des groupes de réflexion. Si le Rwanda restait dans le chaos, la Belgique jouerait encore le rôle de médecin-chef, offrant une charité occasionnelle tout en veillant à ce que le patient ne menace jamais le système qui l’a rendu malade.

Mais le Rwanda d’aujourd’hui est un miroir — et dans ce miroir, la Belgique voit son propre visage, tordu par la culpabilité, l’envie et la lâcheté morale.

Le patient ne se contente pas de survivre ; il prospère d’une manière qui remet en question les méthodes dépassées du médecin. Cela les effraie. Car si le Rwanda peut se relever, alors les questions aussi peuvent surgir : Pourquoi la Belgique a-t-elle menti ? Pourquoi le monde a-t-il abandonné le Rwanda ? Pourquoi abrite-t-il encore ceux qui ont massacré son peuple ?

La colère de la Belgique envers le Rwanda ne concerne pas les droits humains — elle concerne le droit des colonisés à guérir selon leurs propres termes.

La réalité, c’est qu’il y a un patient, qui rédige désormais sa propre ordonnance. Aujourd’hui, le Rwanda est à la fois patient et médecin. Il est prudent, conscient des ombres qui rôdent. Il construit des hôpitaux, non des armées d’experts d’ONG. Il parle doucement, mais porte les cicatrices d’un million de voix.

Ce que le Rwanda réclame, ce n’est pas la sainteté, mais l’équité. Ce n’est pas le silence, mais la vérité. Il veut que le monde comprenne que guérir ne signifie pas oublier, que la résilience ne signifie pas consentir à l’abus, et que la justice ne signifie pas permettre le négationnisme au nom du « débat ».

La Belgique et ses alliés peuvent choisir de devenir de véritables partenaires dans la guérison. Mais cela exigerait qu’ils admettent ce qu’ils ont fait — et pire encore, ce qu’ils continuent de permettre.

En attendant, le Rwanda a pleinement le droit de protéger sa reconstruction, de préserver son récit, et de rejeter le remède de l’hypocrisie morale.

Ce patient vit. Et il ne sera plus jamais le cobaye de qui que ce soit.

Le ministre belge des Affaires étrangères, Maxime Prévot

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