Quand la quantité supplante la stratégie ou le revers cuisant de Tshisekedi à Goma

Redigé par Tite Gatabazi
Le 16 mai 2025 à 01:40

Ce qui s’est joué à Goma voici trois mois n’est pas un simple revers militaire : c’est l’illustration cinglante d’un État désarticulé, vidé de sa substance stratégique, et livré aux simulacres de puissance.

Avec plus de 40 000 hommes prétendument déployés à Goma qu’ils soient issus des FARDC, des criminels Wazalendo, des FDLR recyclés, de contingents burundais, de mercenaires ou de la SADC, la ville était devenue un véritable camp retranché, saturé d’armements, d’uniformes et de drapeaux.

Un conglomérat hétéroclite de forces armées, mais sans colonne vertébrale. Le tout, pourtant, n’aura été qu’un colosse aux pieds d’argile, incapable de résister à l’offensive déterminée de l’AFC/M23, formation pourtant bien moins nombreuse mais galvanisée par la cohérence tactique, la discipline opératoire et la clarté d’un objectif.

La débâcle fut à la mesure de l’illusion : totale, brutale, indélébile. Tandis que Goma tombait, la panique s’empara des rangs gouvernementaux. Les militaires en déroute, désarmés ou faits prisonniers, s’amoncelaient piteusement dans les gradins du stade de l’Unité ou erraient, hagards, dans les couloirs de la MONUSCO, implorant protection.

L’image de ces soldats, aujourd’hui réduits à fuir sous l’égide d’une force onusienne, constitue une humiliation nationale. Elle dévoile l’abîme entre les chiffres affichés et les capacités réelles, entre la rhétorique martiale du pouvoir central et le néant opérationnel du commandement sur le terrain.

L’opération de transfert de plus de 1 300 membres non armés des FARDC et de la PNC, orchestrée par la MONUSCO avec l’appui du CICR, achève ce tableau accablant. Derrière la froideur technocratique du communiqué officiel se cache un désaveu historique : celui d’un État qui ne tient plus par lui-même, qui doit exfiltrer ses propres forces comme on évacue les ruines d’une défaite, et qui se repose désormais sur la charité diplomatique pour sauver ce qui peut l’être. Cette opération, quoique menée dans le respect des engagements humanitaires, scelle la faillite d’un système militaire hypertrophié mais sans doctrine, gangréné par les duplications de commandement, les allégeances contradictoires et la politisation outrancière de la chaîne de commandement.

Au fond, la chute de Goma n’est pas seulement militaire : elle est éminemment politique. Elle témoigne de l’échec d’un État qui croit qu’aligner des bataillons suffit à garantir la souveraineté, alors que la victoire, dans le fracas des armes, appartient d’abord à ceux qui savent où ils vont, pourquoi ils se battent et pour qui.

Rien n’est plus dangereux qu’un pouvoir qui se ment à lui-même, qui maquille la désorganisation en patriotisme et l’amateurisme en bravoure. Le peuple congolais, quant à lui, paie le prix de ces illusions : il observe, impuissant, la lente agonie d’un État qui ne sait plus défendre ni ses villes, ni ses hommes, ni son honneur.

Ce qui s’est joué à Goma voici trois mois est l’illustration cinglante d’un État désarticulé

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