Ce texte, âprement négocié sous les auspices de la diplomatie américaine et adossé aux résolutions antérieures du mécanisme de Luanda, avait pourtant le mérite de la clarté : la neutralisation des FDLR constitue la condition sine qua non du processus de désescalade.
En d’autres termes, l’éradication de cette milice génocidaire est non seulement un impératif moral, mais la clef de voûte du retrait progressif des dispositifs défensifs rwandais à l’Est de la République démocratique du Congo.
Or voici que surgit, tel un spectre familier, Mme Kayikwamba, porte-voix officielle des incohérences stratégiques de Kinshasa, qui entonne une nouvelle version du désengagement : selon elle, il faudrait d’abord exiger le retrait des troupes rwandaises et ensuite, en second ressort, procéder à la neutralisation des FDLR.
Une inversion aussi grotesque que périlleuse de l’ordre de priorité, qui s’apparente à une entreprise de falsification méthodique des engagements pris pour ne pas dire une trahison diplomatique en direct.
Ce renversement axiologique qui érige l’effet en cause et la conséquence en prérequis dénature l’architecture même de l’Accord de Washington. Il s’agit là, ni plus ni moins, d’une tentative de sabotage intellectuel du processus de paix, d’un effort de reconfiguration narrative visant à camoufler une double imposture : le refus obstiné de désarmer les FDLR et la volonté latente de maintenir un état de tension dans l’Est pour en justifier la militarisation constante et les répressions ciblées.
Le gouvernement congolais, par ce biais, s’inscrit dans une longue tradition de duplicité où la parole donnée n’a d’autre vocation que d’être ajournée, détournée ou purement annulée par des lectures biaisées et des interprétations politiquement opportunes.
La sortie de Mme Kayikwamba ne procède pas d’une simple divergence d’analyse ; elle relève d’un agenda dissimulé, aujourd’hui ébranlé par la rigueur du texte signé, et que l’on tente de sauver en violant cyniquement l’esprit comme la lettre de l’accord.
Les plus optimistes y verront peut-être un simple faux pas diplomatique, une dissonance précoce dans un processus naissant. Mais à y regarder de plus près, il s’agit d’un acte prémédité, d’une volonté manifeste de désorienter l’opinion publique et de délégitimer la logique de paix par des arguties procédurales.
Le chemin vers la stabilisation de l’Est congolais s’annonce plus tortueux que jamais : non pas en raison de l’adversité extérieure, mais bien à cause des contradictions internes d’un pouvoir qui pactise avec ses propres démons.
Car à quoi bon signer des accords si c’est pour les pervertir dès le lendemain ? À quoi bon promettre la neutralisation des forces du mal si l’on s’empresse de leur offrir un répit stratégique ?
L’histoire jugera sévèrement ceux qui, pour des intérêts partisans ou identitaires, auront saboté la dernière chance d’une paix durable dans la région des Grands Lacs. Il ne s’agit plus seulement d’un échec diplomatique : c’est une forfaiture morale.

AJOUTER UN COMMENTAIRE
REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Ne vous eloignez pas du sujet de discussion; Les insultes,difamations,publicité et ségregations de tous genres ne sont pas tolerées Si vous souhaitez suivre le cours des discussions en cours fournissez une addresse email valide.
Votre commentaire apparaitra apre`s moderation par l'équipe d' IGIHE.com En cas de non respect d'une ou plusieurs des regles d'utilisation si dessus, le commentaire sera supprimer. Merci!