De retour d’un séjour qu’il présente comme professionnel en République démocratique du Congo, précisément à Bunia, dans la tourmentée province de l’Ituri, M. Le Sommier a cru devoir décrire les massacres perpétrés dans une église par les Forces démocratiques alliées (ADF).
Or, dans son récit, l’approximation devient travestissement : « Il s’agit des rebelles rwandais qui s’appellent ADF NALU, un groupe djihadiste », affirme-t-il. Voilà qui, en une phrase, amalgame des réalités incompatibles, réécrit la cartographie des violences et entérine, par ignorance ou par malice, une lecture biaisée de l’histoire récente des Grands Lacs.
Car quiconque connaît, ne serait-ce qu’imparfaitement, la sociologie des groupes armés opérant à l’Est de la RDC sait que les ADF, d’origine ougandaise, se sont islamisés au fil du temps, se revendiquant d’un djihad transnational, mais ne sauraient en aucun cas être assimilés à quelque formation armée rwandaise.
La confusion opérée par M. Le Sommier ne relève pas seulement de la paresse intellectuelle ou de l’incompétence professionnelle ; elle flirte avec une imposture médiatique qui, sous couvert de grand reportage, reconduit les stéréotypes éculés de l’« anti-rwandisme primaire » si cher à certains cercles journalistiques occidentaux.
Il y a là plus qu’une erreur : une participation involontaire, ou délibérée, à la banalisation d’un discours délétère, qui fait du Rwanda une variable explicative universelle de tous les drames régionaux, sans nuance, sans rigueur, sans respect pour la vérité.
Ce biais narratif n’est pas neutre : il nourrit les fantasmes complotistes, conforte les rhétoriques haineuses et brouille, pour l’opinion publique internationale, la compréhension des responsabilités réelles dans les conflits de l’Est congolais.
La déontologie journalistique, dont on attend qu’elle repose sur la vérification scrupuleuse des faits, la prudence lexicale et l’honnêteté intellectuelle, ne saurait se satisfaire d’un tel mélange de précipitation et de sensationnalisme. L’Ituri et le Kivu ne sont pas des décors exotiques destinés à flatter l’ego du reporter en quête de frissons narratifs : ils sont le théâtre de tragédies humaines qui méritent mieux que ces distorsions approximatives.
À l’heure où la parole médiatique conserve un pouvoir de cadrage considérable sur les perceptions internationales, il est impératif de rappeler à M. Le Sommier et, au-delà, à la rédaction de CNEWS que l’exactitude factuelle n’est pas une option, mais la condition sine qua non de toute crédibilité.
Persister dans ces approximations, c’est transformer le reportage en tribune idéologique déguisée, et l’information en arme rhétorique aux conséquences potentiellement désastreuses.

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