Les proclamations d’adhésion au processus de paix, répétées à intervalles réguliers comme pour en dissimuler l’inanité, ne sont que les éléments d’un théâtre cynique où la parole officielle se vide de toute sincérité. Ce simulacre de bonne volonté s’effrite dès qu’il entre en contact avec la réalité du terrain, où l’armée congolaise et ses supplétifs foulent aux pieds, avec une constance désinvolte, les trêves qu’ils feignent de respecter.
Le cessez-le-feu n’est dès lors plus qu’un artefact diplomatique, une clause narrative sans consistance, brandie comme un gage de respectabilité aux yeux du monde, mais continuellement trahie dans les faits par une armée qui s’en remet moins à l’honneur qu’à l’impunité institutionnalisée.
Les communiqués émanant des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) se succèdent, semblables à s’y méprendre, comme des perles fades sur un collier décoloré. Répétant inlassablement les mêmes formules creuses, ils proclament, à chaque tournant, un attachement de façade au processus de paix en cours, tout en brandissant la menace d’une riposte "vigoureuse" en cas d’attaque.
La rhétorique officielle, aussi convenue que désincarnée, relève davantage de l’exercice d’autojustification que d’un véritable engagement pour la désescalade. On y décèle moins une stratégie qu’un conditionnement, une récitation militaire déconnectée de la réalité du terrain.
Cette discipline de façade masque mal l’inconsistance d’un commandement militaire qui, à chaque fois que la paix devient un impératif diplomatique, se montre incapable de respecter les termes du cessez-le-feu, même lorsque celui-ci est imposé par les parrains occidentaux.
L’Histoire récente du conflit dans l’Est congolais est jalonnée de ces trêves rompues sans vergogne, transformant chaque accord en simulacre. Ce n’est plus la paix qui est poursuivie, mais le maintien d’une guerre d’usure, rentable pour certains, commode pour d’autres.
Doha trahi : l’encre à peine sèche, les canons tonnent
L’accord de Doha, censé inaugurer un tournant vers une résolution politique du conflit entre le gouvernement congolais et l’AFC/M23, n’avait pas encore séché que les FARDC et leurs supplétifs lançaient déjà de nouvelles offensives. Ce mépris flagrant pour les engagements internationaux ne relève pas d’un simple dérapage militaire, mais bien d’une stratégie assumée de duplicité.
La paix, brandie comme un étendard diplomatique à l’usage des chancelleries étrangères, est trahie dans le secret des collines du Kivu dès que la pression médiatique internationale retombe.
En refusant de désarmer la parole guerrière et en multipliant les provocations militaires sous couvert de légitime défense, le pouvoir congolais torpille sciemment les mécanismes de désescalade qu’il prétend respecter. Loin d’apaiser le conflit, cette posture de duplicité radicalise les fronts, envenime les griefs et expose les populations civiles à des cycles de violences sans fin. La signature des accords devient alors un simple épisode dans une dramaturgie cynique, où l’État joue simultanément le rôle du faiseur de paix et de son propre saboteur.
La guerre comme système : la militarisation du mensonge
La répétition mécanique des bulletins militaires, leur vacuité narrative, leur refus obstiné de reconnaître la réalité du terrain, traduisent une militarisation du discours politique devenue structurelle. Les FARDC, instrumentalisées par un pouvoir en quête de légitimité, ne sont plus seulement une force de défense, mais un vecteur de propagande.
A force d’invoquer l’ennemi, de dissimuler les défaites, et d’inventer des victoires, le discours sécuritaire congolais se coupe de toute véracité. Il devient mythologique, nourri de fantasmes patriotiques et de falsifications opérées à grande échelle.
Cette guerre interminable n’est pas seulement un échec politique : elle est devenue un régime de gouvernement. En entretenant le conflit, en refusant toute issue politique sérieuse, en piétinant les initiatives régionales, Kinshasa fabrique une guerre perpétuelle qui justifie la répression, les dépenses militaires opaques, et l’occupation d’un territoire par des groupes armés parfois plus disciplinés que les troupes régulières.
Le silence complice de certaines capitales occidentales ne fait que renforcer cette dérive. Pendant ce temps, les populations de l’Est paient chaque jour le prix du mensonge national.
Il est temps de dire avec force que la paix ne se décrète pas dans les communiqués ; elle se construit dans la vérité, le respect de la parole donnée, et l’abandon des postures martiales comme ligne de gouvernance. Tant que les FARDC continueront à falsifier leur engagement pour la paix, à répéter mécaniquement un discours sans substance, et à saboter les accords dès leur promulgation, la RDC restera prisonnière de sa propre rhétorique belliqueuse. Une paix simulée est toujours plus dangereuse qu’un conflit déclaré.

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