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Les Mémoires d’Angela Merkel

Redigé par Tite Gatabazi
Le 27 novembre 2024 à 09:12

Elle fut, dans l’imaginaire collectif, cette figure douce et inaltérable, un phare tranquille dans la tempête du monde, surnommée affectueusement La Mama par la presse qui l’admirait pour son geste inouï d’ouvrir les portes de l’Allemagne à plus d’un million de Syriens, et plus tard, l’Inoxydable, cet hommage muet à la solidité d’une longévité politique inébranlable, qui se fondait dans le paysage tel un rocher immobile face aux assauts du temps. Dans l’ombre des ors du pouvoir, elle conservait son appartement comme un havre de simplicité et d’intimité, loin des éclats et des fastes. Elle, qui, dans la solitude de son quotidien, n’hésitait pas à préparer ses repas elle-même, sans fard, sans ornement. Cette femme, parfois idéalisée, parfois détestée, adorée et fustigée à la fois, s’éteint de la scène publique en décembre 2021, après avoir régné pendant seize années sur l’Allemagne, quittant ses fonctions avec des sondages éclatants et une popularité sans égale, comme une étoile filante qui, une fois disparue, laisse dans son sillage un vide incommensurable.

Et c’est dans ce vide qu’elle revient aujourd’hui, brisant le silence qui l’entourait, levant enfin le voile sur une part d’elle-même dans Liberté (« Freiheit : Erinnerungen 1954-2021 »), ses mémoires tant attendues. Trois années se sont écoulées depuis son départ du pouvoir, trois années pendant lesquelles son nom est resté gravé dans l’Histoire, et la voilà qui se livre à nous, non pas avec des éclats, mais dans une lumière douce, comme un miroir où se reflète l’Allemagne et l’Europe qu’elle a forgées.

Dans ces pages, plus de sept cents, elle raconte les deux vies qui se sont entrelacées dans son âme : celle d’une enfant du mur de Berlin, grandissant dans l’austérité de la RDA, et celle d’une femme politique, vaisseau amiral d’une Allemagne réunifiée, naviguant avec une délicatesse stratégique à travers les tempêtes mondiales. Ses mémoires sont bien plus qu’un simple bilan : elles sont une déclaration d’intentions, une réflexion grave et pleine de sagesse sur ses choix, sur ses failles et ses certitudes.

Elle défend son œuvre avec calme, mais avec une ferveur tranquille, face à ceux qui, encore aujourd’hui, l’accusent d’avoir laissé l’Allemagne dangereusement dépendante du gaz russe ou d’avoir alimenté la montée de l’extrême droite par sa politique d’accueil des migrants. Et pourtant, dans Liberté, elle n’émet aucune plainte, aucun regret. Son regard reste clair, tourné vers l’horizon d’une époque où les décisions qu’elle a prises, à la fois audacieuses et controversées, ont forgé l’histoire du XXIe siècle. Elle s’élève au-delà des critiques et livre un témoignage d’une rare profondeur sur les valeurs qui l’ont guidée, sur les batailles qu’elle a menées, et sur le monde, parfois cruel, qu’elle a tenté de façonner avec ses mains.

Ce livre n’est pas seulement un regard sur l’Histoire, mais une invitation à la méditation, un appel à comprendre, au-delà des apparences, le poids des décisions politiques, le courage de maintenir le dialogue même quand tout semble se déchirer. Liberté, dans toute sa simplicité majestueuse, est un héritage, un testament intime et universel, une œuvre qui nous fait entrevoir les abysses de la politique et la lumière de l’humanité.

Angela Merkel était surnommée affectueusement La Mama par la presse qui l’admirait pour son geste inouï d’ouvrir les portes de l’Allemagne à plus d’un million de Syriens.

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