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Paul Kagame : "L’aide internationale doit renforcer l’autonomie, pas créer la dépendance"

Redigé par IGIHE
Le 12 mars 2025 à 11:13

Lors d’une récente interview avec le journaliste américain Mario Nawfall, le Président Paul Kagame a réaffirmé sa position sur l’aide internationale, insistant sur le fait qu’elle devrait aider les pays à renforcer leur autonomie au lieu de les maintenir dans la dépendance. Selon lui, un excès d’aide extérieure permet aux donateurs d’exercer une influence sur les décisions souveraines des nations bénéficiaires.

En 1994, après que l’Armée patriotique rwandaise (APR) ait mis fin au génocide contre les Tutsi, le Rwanda s’est retrouvé dans une situation économique catastrophique. Le trésor public avait été vidé par l’ancien régime, et près de 90 % du développement du pays dépendait alors de l’aide étrangère.

Conscient des dangers d’une telle dépendance, le gouvernement rwandais s’est fixé pour objectif de réduire progressivement son recours à l’aide extérieure, tout en veillant à ce que les fonds reçus soient utilisés en fonction des priorités nationales. Le Président Paul Kagame a révélé que certaines organisations internationales avaient cherché à prolonger l’existence des camps de réfugiés au Rwanda et dans l’est du Zaïre (aujourd’hui la République démocratique du Congo), dans le but de garantir la poursuite des financements destinés à leurs opérations.

Face à cette situation, Kigali a opté pour le rapatriement des réfugiés, la réinstallation des citoyens déplacés et la stabilisation du pays, estimant que ces actions étaient indispensables à la reconstruction et au développement.

Si l’aide internationale a joué un rôle clé dans la reconstruction du Rwanda, le Président Paul Kagame insiste sur l’importance de l’utiliser de manière efficace et en adéquation avec les véritables besoins du pays. Il met en garde contre les risques cachés de cette aide, qui peut devenir un fardeau lorsque les donateurs cherchent à imposer leurs propres priorités.

« Depuis le début, nous avons clarifié notre position : nous apprécions l’aide, nous en avons eu besoin et nous en avons encore besoin dans une certaine mesure. Cependant, notre objectif est qu’elle nous serve à renforcer nos capacités afin de ne plus en dépendre à l’avenir », a déclaré Paul Kagame.

Malgré les critique suscitées par cette approche, certains accusant le Rwanda d’arrogance ou d’autoritarisme, le Président Kagame défend fermement cette quête d’indépendance, affirmant qu’elle est indispensable pour préserver la souveraineté du pays et se prémunir contre toute ingérence extérieure.

« L’aide crée une dépendance, et en vérité, la dépendance est le moindre des maux. Le pire, c’est que celui qui vous octroie cette aide finit par contrôler votre vie », a-t-il averti, soulignant que l’aide est souvent utilisée comme un instrument de pression politique.

Le Président Kagame a déclaré se souvenir particulièrement d’une réunion de 1998 avec des ministres européens, qui tentaient de dicter au Rwanda la manière d’utiliser les fonds alloués. A l’époque vice-président, il avait insisté pour que les donateurs respectent les priorités définies par Kigali. Cette position a été soutenue par le Royaume-Uni et trois autres nations alliées, ce qui a permis d’établir un processus de coopération plus transparent et basé sur une responsabilité partagée.

Un autre exemple de la volonté du Rwanda d’affirmer son indépendance économique a été la décision de limiter l’importation de vêtements de seconde main, dans le but de promouvoir le développement de son industrie textile locale.

Lorsqu’il était à la tête de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC), le Président Kagame avait incité les pays membres à adopter une politique similaire, en augmentant les droits de douane sur ces importations. Cette initiative visait à réduire la dépendance régionale vis-à-vis des vêtements d’occasion, communement appelés "CAGUWA", et à encourager la production locale, renforçant ainsi l’autosuffisance économique de la région.

Cependant, les États-Unis se sont opposés à cette mesure et ont exercé des pressions sur les pays de l’EAC pour les inciter à abandonner ces restrictions. Sous cette pression, la plupart des États membres ont fini par céder, mais le Rwanda est resté inflexible dans sa position, ce qui lui a valu d’être exclu de l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), un programme offrant un accès préférentiel au marché américain.

Malgré ces défis, l’économie rwandaise continue d’enregistrer une croissance annuelle supérieure à 8 %. Le revenu par habitant a progressé, passant de 111 dollars en 1994 à 1 040 dollars en 2023, illustrant ainsi les avancées significatives du pays en matière de développement et d’autosuffisance économique.

Le Président Paul Kagame a souligné que l’aide internationale devrait renforcer l’autonomie des pays, plutôt que de les maintenir dans la dépendance

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