Vital Kamerhe entre double discours et manœuvre politicienne

Redigé par Tite Gatabazi
Le 4 août 2025 à 10:12

À peine quelques semaines après la signature solennelle d’un Accord de paix entre Kigali et Kinshasa, le Président de l’Assemblée nationale de la République Démocratique du Congo, Vital Kamerhe, a prononcé à Genève, le 30 juillet 2025, un discours qui a eu l’effet d’un coup de tonnerre dans un ciel que l’on croyait enfin dégagé.

A l’occasion de la 6e Conférence mondiale des Présidents de Parlement, le député congolais a multiplié les accusations à l’endroit du Rwanda, invoquant des griefs dont le caractère infondé et la teneur inflammatoire n’ont pas manqué de susciter une réaction ferme du Parlement rwandais.

Ce revirement abrupt contraste violemment avec les déclarations conjointes formulées à Paris, les 12 et 13 juillet derniers, où le Parlement congolais avait pourtant souscrit à une résolution saluant une dynamique de réconciliation et de coopération transfrontalière. Comment expliquer une telle volte-face ? Quelles sont les motivations sous-jacentes de cette rhétorique belliqueuse, en contradiction flagrante avec les engagements récents ? Est-ce là l’expression d’une incohérence individuelle ou le symptôme d’une stratégie plus vaste, où le théâtre international sert de caisse de résonance à des calculs politiciens internes ?

Diplomatie piétinée, paix fragilisée : les dérives d’un discours victimaire

L’intervention de M. Kamerhe à Genève ne saurait être interprétée comme une simple maladresse protocolaire. En convoquant un narratif obsolète, nourri d’accusations unilatérales et de contrevérités manifestes, le président du Parlement congolais a non seulement jeté le discrédit sur la sincérité des engagements pris à Paris, mais il a aussi mis à mal un processus fragile, encore en gestation.

En diplomatie parlementaire, les mots ne sont jamais neutres. Ils engagent. Et quand ils falsifient les faits, ils sapent les fondations mêmes du dialogue.

À travers sa déclaration, M. Kamerhe réactive un imaginaire victimaire qui, sous couvert de défense nationale, élude les responsabilités propres et obstrue les perspectives d’un règlement pacifique durable. Ce type de rhétorique appartient à un autre temps : celui des passions identitaires attisées à des fins de pouvoir, des récits à sens unique et des amalgames sans issue. Le Rwanda, quant à lui, a répondu avec clarté, rappelant l’importance de la cohérence politique dans les engagements internationaux et dénonçant un discours dissonant qui menace de décrédibiliser les efforts menés jusqu’ici.

Cohérence, intégrité et responsabilité : les conditions d’une paix durable

Il ne saurait y avoir de paix authentique sans une intégrité assumée de la parole publique. Lorsque les représentants parlementaires jouent double jeu appelant un jour à la réconciliation pour, le lendemain, rallumer les braises de la discorde, ils fragilisent non seulement les textes signés, mais aussi la confiance indispensable à leur mise en œuvre. Or, dans le contexte de l’Accord du 27 juin 2025, le rôle des Parlements est déterminant : non seulement pour ratifier les engagements, mais pour en garantir l’esprit et la lettre.

Le Parlement rwandais, en réaffirmant son attachement aux engagements pris, appelle à une diplomatie de vérité, fondée sur le respect mutuel, la clarté des intentions et la continuité des discours. Il est urgent que les acteurs institutionnels à Kinshasa, mesurent la gravité de leurs propos et l’impact qu’ils peuvent avoir sur la stabilité régionale.

Les semaines à venir seront décisives. L’opinion publique, les partenaires internationaux et les institutions régionales devront rester mobilisés pour exiger des actes conformes aux engagements pris. À Paris, la main a été tendue. À Genève, un doute majeur a été semé. L’avenir dira si cette dissonance est accidentelle ou révélatrice d’un reniement.

Mais une chose est certaine : la paix ne saurait être un simple slogan diplomatique. Elle exige cohérence, courage et constance. Toute autre posture n’est que manœuvre. Et la région n’a plus les moyens d’en payer le prix.

Peu après l’accord de paix entre Kigali et Kinshasa, Vital Kamerhe a provoqué la stupeur à Genève par un discours inattendu, le 30 juillet 2025

Publicité

AJOUTER UN COMMENTAIRE

REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Publicité