L’effritement du récit officiel et la mise à nu du pouvoir

Redigé par Tite Gatabazi
Le 11 décembre 2025 à 11:38

Lorsque le gouvernement congolais foule aux pieds le cessez-le-feu, bombarde les positions de l’AFC/M23, dépêche des avions de chasse et des drones pour frapper des villages banyamulenge ou tolère qu’une force burundaise impose un blocus paralysant les déplacements de cette communauté, nul ne voit l’AFC/M23 invoquer le régime des sanctions.

Le mouvement se borne, avec une constance presque ascétique, à prendre la communauté internationale à témoin et à annoncer qu’il neutralisera la menace à sa source, sans s’abandonner aux clameurs victimaires dont d’autres font leur fonds de commerce.

La chute d’Uvira procède de cette même longue chaîne de violations du cessez-le-feu imputables au gouvernement congolais dans le cadre du processus de Doha. Elle révèle, une fois encore, que l’argumentaire officiel fondé sur la dramatisation, l’invective et l’exonération de responsabilité ne peut plus abuser quiconque.

La rhétorique du bouc émissaire, destinée à masquer les propres échecs et tergiversations du pouvoir, est désormais éventée : le roi est nu, et nul artifice discursif n’en dissimule plus la vulnérabilité structurelle.

Un contentieux strictement interne travesti en menace extérieure

Par un paradoxe qui confine à l’absurde, Kinshasa, bientôt relayé par certains milieux occidentaux, feint la consternation dès que surviennent des affrontements entre les Forces armées congolaises et l’AFC/M23, un mouvement pourtant composé exclusivement de Congolais.

Cette dynamique interne, héritée des fractures historiques du Kivu, ne relève en rien de l’Accord de Washington, lequel se limite strictement à encadrer le dialogue de paix entre deux États souverains.

A ce titre, les obligations convenues sont dénuées d’ambiguïté :

il incombe à la RDC de neutraliser sans délai les FDLR, groupe armé génocidaire qu’elle entretient encore dans son dispositif sécuritaire en contrepartie, le Rwanda est tenu de lever progressivement ses mesures de défense.

Que certains persistent à amalgamer ces registres relève d’une stratégie politique autant qu’un aveu. En assimilant un contentieux interne à une agression extérieure imaginaire, le gouvernement congolais tente d’éluder sa propre responsabilité dans l’embrasement du Kivu.

Mais la mécanique est désormais visible à l’œil nu : derrière les proclamations martiales et les anathèmes commodes se profile un pouvoir désemparé, incapable de masquer plus longtemps le discrédit de ses choix sécuritaires et l’incurie de ses engagements diplomatiques.

Même quand Kinshasa viole le cessez-le-feu, bombarde l’AFC/M23 ou laisse un blocus viser les Banyamulenge, l’AFC/M23 n’invoque jamais le régime des sanctions

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