Ce 23 janvier, portés par leur détermination, ces insurgés ont dirigé leur assaut vers Sake, ultime rempart avant les portes de Goma, capitale stratégique du Nord-Kivu.

Là, sur cette terre tourmentée, l’aube s’est levée au son des canons et des cris, tandis que l’horizon se couvrait de fumées noires, témoins d’un affrontement d’une intensité rarement égalée.

Dès les premières lueurs du jour, les échos des détonations résonnaient, troublant le silence des collines environnantes. Les hauts responsables de l’AFC/M23 assuraient en fin de matinée que leurs forces avaient déjà pris position dans Sake, la confusion dominait encore à la tombée de la nuit.

L’armée congolaise, habituellement prompte à faire retentir sa voix dans le tumulte des crises, demeure étrangement muette, tout comme Patrick Muyaya, ce porte-parole si souvent ardent à occuper la scène médiatique.

Ce silence, lourd et énigmatique, s’impose tel un voile d’incertitude sur la situation de terrain, trahissant peut-être l’étendue du désarroi qui étreint ces bastions de l’État face à l’urgence. Non plus cri de guerre ni proclamation ferme, mais un mutisme oppressant, qui s’apparente moins à une stratégie qu’à l’écho d’une inquiétude profonde, tapie dans les arcanes du pouvoir et des forces en lutte.

Cependant, un fait marquant transcende ce brouillard d’incertitudes : le président Félix Tshisekedi a écourté son séjour à Davos pour regagner Kinshasa, tel un chef appelé à défendre son royaume dans ses heures les plus sombres.

Félix Tshisekedi dans la tourmente

Le 24 janvier, le Conseil supérieur de la défense, convoqué dans l’urgence, se réuni sous la présidence de Félix Tshisekedi, précédant la tenue du Conseil des ministres hebdomadaire. La veille, dans la nuit, au sein des murs solennels de la Cité de l’Union africaine, le chef de l’État a tenu conseil avec la Première ministre Judith Suminwa Tuluka et les ministres de l’Intérieur et de la Défense, délibérant à huis clos sur les mesures nécessaires pour contrer l’avancée de la rébellion.

Félix Tshisekedi, qui s’était rendu à Davos le 20 janvier pour participer au Forum économique mondial, a quitté précipitamment la Suisse à la mi-journée du 23 janvier.

Vital Kamerhe, président de l’Assemblée nationale, en mission au Vietnam dans le cadre des travaux de l’Assemblée parlementaire de la francophonie, a également mis fin à son séjour pour répondre à l’appel de la patrie en péril.

Goma : carrefour stratégique a la croisée des destins

À Sake, là où les combats font rage, les populations civiles, déjà meurtries, prennent à nouveau le chemin de l’exil. Sur la route menant à Goma, des camps de déplacés surgissent, témoins silencieux des drames humains qui se multiplient au gré des batailles. Ces âmes en détresse convergent désormais vers le centre-ville de Goma et des quartiers comme Majengo, dans une quête désespérée de refuge face au chaos.

Goma, carrefour stratégique et symbole de la résistance congolaise, bruisse d’une activité fébrile. Les blessés affluent dans les hôpitaux, tandis que les mouvements de troupes s’accélèrent. Les chars de combat, jadis stationnés en ville, ont été redéployés vers des positions avancées, où les forces armées congolaises (FARDC) tentent d’endiguer la progression irréversible de l’AFC/M23.

Dans l’éloquence qui caractérisait ses prises de parole, Mobutu Sese Seko, dans un discours demeuré célèbre, exprimait une vérité saisissante sur l’implacabilité des forces historiques : « Un fruit ne tombe que quand il est mûr, mais face à l’ouragan de l’Histoire, mûr ou pas mûr, il tombe quand même. »

Par cette métaphore saisissante, il illustrait l’inexorable puissance des bouleversements historiques, ces courants irrésistibles qui, par leur violence ou leur urgence, arrachent parfois prématurément ce qui semblait destiné à mûrir dans la quiétude du temps.

Ce constat, à la fois lucide et empreint de fatalité, résonne comme un avertissement sur la fragilité des certitudes face aux tempêtes du destin collectif.

Dans l’ombre oppressante des montagnes de Masisi et Rutshuru de la République démocratique du Congo, une tempête d’acier et de feu se déchaîne, marquant une nouvelle avancée des rebelles l’AFC/M23.