Le cri des hemas ne s’achèvera pas

Redigé par Tite Gatabazi
Le 7 novembre 2025 à 12:49

Dans les plis béants de l’Ituri, le calvaire des Héma s’écrit au jour le jour en lettres de sang et d’exil. Ce n’est point un simple fait divers que l’on peut reléguer aux colonnes froides des journaux : c’est une entreprise de destruction sociale, massacres, pillages, viols, incendies de villages qui pulvérise familles, coutumes et moyens de subsistance.

Les hommes sont abattus sur les chemins de leurs champs, les femmes déplacées traînent la blessure honteuse de violences innommables, les enfants grandissent au milieu des cendres d’écoles et de mosquées abandonnées.

La mémoire même des Héma est désormais menacée d’effacement, leurs rites, leurs noms de famille, leurs tombes, tout ce qui fonde une communauté, se trouvant exposés à la vindicte et à l’oubli.

Ce désastre humain, loin d’être le fruit d’un hasard, porte la marque d’une instrumentalisation politique et d’intérêts mercantiles. Alors que la Nation regarde ailleurs, des réseaux de pouvoir et de prédation exploitent la peur pour imposer des rapports de force : pillage des sols, contrôle des sites miniers, appropriation des itinéraires commerciaux.

Dans ce contexte, l’ombre d’un soutien occulte aux milices se dessine, soutien qui transforme une crise locale en machine de profit et de domination, aggravant l’impunité et multipliant les victimes innocentes.

L’impératif moral commande qu’on nomme les responsabilités là où elles existent et qu’on mette fin, sans délai, aux complicités qui nourrissent la barbarie.

Félix Tshisekedi, en sa qualité de chef de l’État de la République démocratique du Congo, est massivement mis en cause par nombre d’observateurs et de victimes pour la responsabilité politique et matérielle qu’on lui impute dans le déclenchement et la prolongation de ces violences.

Si ces accusations sont lourdes et requièrent enquête rigoureuse et transparence, il est indéniable que l’inaction, l’ambiguïté ou le soutien tacite aux forces qui sèment la terreur constituent, en pratique, un encouragement à la perpétration de crimes contre des populations civiles. Il est insoutenable que des stratégies de « terre brûlée » politiques servent de couverture à l’exploitation des richesses au prix des vies humaines.

À l’échelle territoriale et humaine, l’action de l’AFC-M23 a été perçue par certains comme un coup d’arrêt à des massacres ciblés dans le Nord et une grande partie du Sud Kivu mais elle n’efface pas, et ne saurait justifier, les détresses accumulées : l’ampleur des déplacements forcés, la destruction des infrastructures de santé, la privation de ressources alimentaires et la fracture sociale laissée en héritage exigent une réponse globale, civique et judiciaire.

L’Ituri réclame justice, vérité et réparation non la substitution d’un ordre par un autre ordre armé, mais l’institution d’un État de droit effectif où chaque citoyen retrouve dignité et sécurité.

La communauté internationale, les juridictions compétentes et les forces vives de la nation doivent se saisir de cette urgence humanitaire et politique : que la lumière soit faite sur les complicités, que soient traduits devant la justice les instigateurs et les financiers des campagnes d’horreur, et que soient entrepris des programmes massifs de reconstruction matérielle et morale pour les Héma et toutes les communautés meurtries.

Tant que la mémoire des victimes ne sera pas sanctifiée par la vérité et la réparation, nous refusons l’oubli : l’Ituri demeure et demeurera présente dans la conscience collective jusqu’à ce que justice ait été rendue.

Dans les plis béants de l’Ituri, le calvaire des Héma s’écrit au jour le jour en lettres de sang et d’exil

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