A en croire les déclarations précises du ministre rwandais des Affaires étrangères, Amb Olivier Nduhungirehe, les délégations de la République démocratique du Congo et du Rwanda avaient, sous la médiation américaine, finalisé un accord historique sur le cadre régional d’intégration économique.
Un texte minutieusement négocié, équilibré, et porteur d’une perspective nouvelle pour la coopération régionale. Tout semblait prêt pour la signature. Tout, sauf la constance politique du président Tshisekedi.
Car c’est au moment même où les deux parties s’apprêtaient à parapher le document que Kinshasa, sur ordre direct du chef de l’État, s’est rétracté. Une volte-face brutale, un reniement de dernière minute, qui a laissé les diplomates abasourdis et mis à nu une faiblesse chronique : celle d’un pouvoir incapable d’assumer ses engagements internationaux dès lors qu’ils risquent de froisser une opinion publique manipulée par le discours nationaliste de circonstance.
La justification avancée par certains médias proches du pouvoir la prétendue exigence d’un retrait préalable de 90 % des troupes rwandaises, n’est, selon Kigali, qu’un prétexte médiatique, une fiction commode inventée pour masquer une panique politique.
En réalité, cette condition n’a jamais figuré dans les discussions officielles : les négociations portaient exclusivement sur le REIF (Regional Economic Integration Framework), une architecture économique conçue pour relancer les échanges régionaux et dynamiser la coopération économique, tandis que les dossiers de sécurité restent traités par le Joint Security Coordination Mechanism (JSCM), dont la réunion de septembre dernier à Washington n’a jamais évoqué pareille exigence.
Cette confusion soigneusement entretenue par Kinshasa illustre une tendance désormais structurelle : la diplomatie congolais se gouverne à l’instinct, non à la raison ; elle obéit aux réflexes émotionnels d’un président obsédé par son image intérieure, au détriment des intérêts supérieurs de la nation. Déjà, le 14 septembre 2024 à Luanda, lors d’un sommet crucial sur la neutralisation des FDLR, Tshisekedi s’était distingué par un revirement tout aussi abrupt : alors que les ministres s’apprêtaient à signer un plan d’action concerté, le chef de l’État congolais, depuis Kinshasa, avait téléphoné en pleine séance pour ordonner à son ministre de ne rien parapher. Une diplomatie du caprice, du geste théâtral et du renoncement.
Ces épisodes répétés traduisent un désordre institutionnel plus profond : l’État congolais semble incapable de parler d’une seule voix et son président, prisonnier d’un populisme de façade, sacrifie la cohérence régionale à la rhétorique de victimisation nationale. La conséquence en est claire : l’isolement progressif du Congo dans un espace régional où les autres capitales : Kigali, Kampala, Bujumbura, Nairobi, avancent désormais dans la coordination pragmatique de leurs intérêts économiques.
L’Afrique des Grands Lacs ne peut se permettre de rester otage de la politique intérieure congolaise. La peur de l’opinion publique, nourrie d’une propagande anti-rwandaise héritée d’un autre âge, ne saurait justifier la paralysie diplomatique d’un État censé jouer un rôle moteur dans la région.
A force de reculer devant les exigences de la raison d’État, Tshisekedi ne défend plus la souveraineté nationale : il la dilue dans l’improvisation, la démagogie et la contradiction permanente.
Ce nouvel épisode de désaveu diplomatique n’est donc pas une simple anecdote : il révèle la faillite d’une stratégie et l’incapacité d’un leadership à penser la paix autrement qu’en slogans. Pendant que les chancelleries étrangères s’épuisent à sauver les apparences, la RDC s’enlise dans sa propre inertie, incapable de transformer les promesses de coopération en réalité tangible.
La diplomatie de l’hésitation, érigée en méthode de gouvernement, mine la crédibilité de Kinshasa sur la scène internationale et fragilise toute perspective de normalisation durable avec ses voisins.
Et, dans ce jeu dangereux où l’indécision tient lieu de stratégie, c’est toujours le même peuple congolais qui paie le prix de la peur politique de son président.
L’histoire retiendra peut-être que, face à la chance historique de réconcilier la raison économique avec la stabilité régionale, Félix Tshisekedi aura préféré le confort de la dérobade. Car, dans la géopolitique des Grands Lacs, celui qui hésite perd et celui qui cède à la peur de ses propres passions condamne son pays à demeurer le théâtre des occasions manquées.

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