En quelques phrases, le haut gradé militaire, coutumier d’un verbe oscillant entre propagande et maladresse diplomatique, vient de confirmer, à demi-mot, l’existence d’une alliance que Kinshasa s’obstine à nier : celle qui unit, de manière inavouable mais persistante, l’armée régulière congolaise aux Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), résidus militaires du génocide contre les Tutsi de 1994.
Il est pour le moins déroutant d’entendre ce même porte-parole, qui naguère imputait publiquement aux FDLR la lourde responsabilité de la tragédie humaine de l’Est — « la plus grande facture des dix millions de morts » —, tenter aujourd’hui d’exonérer ces derniers sous le fallacieux prétexte qu’ils « voudraient se rendre mais qu’on les en empêche ».
Ces propos, d’une légèreté inacceptable à ce niveau de commandement, trahissent la ligne confuse, pour ne pas dire cynique, d’un pouvoir en mal de cohérence.
Car enfin, si ces milices génocidaires aspirent à une reddition sincère, vers qui voudraient-elles se tourner sinon vers la MONUSCO ? Et si tel est le cas, pourquoi le gouvernement congolais, qui prétend vouloir les neutraliser, n’en facilite-t-il pas le processus ?
L’alliance des contraires : une compromission devenue piège
Les FDLR ne sont pas un mythe ni une ombre du passé. Ils demeurent, dans les replis du Kivu et jusque dans les hautes sphères de l’armée congolaise, une réalité tangible et dérangeante. Nombre d’entre eux ont été intégrés dans les structures des FARDC, parfois jusqu’au niveau du haut commandement, avec la bénédiction tacite du pouvoir central.
D’autres se retrouvent encore actifs sur divers fronts : à Walikale, Fizi, Uvira, Kamituga, autant de bastions où l’illusion d’une armée républicaine cède le pas à la compromission d’un appareil d’État gangrené par la duplicité.
Ce mariage contre nature, entre une armée nationale censée incarner la souveraineté et un mouvement génocidaire banni par la communauté internationale, symbolise la faillite morale et stratégique du régime de Kinshasa.
Les FDLR, jadis instrumentalisés comme rempart contre les rébellions à connotation tutsie ou rwandaise, se sont mués en fardeau politique et diplomatique dont le gouvernement congolais ne sait plus comment se défaire. Ils ne sont plus des alliés, mais des otages embarrassants d’une politique de court terme, fondée sur le déni et la peur de perdre le pouvoir.
Le prix du reniement : un État sans colonne vertébrale
Les tergiversations du général Ekenge illustrent, à elles seules, la dérive d’un État dépourvu de colonne vertébrale. Le discours officiel varie au gré des nécessités du moment, des pressions diplomatiques ou des équilibres militaires précaires.
L’armée, au lieu d’être l’incarnation d’une éthique républicaine, s’est muée en instrument d’un pouvoir politique aux abois, manipulant les alliances les plus abjectes pour retarder l’inévitable effondrement d’une stratégie sans vision.
Le paradoxe congolais réside précisément dans cette incohérence assumée : on proclame la lutte contre les groupes armés tout en pactisant avec l’un des plus redoutables d’entre eux ; on se pose en victime d’une agression étrangère tout en hébergeant les bourreaux des peuples voisins ; on invoque la souveraineté tout en livrant son territoire à des forces illégitimes.
Cette alliance contre nature entre les FARDC et les FDLR, loin d’être un secret, est désormais une plaie ouverte dans le corps malade de la République. Elle révèle une vérité brutale : celle d’un État qui, faute d’intégrité morale et de cohérence stratégique, s’est condamné à naviguer entre le mensonge, la compromission et l’impuissance.














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