Intitulé « République Démocratique du Congo : Risque de corruption sur un projet routier majeur », le rapport accuse nommément l’actuel ministre de l’Aménagement du territoire, Guy Loando, d’avoir tiré un bénéfice indirect d’une vaste opération de surfacturation liée à la construction de l’autoroute Kinshasa-Matadi, un projet emblématique censé incarner l’émergence d’un État moderne, mais devenu, semble-t-il, le réceptacle de pratiques opaques et de conflits d’intérêts flagrants.
Selon cette enquête fouillée, des entreprises liées à la famille du ministre auraient empoché près de 70 millions de dollars dans le cadre de contrats de sous-traitance octroyés dans des conditions douteuses. Si l’intéressé, qui n’était alors que sénateur, conteste formellement les accusations, le faisceau d’éléments réunis par la PPLAAF, conjugué aux précédentes alertes de l’Inspection générale des finances (IGF), donne à cette affaire une résonance particulière.
L’IGF, dès 2021, avait en effet tiré la sonnette d’alarme, évoquant des montages contractuels suspects, des marchés surfacturés, et recommandant l’ouverture de poursuites pour détournement de fonds publics. Quatre années plus tard, ces recommandations restent lettre morte, ensevelies dans le silence complice des hautes sphères du pouvoir.
À cela s’ajoute le fait que le projet, d’un coût estimé à 500 millions d’euros, fut initialement attribué à Sopeco, une société détenue par un homme d’affaires chinois réputé proche du régime de l’ancien président Joseph Kabila. Ce détail, loin d’être anodin, souligne l’épaisseur des réseaux d’intérêts et des continuités clientélistes qui, sous couvert d’ouverture économique, permettent à une minorité prédatrice de détourner les ressources d’un État exsangue.
Au-delà du cas particulier de Guy Loando, c’est l’image d’une élite politique congolaise gangrenée par l’impunité, rongée par le cynisme et insensible à l’exigence de transparence, qui se dégage avec une gravité croissante. La récurrence de ces scandales, toujours dénoncés, jamais sanctionnés, alimente un climat de désenchantement civique profond, dans lequel la corruption n’apparaît plus comme une dérive, mais comme une norme, une maladie chronique du pouvoir dont aucun traitement institutionnel ne semble venir à bout.
Dans un pays où l’argent public est trop souvent perçu comme une rente de prédation, et les grands projets d’infrastructures comme des prétextes à l’enrichissement illicite, la question n’est plus de savoir qui est corrompu, mais qui ne l’est pas encore.
Cette banalisation du soupçon, cet effondrement des repères moraux et juridiques, confinent à une forme de nihilisme administratif dans lequel la fonction publique se dissout dans l’arbitraire et l’accaparement.

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