Urgent

Une justice instrumentalisée ou la dérive dangereuse d’un pouvoir aveuglé

Redigé par Tite Gatabazi
Le 25 juillet 2025 à 02:13

Dans un climat de plus en plus marqué par la fébrilité politique et la personnalisation du pouvoir, le président Félix Tshisekedi semble déterminé à engager une croisade judiciaire contre son prédécesseur, Joseph Kabila.

Cette offensive, menée au mépris des équilibres institutionnels et de la sagesse politique, s’apparente de plus en plus à un acharnement déguisé en quête de justice. La décision d’ouvrir, ce vendredi 25 juillet, un procès sans précédent devant la Haute Cour militaire à l’encontre de celui qui fut, pendant près de deux décennies, le maître du Congo, résonne comme une volonté délibérée de l’humilier publiquement et d’éroder définitivement son influence.

Mais à force de vouloir effacer les ombres du passé à coups d’invectives judiciaires, le régime actuel risque de précipiter le pays dans une spirale de tensions contre-productives, où la justice devient l’arme d’une vengeance politique mal dissimulée.

L’affaire Kabila : une vengeance d’État au goût amer de règlement de comptes

L’ancien président Joseph Kabila, désormais dépouillé de ses immunités sénatoriales depuis le 22 mai, est convoqué à répondre devant la Haute Cour militaire de chefs d’accusation aux résonances gravissimes : trahison, participation à un mouvement insurrectionnel, crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Ces accusations, directement liées à son prétendu appui à la rébellion de l’AFC/M23 a l’Est de la République, relèvent d’un séisme politique d’une ampleur inédite. Ce basculement du contentieux politique vers une théâtralisation judiciaire ne peut cependant masquer la précipitation et l’opacité de la manœuvre.

En foulant, peu après cette décision, les terres sensibles de Goma et Bukavu sous influence rebelle, Kabila a, en quelque sorte, défié le pouvoir en place, révélant la porosité du dispositif sécuritaire et la faiblesse politique d’un pouvoir pourtant prompt à s’ériger en inquisiteur implacable. L’image d’un pouvoir fort avec les faibles et faible devant le chaos s’en trouve cruellement accentuée.

Tshisekedi face à l’effet boomerang : quand le pouvoir s’attaque à son passé au péril de son avenir
À force de vouloir criminaliser le passé pour masquer les failles du présent, le régime de Félix Tshisekedi s’engage dans une entreprise périlleuse où la justice, arrachée à sa noble impartialité, devient l’auxiliaire d’un pouvoir en quête de revanche.

Une telle posture trahit moins un souci d’éthique publique qu’une volonté fébrile de se construire sur les ruines symboliques de ses prédécesseurs, dans l’espoir d’en tirer une légitimité seconde, artificiellement conquise. Mais en déployant l’appareil judiciaire non comme instrument de vérité, mais comme bras armé d’un dessein politique, le pouvoir actuel compromet l’autorité morale de l’État et sape les fondements mêmes de la confiance républicaine.

Or, l’histoire, dans sa constance impitoyable, enseigne que les procès d’exception, ces mises en scène où la justice se travestit en spectacle accusatoire, finissent immanquablement par délégitimer ceux qui les orchestrent. Le glaive brandi pour frapper l’adversaire d’hier finit souvent par se retourner contre son maître, exposant la vacuité des intentions et la fragilité d’une gouvernance fondée sur l’exclusion plutôt que sur l’unité nationale. Dans une République en quête de stabilité, l’usage cynique du droit comme instrument de disqualification politique est un jeu dangereux dont les conséquences pourraient être aussi durables que funestes.

L’obstination à vouloir faire comparaître Joseph Kabila, figure tutélaire d’un pan entier de l’histoire congolaise récente, traduit moins une quête sincère de vérité qu’une stratégie hasardeuse de neutralisation d’un rival. Or, en choisissant la voie de l’humiliation publique, Tshisekedi semble oublier qu’en politique, l’outrage appelle souvent la résilience, et le silence apparent du peuple peut dissimuler une colère prête à éclater.

L’effet boomerang, déjà perceptible dans l’opinion, pourrait s’avérer désastreux pour un régime en quête de légitimité. Car dans une République où les blessures de l’Est demeurent béantes, et où les institutions peinent à inspirer confiance, la justice ne saurait être transformée en glaive d’un pouvoir qui vacille.

Dans un climat de tension politique croissante, le président Tshisekedi paraît résolu à mener une offensive judiciaire contre son prédécesseur, Joseph Kabila

Publicité

AJOUTER UN COMMENTAIRE

REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Publicité