Le tribalisme, si détestable soit-il, demeure un fléau moral et politique, une faiblesse collective issue de l’ignorance et de la peur de l’autre. Il fracture les sociétés, sape la cohésion nationale, érige des murs là où devraient s’élever des ponts.
En République démocratique du Congo, il a cessé d’être une simple dérive sociale pour devenir une structure de pouvoir : un tribalisme institutionnalisé, enraciné dans les discours, les nominations, les mécanismes de l’État.
Cette perversion du politique transforme l’identité en instrument de domination. L’appartenance ethnique y devient une monnaie d’échange, une clé d’accès aux privilèges, un critère d’exclusion ou de diabolisation. Ainsi s’installe un système de gouvernance identitaire, où la fidélité au clan prévaut sur la compétence et où l’unité nationale s’effrite sous le poids des allégeances primaires.
Mais la tutsiphobie, elle, est d’une autre nature. Elle ne relève plus du préjugé, mais du projet ; non du favoritisme, mais de la haine préméditée. Elle n’est plus simple intolérance, mais idéologie. Elle se nourrit d’un imaginaire déshumanisant qui désigne les Tutsi non pour leurs actes, mais pour leur essence, pour leur simple existence.
Cette haine racialisée, au cœur du génocide contre les tutsi au Rwanda de 1994, renaît aujourd’hui sous d’autres formes, attisée par des discours politiques qui travestissent la vérité et manipulent les foules.
Là où le tribalisme engendre la division, la tutsiphobie engendre le meurtre.
Là où le tribalisme détruit la confiance, la tutsiphobie détruit l’humanité.
Elle constitue, selon les critères mêmes du droit international, le mal absolu, celui que les Nations unies ont érigé au sommet des crimes : la négation de l’être, l’anéantissement de l’humain pour ce qu’il est, et non pour ce qu’il fait.
Il importe donc, pour quiconque aspire à la justice et à la vérité, de ne pas confondre ces degrés du mal. Car si le tribalisme institutionnalisé en RDC est une corruption du vivre-ensemble, la tutsiphobie, elle, est une corruptrice de l’humanité.
L’un détruit la société, l’autre nie la personne. L’un s’enracine dans la peur, l’autre dans la volonté délibérée d’effacer une mémoire, une lignée, une identité.
Et c’est ici que se joue la frontière morale : certains sont haïs pour leurs actes : trahisons, abus ou injustices et cette haine, si elle existe, relève de la responsabilité politique et morale.
Mais d’autres, les Tutsi en particulier, sont haïs pour leur être même. Et cette haine de l’être, qui fut hier le ferment du génocide, demeure aujourd’hui l’ombre la plus sinistre de nos sociétés.
Elle n’est pas une opinion, ni même une passion. Elle est un crime, une défaite de la raison, une honte que seule la vérité, assumée sans équivoque, peut conjurer.














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