Car, en vérité, l’essentiel du conflit ne se joue pas seulement sur les collines de l’Est congolais, mais aussi dans l’arène symbolique où se façonnent les récits, où se distribuent les légitimités et où se forgent les perceptions internationales.
Les rapports successifs imputant à l’AFC/M23 de graves violations des droits humains, instruments récurrents d’une stratégie éprouvée, s’inscrivent dans cette guerre de l’image. Présentés comme des dénonciations impartiales, ils se révèlent bien souvent être des pièces à charge, rédigées dans une optique politique qui relègue au second plan l’exigence d’objectivité et la rigueur du constat circonstancié.
Leur fonction première n’est plus tant d’informer que de façonner l’émotion collective, d’émouvoir les opinions publiques occidentales et de préparer, sous couvert de moralité, les justifications des sanctions, isolements et pressions diplomatiques.
Il n’était guère difficile d’anticiper cette mécanique implacable : chaque publication appelant la suivante, chacune relayée par une presse internationale friande de récits manichéens, contribuant à tisser un réseau serré d’accusations dont l’effet cumulatif fragilise inexorablement l’assise morale du mouvement.
Cet engrenage discursif, en apparence technique et bureaucratique, devient en réalité une arme de guerre, frappant au cœur l’image et la crédibilité d’une organisation déjà en butte à une hostilité structurelle.
Quelques voix lucides, dans l’entourage stratégique, avaient certes pressenti la nécessité d’une riposte anticipée, qu’il s’agisse d’un travail de contre-narratif, d’un appareil diplomatique parallèle ou d’un dispositif de veille médiatique.
Mais ces avertissements demeurèrent sans écho, étouffés dans le vacarme des urgences militaires et le court-termisme de l’action quotidienne. L’absence de préparation à cette offensive non militaire a ouvert une brèche béante : l’AFC/M23 se trouve désormais placée en position défensive, contrainte de répondre aux accusations au lieu de modeler elle-même son récit.
Ainsi, le mouvement s’expose à une double vulnérabilité : celle des armes, dans les plaines et les collines du Kivu, et celle des mots, dans les cénacles diplomatiques et médiatiques mondiaux.
Or, si la première peut se solder par une victoire tactique, la seconde, plus insidieuse, risque d’aboutir à une délégitimation irréversible. C’est là toute la leçon ignorée : aucune conquête territoriale ne saurait tenir si elle ne s’accompagne d’une conquête des imaginaires et d’une défense de la légitimité symbolique.

AJOUTER UN COMMENTAIRE
REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Ne vous eloignez pas du sujet de discussion; Les insultes,difamations,publicité et ségregations de tous genres ne sont pas tolerées Si vous souhaitez suivre le cours des discussions en cours fournissez une addresse email valide.
Votre commentaire apparaitra apre`s moderation par l'équipe d' IGIHE.com En cas de non respect d'une ou plusieurs des regles d'utilisation si dessus, le commentaire sera supprimer. Merci!