Mélenchon et l’antisémitisme en France et au-delà

Redigé par Tite Gatabazi
Le 18 mars 2025 à 12:51

L’accusation d’antisémitisme pesant sur La France Insoumise repose sur un enchevêtrement d’éléments troublants qui, mis bout à bout, dessinent un tableau préoccupant. Entre ambiguïtés rhétoriques, indulgences coupables et silences éloquents, un faisceau d’indices semble dessiner les contours d’une connivence idéologique latente, voire d’une tolérance tacite à l’égard de discours marqués du sceau de l’antisémitisme.

Qu’il s’agisse de prises de position controversées sur le conflit israélo-palestinien, d’alliances pour le moins équivoques ou d’une propension à minimiser l’ampleur de certains actes antisémites, le parti s’expose à des soupçons persistants, nourris par une accumulation de faits troublants. Cette conjonction d’éléments, loin d’être le fruit du hasard, s’apparente à une forme d’ambiguïté calculée, où l’engagement antiraciste proclamé se heurte à une réalité bien plus contrastée, jetant ainsi une ombre sur la sincérité des postures affichées.

Jean-Luc Mélenchon, confronté à la question de l’antisémitisme, laisse éclater une colère qui, loin d’être spontanée, semble savamment orchestrée. Son injonction péremptoire au journaliste de France 3 : « Taisez-vous, ça suffit maintenant ! » ne relève pas d’un simple emportement, mais s’inscrit dans une stratégie de dissuasion : il ne cherche ni à argumenter ni à éclairer le débat, mais à museler toute contestation.

Son courroux feint ou exagéré se fait alors instrument de domination, confisquant la parole et réduisant au silence ceux qui oseraient l’interpeller sur ses ambiguïtés idéologiques.

Cette irascibilité, loin d’être un simple trait de caractère, devient le cœur même de son expression politique. Elle ne brouille pas son message, elle le constitue. Si l’on se réfère aux catégories classiques de la rhétorique, l’évolution du discours mélenchonien révèle une dérive préoccupante : Le logo, ou la raison mise en discours, s’amenuise jusqu’à disparaître. La cohérence argumentative cède le pas à l’injonction péremptoire. La vérité factuelle n’a plus de prise sur un discours mouvant, où les revirements idéologiques ne sont ni justifiés ni assumés.

Plus que jamais, Mélenchon ne débat pas, il assène ; il ne démontre pas, il impose. La dialectique cède la place à l’oukase.

Le pathos, ou l’exploitation des émotions, devient le moteur de son éloquence. Comme tout tribun populiste, il ne s’adresse pas à la raison des citoyens, mais aux pulsions de la masse. Il flatte l’indignation, exacerbe la colère, stimule la rancœur. Plus qu’un chef politique, il se pose en chef de meute, usant d’un langage de combat où la haine prend souvent le pas sur la réflexion. Cette instrumentalisation des affects n’a d’autre but que d’annihiler toute pensée critique chez ses partisans et de réduire au silence ses adversaires.

L’éthos, ou la posture de l’orateur, se construit sur une autorité écrasante, presque tyrannique. Mélenchon, qui se réclame d’un logos démocratique, adopte pourtant un ton despotique. Ses éclats de voix, ses outrances et ses menaces ne sont pas de simples écarts : ils traduisent une vision du pouvoir où le dissensus n’a pas sa place. Plus qu’un programme, son style est un mode de gouvernance anticipé, celui d’un autoritarisme rhétorique préfigurant un autoritarisme politique.

Dans ce cadre, son rapport à l’antisémitisme mérite une analyse approfondie. Car il ne s’agit pas d’un accident ou d’une erreur de langage, mais d’une constance dans son discours et dans ses prises de position. S’il se défend vigoureusement de toute dérive antisémite, il n’en demeure pas moins que son discours épouse les contours d’un antisémitisme idéologique qui, s’il ne s’avoue jamais comme tel, se manifeste par des insinuations, des omissions et des choix sémantiques lourds de signification.

Mélenchon recycle, parfois sans en avoir conscience, un imaginaire politique où l’antisémitisme se niche dans les interstices du langage révolutionnaire. Il nourrit une méfiance viscérale envers toute institution perçue comme « bourgeoise » ou « élitiste », et ses discours sur la finance mondialisée, sur les médias dominants ou sur certaines figures politiques puisent dans un registre qui n’est pas sans rappeler de vieilles rhétoriques antisémites.

Ses polémiques avec la communauté juive, son refus de reconnaître certaines réalités historiques notamment sur la singularité de l’antisémitisme ou encore sa tendance à minorer l’antisémitisme contemporain en le diluant dans une dénonciation globale du racisme témoignent d’une posture équivoque, voire complaisante.

Il y a, chez Mélenchon, une récurrence troublante dans la manière dont il aborde ces questions : un refus d’admettre l’antisémitisme lorsqu’il émane de ses alliés idéologiques, une propension à dénoncer une instrumentalisation de l’antisémitisme dès lors qu’il en est lui-même la cible, et une posture victimaire qui vise à retourner l’accusation contre ses adversaires.

Ce jeu rhétorique, habile mais dangereux, participe d’une normalisation insidieuse d’un antisémitisme qui ne dit pas son nom, mais qui s’exprime par ses silences, ses amalgames et ses fureurs calculées.

Ainsi, la violence verbale de Jean-Luc Mélenchon n’est pas un simple artifice de communication. Elle est l’expression même de sa pensée politique, une pensée où l’émotion supplante la raison, où l’invective remplace l’argumentation, où l’autoritarisme rhétorique dessine en creux un projet de pouvoir.

Et lorsqu’il s’agit de l’antisémitisme, son emportement n’a d’autre fonction que de dissuader toute interrogation légitime sur ses positions, préférant l’intimidation au débat, la crispation au dialogue. En cela, son style n’est pas qu’une question de forme : il est le fond même de son engagement.

Jean-Luc Mélenchon, confronté à la question de l’antisémitisme, laisse éclater une colère qui, loin d’être spontanée, semble savamment orchestrée

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