Son arrestation fait suite aux éléments évoqués devant la Haute Cour ce jeudi.
En rendant sa décision ce 19 juin 2025, la Cour a ordonné l’ouverture d’une enquête à son encontre à compter du 20 juin 2025.
Au tribunal, il a été indiqué qu’elle devait faire l’objet d’une enquête pour plusieurs chefs d’accusation, notamment la création ou l’adhésion à un groupe criminel, la planification d’attentats contre le gouvernement en place ou contre le Président de la République, l’incitation à des troubles ou des soulèvements populaires, l’opposition à l’autorité légale, ainsi que l’organisation ou la participation à des réunions illégales.
Ingabire fait l’objet de cette enquête après que neuf personnes, dont le journaliste Nsengimana Théoneste de la chaîne ’Umubavu TV’ et du site d’information ’Umubavu’, actuellement jugées, aient fréquemment évoqué son nom au cours du procès.
Tous les accusés ont été arrêtés en 2021. Ils sont poursuivis pour des infractions liées à une formation que le Parquet affirme avoir été suivie par d’anciens membres du parti Dalfa-Umurinzi, dans le but de concevoir ensemble des stratégies pour renverser le gouvernement sans recourir aux armes.
Le Parquet indique que les participants à cette réunion avaient convergé vers un projet de renversement du pouvoir, et qu’ils recevaient une formation sur différentes méthodes pouvant être utilisées dans cette entreprise.
Il s’agirait d’une formation dispensée par des étrangers, en s’appuyant sur un livre intitulé ’Blueprint For Revolution’, écrit par un ressortissant serbe, Srdja Popovic.
Ce livre présente des stratégies dont peuvent se servir ceux qui souhaitent s’opposer à un régime sans nécessairement prendre les armes.
À la table des discussions des membres du parti illégal, dirigé par Victoire Ingabire, figuraient des sujets comme l’exploitation des problèmes liés à la fiscalité foncière, les difficultés des conducteurs de motos-taxis, les cas de Kangondo, et d’autres griefs sur lesquels ils pouvaient capitaliser pour organiser des manifestations.
Dans la planification de ce projet, ils auraient été formés à des approches telles que l’"Opération Shirubwoba", "Serwakira" et ce qui était appelé "Sondage".
Concernant l’"Opération Shirubwoba", les accusés expliquent que les formateurs leur demandaient d’oser s’exprimer, de parler des problèmes qu’ils rencontraient et de proposer des idées sur la manière dont les choses devraient être faites.
Quant à "Serwakira" et au "Sondage", cela visait à recueillir des idées et à faire participer d’autres citoyens, en leur posant des questions sur les problèmes qu’ils observaient et la manière dont ils estimaient qu’ils devaient être résolus, entre autres.

Echec du complot
Le Parquet affirme que les accusés avaient élaboré un plan visant à renverser le gouvernement, ce qui explique pourquoi cette formation avait été organisée afin de renforcer les compétences de ceux qui allaient y participer.
Il précise que le projet de lancer des actes de protestation devait débuter le 14 octobre 2021, date à laquelle ils comptaient également célébrer la journée baptisée "Ingabire Day" en l’honneur de Victoire Ingabire.
L’un des participants à cette formation, Boniface Nzabandora, a été celui qui a témoigné et fourni des informations au Bureau d’Investigation du Rwanda (RIB).
Il a confirmé que les personnes ayant suivi cette formation avaient bel et bien l’intention de renverser le régime en place.
Il a déclaré y avoir pris part, mais qu’en découvrant les intentions des organisateurs, il avait décidé de se retirer du groupe, estimant qu’ils nourrissaient des desseins néfastes pour le pays.
La formation avait été organisée par ’DALFA-Umurinzi’
Le témoin a déclaré qu’il y était allé pensant qu’il s’agissait d’une formation en anglais, qu’il avait lui-même sollicitée auprès de Victoire Ingabire, mais qu’il avait été surpris de découvrir qu’elle visait en réalité à renverser le gouvernement.
Tous les accusés affirment que le coordinateur de ce projet était Sylvain Sibomana.
La formation s’était déroulée en ligne, mais tous les participants utilisaient des pseudonymes au lieu de leurs véritables noms, afin de dissimuler leur identité, de protéger leur vie privée et d’éviter d’éventuelles représailles.
Chaque jour de la formation, Sibomana envoyait à chaque participant 1 000 francs rwandais pour l’achat de données Internet, pendant une durée de quatre jours.
Le Parquet avait présenté au tribunal des éléments de preuve, dont des enregistrements audio captés durant cette formation, qui ont été écoutés au cours de l’audience.
Les personnes mises en cause faisaient état de divers projets, notamment inciter la population à se révolter et à s’opposer au gouvernement, en persuadant par exemple les vendeurs ambulants que leurs droits n’étaient pas respectés, ou encore en s’adressant aux citoyens déplacés de quartiers comme ’Kangondo’, à qui ils disaient que leur expropriation constituait une spoliation de leurs terres ancestrales.
Il était également question de se procurer des tenues spécifiques et de composer des chansons visant à s’insurger contre le pouvoir en place, et de « faire pression sur le parti au pouvoir, le FPR, par le biais de ce qu’ils ont appelé l’Opération ’Serwakira’ », entre autres initiatives.
Dans leurs déclarations, les accusés ont souvent affirmé que c’était Sibomana qui les avait invités à cette réunion, ce que le Parquet a confirmé, précisant que ces projets étaient menés en connivence avec une certaine Assumpta, avec la participation active de Victoire Ingabire.
Le Parquet a affirmé que c’est Ingabire qui avait mis en relation les deux personnes pour préparer ce complot.
Devant le tribunal, Ingabire s’est défendue en déclarant qu’elle les avait mis en contact lorsque Sibomanas’était plaint de douleurs dentaires, et que l’autre personne lui avait alors promis de lui venir en aide, une version que le Parquet a catégoriquement rejetée.
Pour sa part, le Parquet soutient qu’ils ont été mis en relation dans le cadre de ce projet, et qu’Ingabire remettait de l’argent à Sibomana, lequel servait à acheter les données Internet utilisées durant la formation.
Il affirme également que tout ce qui se faisait était connu d’Ingabire et qu’elle suivait de près le déroulement des activités.

Quel lien avec le journaliste Nsengimana ?
Le Parquet poursuit Nsengimana Théoneste pour des infractions comprenant la tentative de renverser du gouvernement, la diffusion de fausses informations et l’appartenance à un groupe criminel.
Il s’agit, selon le Parquet, de crimes commis via la chaîne en ligne ’Umubavu TV’, à travers des émissions contenant des propos dénigrant les autorités rwandaises.
Le Parquet reproche à Nsengimana d’avoir été largement utilisé par ce groupe, en diffusant de fausses informations sur sa chaîne et sur le site ’Umubavu.com’.
Il a été indiqué qu’au cours de certaines de ses émissions, il a été affirmé que le musicien Kizito Mihigo, déclaré officiellement mort par suicide, avait en réalité été assassiné. Dans d’autres cas, il aurait été avancé que certaines personnes, comme Idamage Iryamugwiza Yvonne, Karasira Aimable et d’autres, étaient détenues injustement.
Nsengimana a nié l’ensemble des charges retenues contre lui, déclarant qu’il n’avait aucun lien avec un quelconque projet de renversement du gouvernement, et que les contenus qu’il diffusait lui avaient été transmis par le groupe ’Inkora IVU’ (Inkoramutima Ingabire Victoire Umuhoza).
Cela a conduit le tribunal à conclure que, bien qu’Ingabire n’ait pas été initialement mise en cause dans ce dossier, il était nécessaire qu’elle fournisse des explications.
Il a été démontré que les explications qu’elle a fournies étaient insuffisantes et que des éléments de preuve indiquaient son implication.
Tous les accusés ont plaidé non coupables et ont demandé à être libérés, estimant qu’ils étaient détenus depuis longtemps, tandis que le Parquet a requis leur condamnation, sollicitant une peine de réclusion à perpétuité, à l’exception de Mutabazi Alphonse, pour lequel il a été requis une peine de 20 ans de prison, car il n’avait pas participé à la formation.



AJOUTER UN COMMENTAIRE
REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Ne vous eloignez pas du sujet de discussion; Les insultes,difamations,publicité et ségregations de tous genres ne sont pas tolerées Si vous souhaitez suivre le cours des discussions en cours fournissez une addresse email valide.
Votre commentaire apparaitra apre`s moderation par l'équipe d' IGIHE.com En cas de non respect d'une ou plusieurs des regles d'utilisation si dessus, le commentaire sera supprimer. Merci!