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D’anciens Casques bleus ghanéens dénoncent le « mythe » de Rusesabagina et l’histoire de l’Hôtel des Mille Collines

Redigé par IGIHE
Le 21 août 2025 à 11:47

Le Général Major Clayton Boanubah Yaache, ancien officier ghanéen ayant servi au sein de la Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda (MINUAR) en 1994, a tenu à rétablir ce qu’il appelle « la vérité » sur l’histoire de l’Hôtel des Mille Collines.

Lors d’une conférence de presse tenue ce 20 août 2025, le général a dénoncé la version largement répandue, selon laquelle une seule personne, Paul Rusesabagina, aurait sauvé les centaines de réfugiés tutsis rassemblés dans l’établissement. « J’ai souvent entendu dire qu’un seul homme avait sauvé les personnes réfugiées à l’Hôtel des Mille Collines, mais tout cela n’est qu’un mensonge éhonté », a-t-il déclaré.

Le général Yaache, arrivé au Rwanda en février 1994, deux mois avant le déclenchement du génocide, était initialement chargé de superviser les opérations dans la préfecture de Byumba, une zone démilitarisée. Au début du génocide, il fut redéployé à Kigali.

Au moment où le Conseil de sécurité de l’ONU décida de réduire drastiquement les effectifs de la MINUAR à 270 hommes, le général Roméo Dallaire et le général ghanéen Anyidoho s’y opposèrent vivement, conscients du danger imminent pour les Tutsi.

Les troupes ghanéennes refusèrent de quitter le pays. « Malgré leur faible nombre et le manque d’équipements, elles ont fait preuve d’un courage exceptionnel en restant aux côtés des Tutsis », a raconté Yaache.

En cent jours, ces soldats ghanéens parvinrent à sauver environ 30 000 personnes.

L’Hôtel des Mille Collines n’était pas sauvé par un homme

Le général Yaache a insisté sur le rôle déterminant joué par la MINUAR dans la protection des réfugiés. « La vérité est que dans cet hôtel, où nous résidions, il y avait aussi des soldats des Nations unies. La sécurité et la protection des personnes étaient assurées par la MINUAR. Ce n’étaient pas des actions propres à l’hôtel, mais des missions de la MINUAR », a-t-il affirmé.

« Toutes les opérations essentielles — qu’il s’agisse de planifier l’évacuation des personnes, de tenir des réunions pour organiser leur protection ou de prendre des décisions — étaient menées par les soldats de l’ONU, pas par un individu en particulier. Si une seule personne s’approprie aujourd’hui le mérite des actions accomplies par d’autres, c’est vraiment très regrettable », a-t-il ajouté.

Un film qui a imposé un récit mensonger

Le témoignage du général ghanéen vise directement Paul Rusesabagina, dont la célébrité a été consacrée par le film ’Hotel Rwanda’. Ce long-métrage, sorti en 2004, le dépeint comme le héros qui aurait sauvé les réfugiés de l’Hôtel des Mille Collines. « Mais tout cela n’est qu’un mensonge, fondé sur une tentative de s’attribuer des actes qu’il n’a jamais accomplis. Il n’y a aucune vérité là-dedans », a dénoncé Yaache.

Certains rescapés ont eux-mêmes contesté la véracité de l’histoire racontée par le film. Rusesabagina a d’ailleurs reconnu que Hotel Rwanda ne reflétait pas la vérité, des éléments ayant été ajoutés pour la rendre plus « attrayante ». Malgré cela, ce récit lui valut en 2005 la prestigieuse distinction de la ’Presidential Medal of Freedom’, remise par l’ancien président américain George W. Bush.

Le Major Peter Sosi, autre ex-soldat de la MINUAR, a raconté avoir participé à un événement en Irlande où le film était utilisé comme support pédagogique. « J’ai dit à l’enseignant que ce film n’était pas basé sur une histoire authentique. Même si certaines parties m’étaient moins connues, d’autres je les connaissais parfaitement, et ce qui y est montré ne correspond pas à la réalité. »

« Ce film, c’est du Hollywood. Ils y ont ajouté de nombreux éléments pour le rendre plus spectaculaire », a-t-il insisté.

Témoignages accablants contre Rusesabagina

Les témoignages d’anciens soldats de la MINUAR rejoignent ceux de rescapés de l’Hôtel des Mille Collines, qui décrivent un tout autre visage de Rusesabagina. Nommé directeur de l’hôtel le 16 avril 1994, neuf jours après le début du génocide, il se serait arrogé tous les pouvoirs, décidant de qui pouvait rester ou devait partir.

Les chambres auraient été réservées à ses proches et à ceux capables de payer, tandis que les autres étaient expulsés, en dépit des instructions du président de ’Sabena Hotels’, la société gestionnaire, qui avait demandé que tous les réfugiés soient accueillis sans frais.

Plus grave encore, Rusesabagina se serait opposé à l’évacuation de certains réfugiés vers l’étranger. À l’époque, les Tutsi réfugiés pouvaient quitter le pays si une personne ou une organisation à l’extérieur garantissait leur accueil. Mais « la plupart de ceux qui tentèrent cette voie échouèrent, car Rusesabagina, en position de relais, fit obstruction à leurs démarches », rapportent d’anciens témoins.

Pour le général Yaache, il est désormais impératif de mettre fin à ce récit qu’il juge mensonger : « L’essentiel est que nous devons éradiquer définitivement les mensonges propagés à travers ce film et cette propagande, qui ont été pris pour des vérités. La réalité est que la survie des réfugiés de l’Hôtel des Mille Collines tenait aux soldats de la MINUAR qui étaient restés sur place. »

L'ancien officier ghanéen ayant servi au sein de la MINUAR en 1994 a tenu à rétablir ce qu’il appelle « la vérité » sur l’histoire de l’Hôtel des Mille Collines.
Le Maj. Peter Sosi a indiqué que le film 'Hotel Rwanda' déformait la réalité
Certains des soldats sénégalais et ghanéens de l’ONU qui étaient déployés au Rwanda en 1994
Pour le général Yaache, il est désormais impératif de mettre fin à ce récit qu’il juge mensonger

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