Le Rais, désormais privé de son immunité parlementaire et frappé d’un isolement institutionnel manifeste, n’a pourtant pas déserté le théâtre congolais. Bien au contraire, il semble vouloir y rejouer une partition singulière, à la lisière des processus officiels et des revendications populaires.
Deux scènes diplomatiques ont récemment capté l’attention : à Washington, d’une part, où Kinshasa et Kigali ont conclu un accord bilatéral sous l’égide des États-Unis, et à Doha, d’autre part, où le gouvernement congolais et l’Alliance Fleuve Congo/M23 ont entériné une déclaration de principes, sous médiation qatarie. Or, dans cet entre-deux mouvant, Joseph Kabila semble tisser, en sourdine, les linéaments d’un contre-discours, sinon d’un contre-pouvoir.
Présent à Goma puis à Bukavu, l’ancien président a mené une série de consultations discrètes dans l’Est du pays, épicentre de la crise sécuritaire. Ces entretiens, dont le contenu a donné lieu à la rédaction d’un document stratégique encore non publié, semblent s’inscrire dans une logique de repositionnement politique.
Initialement prévue pour être rendue publique lors d’une conférence de presse, la synthèse de ces consultations attend désormais le cadre plus solennel et plus symbolique du dialogue national en gestation, dialogue impulsé par les Églises catholique et protestante.
L’ancien président et sénateur à vie, Joseph Kabila entend y prendre part, non pour réclamer un retour au pouvoir, affirment ses proches, mais pour faire valoir une lecture alternative de la gouvernance nationale et de la situation dans les provinces orientales.
Ce positionnement survient alors que les États-Unis multiplient les déclarations en faveur d’une « gouvernance inclusive », condition, selon Washington, au retour des déplacés et à la stabilisation durable de la région. Une rhétorique qui fait écho, dans une étrange convergence, aux préoccupations portées par Joseph Kabila et ses émissaires, au premier rang desquels Kikaya Bin Karubi. Ce dernier a récemment conduit une mission de lobbying outre-Atlantique, suggérant que les réseaux kabilistes, bien que fragilisés sur le plan interne, demeurent actifs sur le plan international.
Mais derrière ces prises de position mesurées se profile une réalité plus ambiguë. En marge des accords de Doha, certains observateurs perçoivent une proximité tacite, voire une convergence d’intérêts entre Joseph Kabila et les revendications portées par la rébellion du M23.
En définitive, Joseph Kabila, s’il ne dispose plus des leviers institutionnels d’antan, n’a pas renoncé à influencer le cours des événements. Sa trajectoire actuelle, faite d’ambivalence, de réseaux discrets et de résistances voilées, pourrait bien redessiner les équilibres fragiles de la scène congolaise. Sa marginalisation officielle contraste avec la résilience de ses ambitions. En quête d’une reconnaissance nouvelle, sinon d’une réhabilitation symbolique, il semble déterminé à demeurer une pièce maîtresse, voire une énigme stratégique, dans le grand jeu congolais.

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