De toutes parts s’élèvent les mêmes constats désabusés : « Nous assistons, impuissants, à l’effacement d’une Europe qui a préféré feindre l’action plutôt que de l’accomplir. » écrit Natacha Polony dans Marianne.
L’illustration la plus éloquente de ce malaise fut sans doute la récente rencontre à la Maison-Blanche, réunissant Donald Trump, le président ukrainien Volodymyr Zelensky et une délégation européenne conduite par Ursula von der Leyen. L’événement avait tout du simulacre : mise en scène soignée, solennité compassée, échanges codifiés, autant d’éléments qui rappelaient davantage le jeu de rôle diplomatique que l’exercice authentique du pouvoir.
La présence de la présidente de la Commission européenne, juridiquement dénuée de compétences en matière de politique étrangère, apparaissait comme le symptôme éclatant d’une Union réduite à mendier la contrepartie des largesses financières qu’elle avait elle-même consenties quelques semaines plus tôt.
Le décor, lui, n’avait rien à envier aux dramaturges : drapeaux déployés, dorures étincelantes, mines graves et gestes mesurés. Les chaînes d’information continua purent s’en donner à cœur joie, abusant sans retenue de l’épithète « historique », ce fétiche médiatique qui finit par perdre toute signification à force d’être galvaudé. Mais derrière cette solennité de façade se cachait une vérité plus amère : rien de décisif n’était attendu de ce sommet.
L’instant véritablement « historique » s’il doit advenir, ne pourra se jouer que dans une rencontre hypothétique entre Vladimir Poutine et son homologue ukrainien. Or, la seule perspective d’un tel tête-à-tête souligne cruellement l’impuissance européenne : jusqu’ici, la marginalisation diplomatique de Zelensky allait de pair avec l’agression russe, devenant même l’un des arguments rhétoriques mobilisés pour la légitimer.
En définitive, les Européens ont joué leur partition, non pas tant sur la scène internationale que devant les caméras. Ils ont multiplié les gestes de déférence, mêlant flagornerie et déclarations de fermeté un mélange convenu qui ne trompe plus personne.
L’essentiel, toutefois, était ailleurs : leur véritable acte politique avait déjà été consommé quinze jours plus tôt, en Écosse, lorsque les contours de la position européenne furent fixés, scellant ainsi le caractère presque rituel de cette nouvelle rencontre.
Ainsi, l’Europe continue de donner le spectacle d’une puissance qui s’éteint dans le vacarme des discours sans lendemain. A force de s’abriter derrière le masque d’une gravité théâtrale, elle se condamne à n’être plus que spectatrice de sa propre marginalisation.
Le moment est peut-être venu, pour ses dirigeants, de rompre avec cette dramaturgie vaine et de choisir enfin l’audace de l’histoire plutôt que la sécurité du simulacre.

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