Urgent

L’érosion progressive du lien entre Macron et Netanyahu

Redigé par Tite Gatabazi
Le 22 août 2025 à 11:35

Ce qui n’était naguère qu’un subtil jeu d’équilibres diplomatiques s’est mué, au fil des mois, en une opposition frontale. La relation entre Emmanuel Macron et Benjamin Netanyahu, longtemps faite de courtoisie contrainte et de prudente coopération, connaît aujourd’hui une phase de délitement manifeste, chaque nouvel épisode venant accentuer la fracture. Le dernier contentieux s’est cristallisé autour d’un sujet particulièrement sensible : l’antisémitisme.

Le Premier ministre israélien, dans une missive officielle, n’a pas hésité à accuser le président français de « nourrir les flammes de l’antisémitisme » en appelant la communauté internationale à reconnaître l’État palestinien. Netanyahu s’est dit « préoccupé par l’essor alarmant de ce fléau en France et par l’insuffisance des mesures prises pour l’endiguer », affirmant que cette menace s’était encore aggravée depuis la décision française relative à la reconnaissance palestinienne.

L’Élysée, par la voix de ses services, a aussitôt rejeté ces imputations, les qualifiant « d’erronées, d’abjectes et indignes » et a rappelé que « la période requiert gravité et sens des responsabilités, non amalgames et manipulations ».

De la solidarité postérieure au 7 octobre à la dénonciation croissante

L’antagonisme actuel ne saurait faire oublier qu’au lendemain des attaques sanglantes du 7 octobre, qui coûtèrent la vie à plus de 1 200 Israéliens, principalement des civils, le chef de l’État français s’était empressé de manifester sa solidarité totale avec Israël et de réaffirmer son « droit à se défendre ». Mais cette posture initiale a rapidement évolué.

Confronté à l’intransigeance du gouvernement israélien et à une offensive militaire sur Gaza qui, selon les chiffres de l’ONU fondés sur les données du ministère de la Santé du Hamas, aurait déjà provoqué la mort de plus de 62 000 personnes en grande majorité des civils, Emmanuel Macron s’est progressivement fait plus sévère. Dès le mois de mai, il qualifiait d’« inacceptable » et de « honte » l’action conduite dans l’enclave palestinienne, dénonçant un « drame humanitaire » sans précédent.

Ces critiques, loin de rester sans écho, ont déclenché l’ire de Benjamin Netanyahu, lequel a accusé son homologue français de s’aligner sur « une organisation terroriste islamiste » et de « relayer sa propagande ignoble ».

Cette oscillation du discours présidentiel avait pourtant pour but, selon les observateurs, de maintenir la traditionnelle ligne d’équilibre de la diplomatie française au Proche-Orient. Comme le souligne David Rigoulet-Roze, chercheur à l’Institut français d’analyse stratégique, Emmanuel Macron s’efforçait de demeurer fidèle à une position nuancée : certaines de ses déclarations furent jugées excessivement favorables à Israël, d’autres trop indulgentes envers les Palestiniens, signe de cette tension inhérente à la recherche d’un juste milieu.

La reconnaissance de l’État de Palestine, point de non-retour

Si la relation bilatérale s’était déjà sensiblement dégradée, elle a franchi un seuil critique à la fin du mois de juillet, lorsque Paris a officialisé son intention de reconnaître l’État palestinien. Emmanuel Macron annonça solennellement, sur les réseaux sociaux, que « fidèle à son engagement historique pour une paix juste et durable au Proche-Orient, la France reconnaîtra l’État de Palestine », précisant qu’il en ferait la proclamation officielle lors de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Cette décision, présentée par le président français comme un geste en faveur d’une solution de paix, fut immédiatement perçue par Netanyahu comme une trahison diplomatique. Le Premier ministre israélien s’empressa de condamner une initiative qui, selon lui, « encourage la terreur » et qui ne ferait que transformer un futur État palestinien en « tremplin pour anéantir Israël plutôt qu’en partenaire de coexistence pacifique ».

Ainsi, l’histoire récente des rapports entre les deux dirigeants illustre la métamorphose d’une relation de coopération prudente en un face-à-face conflictuel, où la rhétorique accusatrice a pris le pas sur la diplomatie, et où chaque mot prononcé semble ajouter une strate supplémentaire à une fracture désormais béante.

La relation entre Emmanuel Macron et Benjamin Netanyahu connaît aujourd’hui une phase de délitement manifeste

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