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Tensions à Bujumbura : rivalité entre le président Ndayishimiye et son chef d’état-major

Redigé par IGIHE
Le 16 août 2025 à 12:14

Une lutte de pouvoir grandissante oppose le président burundais Évariste Ndayishimiye à son chef d’état-major, le général Prime Niyongabo, menaçant de fracturer le commandement militaire du pays, sur fond d’accusations d’enrichissement lié à la guerre dans l’est de la République démocratique du Congo.

Selon plusieurs sources sécuritaires, le différend s’est accentué ces dernières semaines, au point que le président Ndayishimiye envisagerait sérieusement de démettre le général Niyongabo de ses fonctions — une décision jugée politiquement risquée par les observateurs, tant l’autorité présidentielle apparaît fragilisée.

Le dernier épisode de cette confrontation a eu lieu le 5 août, lorsque le chef d’état-major a dépêché des soldats à la prison de Mpimba, à Bujumbura, pour libérer de force deux colonels incarcérés. Ces officiers avaient été arrêtés sur ordre du président, accusés de contrebande de minerais en provenance du Sud-Kivu vers le Burundi, ainsi que d’avoir utilisé les véhicules logistiques de l’armée pour acheminer du carburant et des textiles.

Plutôt que d’être soumis à une enquête approfondie, ils ont aussitôt été exfiltrés sous la protection de Niyongabo vers l’est de la RDC, sans l’aval du chef de l’État.

Parallèlement, des sources militaires et locales à Uvira, dans le Sud-Kivu, rapportent que des convois de l’armée burundaise transportent régulièrement vivres, armes et matériel en territoire congolais, revenant de nuit chargés de minerais. Un haut responsable du renseignement a même confié que le président voit en Niyongabo l’un des principaux acteurs de ce trafic illicite.

Les tensions trouvent leur origine dans un accord lucratif conclu en août 2023 entre Évariste Ndayishimiye et le président congolais Félix Tshisekedi. Cet arrangement a permis le déploiement d’environ 20 000 soldats burundais aux côtés des forces congolaises contre la rébellion du M23. Selon plusieurs rapports, Tshisekedi verserait directement à Ndayishimiye la somme de 5 000 dollars par soldat et par mois. Les militaires, eux, ne toucheraient que leur solde habituelle — environ 70 dollars pour les simples soldats et 100 dollars pour les officiers.

Alors que le président aurait accaparé l’essentiel de ces revenus, des sources internes affirment que le général Niyongabo revendique désormais sa part du butin, faisant planer une dangereuse fracture au sommet du commandement militaire burundais.

Ce déploiement a par ailleurs un coût humain considérable. Des centaines de soldats burundais auraient péri au Nord-Kivu au cours de l’année écoulée. Le moral des troupes est au plus bas et la contestation monte : en janvier, 48 soldats du 20ᵉ bataillon ont refusé de repartir en opération, ce qui leur a valu une arrestation pour mutinerie.

La position politique de Ndayishimiye s’est également fragilisée, affaiblie par les difficultés économiques intérieures et par les critiques suscitées par un récent remaniement ministériel perçu comme dicté par la loyauté plutôt que par la compétence. Au sein du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, le président comme son chef d’état-major voient leur popularité s’éroder : Niyongabo est de plus en plus décrit comme un homme d’affaires en uniforme, tandis que Ndayishimiye est accusé de privilégier ses intérêts personnels au détriment de l’intérêt national.

Pour l’heure, leur confrontation demeure feutrée, confinée aux coulisses du pouvoir. Ceci-dit, des observateurs avertissent que l’impasse pourrait rapidement dégénérer, menaçant de déstabiliser un Burundi déjà fragile sur les plans politique et sécuritaire — et de compliquer encore son rôle dans une région des Grands Lacs particulièrement instable.

Une lutte de pouvoir grandissante oppose le président burundais Évariste Ndayishimiye à son chef d’état-major, le général Prime Niyongabo

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