C’est en Belgique, précisément à travers l’entremise de l’Institut Egmont, que se tiennent des sessions de formation destinées aux cadres du ministère congolais des Affaires étrangères. Officiellement, il s’agit de renforcer les capacités de négociation et d’aiguiser les outils diplomatiques d’un État appelé à peser sur les grandes décisions du monde. Officieusement, c’est une confirmation : la diplomatie congolaise, dans ce qu’elle a de plus stratégique, se conçoit et se module depuis Bruxelles, sous l’œil vigilant et paternaliste d’un ancien tuteur colonial jamais vraiment désengagé.
Ce constat, que d’aucuns murmuraient dans les antichambres feutrées des chancelleries africaines, se trouve aujourd’hui étayé par les faits. Il ne s’agit plus d’un soupçon mais d’une évidence : la diplomatie congolaise ne s’appuie guère sur une vision endogène, sur une pensée géopolitique enracinée dans les intérêts supérieurs de la nation. Elle se voit imposer, ou du moins influencer, par une matrice idéologique exogène, désuète, postcoloniale dans ses présupposés et technocratique dans sa méthode.
Loin de promouvoir l’audace, la verticalité et la souveraineté, cette tutelle déguisée enferme la RDC dans un logiciel de dépendance diplomatique, où l’on forme davantage à la soumission polie qu’à l’affirmation lucide. Ce que l’on présente comme une coopération bilatérale cache mal une entreprise de reconfiguration silencieuse, un pilotage à distance des orientations majeures de la politique étrangère congolaise.
C’est là l’une des sources majeures de la désorientation chronique de la diplomatie congolaise : elle avance sans boussole propre, en se calquant sur des grilles de lecture qui ne lui sont ni adaptées ni favorables. Elle se prive ainsi de la force que procure une doctrine nationale claire, cohérente et assumée. Car on ne pèse à l’international que dans la mesure où l’on est capable de produire une pensée souveraine, inscrite dans le temps long, portée par des convictions, et non téléguidée depuis les arrière-salles d’instituts étrangers, fussent-ils réputés.
A force d’emprunter les chemins pensés par d’autres, la RDC devient spectateur de sa propre action diplomatique, récitant des éléments de langage désincarnés et opérant selon des réflexes forgés ailleurs.
À la veille d’un mandat aussi stratégique que symbolique au Conseil de sécurité, le moment aurait dû être celui d’un sursaut, d’un ancrage, d’une réaffirmation. Il devient au contraire le théâtre d’une soumission volontaire à une diplomatie d’emprunt, sans socle, sans souffle, sans horizon. Et cette capitulation de la pensée diplomatique, aussi feutrée soit-elle, prépare inéluctablement de cuisants échecs, non seulement dans les enceintes onusiennes, mais sur l’ensemble de la scène internationale, où seules les voix enracinées, indépendantes et stratégiquement articulées parviennent à se faire entendre.
Ce n’est pas un siège qu’il faut conquérir : c’est une voix. Et celle de la RDC, aujourd’hui, semble parler avec un accent qui n’est plus le sien.

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