Dans le cadre solennel de la conférence des présidents des parlements, tenue ce 1er août 2025 à Genève, haut lieu de la diplomatie multilatérale et sanctuaire symbolique des droits de l’homme, le président de l’Assemblée nationale de la République démocratique du Congo, Vital Kamerhe, a pris la parole avec une véhémence toute particulière, dénonçant une fois de plus, avec la même emphase dramatique que par le passé, les exactions qu’il impute aux forces étrangères opérant sur le sol congolais, au premier rang desquelles figure, sans ambages, l’armée rwandaise.
Dans un appel solennel, il a enjoint la communauté parlementaire internationale à se faire l’écho du "peuple congolais meurtri", et à condamner avec la plus grande fermeté ce qu’il qualifie de « crimes odieux contre les civils innocents ».
Mais derrière l’enflure rhétorique savamment orchestrée et l’indignation ostensiblement exhibée, perce sans équivoque une stratégie de diversion usée jusqu’à la corde, dont la mécanique est désormais trop prévisible pour ne pas susciter une lassitude intellectuelle.
Ce discours, saturé de pathos et de formules incantatoires, ne vise en réalité qu’à détourner l’attention des carences systémiques d’un régime en proie à ses propres défaillances, et qui, faute de capacité à se réformer de l’intérieur, s’emploie à externaliser sa propre impuissance. Cette rhétorique d’exonération, bien rodée et patiemment recyclée, s’apparente moins à une analyse lucide de la situation qu’à une entreprise de manipulation émotionnelle, destinée à émouvoir les chancelleries tout en escamotant les responsabilités internes.
Car il faut une bonne dose de candeur ou une complicité tacite pour encore prêter crédit à ce discours victimiste, sans s’interroger sur ce qu’il cherche à occulter. En persistant à désigner des ennemis extérieurs comme seuls vecteurs du mal congolais, cette stratégie rhétorique participe d’une falsification du réel, à la fois commode et pernicieuse. Elle dispense les élites politiques de toute autocritique, détourne le débat des réformes indispensables, et nourrit un ressentiment sans débouché.
Elle constitue, en somme, une mise en scène politique, où l’émotion supplante l’analyse, et où la vérité historique se trouve reléguée au second plan, au profit d’une narration simpliste qui, à défaut de convaincre, cherche à séduire les esprits les moins avertis.
Kamerhe, fidèle à une posture populiste qu’il maîtrise avec aisance, s’adresse à une assemblée de pairs qu’il suppose perméable aux sirènes de la propagande. Or, il se heurte, ce faisant, à une évidence que nul ne saurait feindre d’ignorer : les parlementaires réunis à Genève, loin d’être les spectateurs dociles d’un théâtre diplomatique convenu, sont pour la plupart des esprits aguerris, disposant d’informations circonstanciées et vérifiables sur les causes profondes des conflits endémiques qui ensanglantent l’Est du Congo. Et ces causes, ils les savent, ne sauraient être réduites à une lecture univoque ou victimaire.
C’est là que réside la véritable dissonance : en prétendant incarner la voix d’un peuple réduit à la plainte, en feignant d’ignorer les lourdes responsabilités du pouvoir congolais dans l’entretien du chaos sécuritaire, en s’obstinant à ne pas désigner les FDLR comme fauteur de troubles, Vital Kamerhe s’inscrit à rebours du réel.
Il reconduit sans nuance un discours de défausse qui a depuis longtemps épuisé sa force persuasive, tant il est contredit par l’observation rigoureuse des faits, par les rapports d’experts indépendants, par l’histoire elle-même.
En somme, cette tribune internationale, que l’on eût pu espérer propice à un sursaut de lucidité ou d’autocritique, a été instrumentalisée pour reconduire une rhétorique éculée, figée dans la posture et incapable de s’ouvrir à la complexité des responsabilités partagées.

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