Doha, Washington, et Félix Tshisekedi : le mépris du processus et la mise en scène d’un pouvoir sans boussole

Redigé par Veronique Nyiramongi
Le 15 septembre 2025 à 10:08

Félix Tshisekedi ne sait décidément pas sur quel pied danser… et apparemment, ses chaussures ne lui vont pas. Les récentes remarques de Félix Tshisekedi au deuxième rassemblement de l’Union Sacrée de la Nation, coalition au sein du parlement de la République démocratique du Congo, capturent parfaitement l’essence d’une présidence marquée par l’improvisation et l’incohérence stratégique.

L’accord de Washington : un trompe-l’œil diplomatique ?

L’accord signé à Washington entre le Rwanda et la RDC paraissait pourtant limpide : privilégier une résolution politique plutôt qu’une issue militaire aux « différends » opposant Kigali et Kinshasa. Le 19 juin 2025, ce préaccord de paix fut paraphé avec les ingrédients logiques d’une diplomatie régionale : cessation des hostilités, respect de l’intégrité territoriale, désarmement des groupes armés tels que les FDLR, retour des réfugiés et intégration économique régionale.

Des mains furent serrées, et les sourires bien étirés, sous les flashs américains et les regards approbateurs des délégations respectives. Seuls les confettis et les bracelets d’amitié (DRC <3 RW) manquaient à l’occasion.

Le leadership voisin ont dû être content, non ? Celui qui avait lancé cette campagne médiatique d’auto-victimisation au “timing” plutôt stratégique, appelant le monde à l’aide pour résoudre un problème avant tout interne, celui du “pillage” de ses fameuses ressources, dont les disparitions coïncident suspicieusement avec l’enrichissement de la famille Tshisekedi, et leurs alliés.

Après tout, Kinshasa n’avait-elle pas elle-même offert de troquer l’héritage sacré de ses enfants, ces minerais stratégiques que « le monde entier convoite », contre l’intervention américaine ?

Tshisekedi avait alors imploré une protection qu’il se sait, en tant que chef “élu” mais impuissant, incapable d’assurer à son peuple.

Washington, calculatrice et balance à la main, a tendu une oreille attentive, et qui en aurait fait de moins ? En échange d’un engagement américain dans la pacification avec le Rwanda et la stabilisation de l’Est, la RDC a offert un accès privilégié à ses vastes réserves de coltan et consorts. Une transaction “minerais contre sécurité” qui rappelle étrangement les accords coloniaux du XIXe siècle, à la différence près que, cette fois, c’est le dirigeant congolais lui-même qui invite au dépouillement consenti, malgré les discours populistes et pseudo-nationalistes par lesquels il enflamme la jeunesse congolaise.

Fatshi : Vertèbres de paille et fissures dans le béton ?

Félix Antoine Tshisekedi aime se présenter en homme du peuple, véritable forgeron de sa propre destinée. Il a multiplié les petits emplois en Belgique, dans sa vie d’immigré sans diplôme. À première vue, cela pourrait inspirer un certain respect : la volonté de nourrir sa famille, quelles que soient les circonstances, n’est pas un geste anodin. Il y a, en effet, une dignité universelle à reconnaître qu’aucun métier n’est indigne ; qu’on soit fils de politicien distingué ou simple anonyme.

Mais ce qui fissure toute prétention à la respectabilité, ne sont pas les emplois en question. C’est la manière de les exercer. Car selon un ancien employeur, la ponctualité n’était pas son fort, et l’honnêteté encore moins : des retards constants, des mains baladeuses dans la caisse. Voilà donc le « combattant du peuple » - incapable de respecter les règles les plus élémentaires d’un travail salarié.

On nous sert un récit de résilience, mais ce que le Président Tshisekedi révèle surtout, c’est un vice fondateur : l’absence d’éthique. Et dans la vie publique comme dans une pizzeria, l’homme qui vole la caisse ne change pas, il change seulement d’échelle.

Cela rappelle une maxime anglo-saxonne : " you can’t teach an old dog new tricks " ; “on ne peut apprendre aux vieux chiens des nouveaux tours.”

Un homme forgé dans le mépris des règles ne devient pas soudainement garant d’une République. Car, n’en déplaise à la bétonneuse, l’édifice de cette république ne peut reposer sur des vertèbres de paille, sans s’effondrer.

Alors, alors ; Que Faire ?

Comme l’a demandé (il y a de cela quelques temps) le Président Paul Kagame avec sa lucidité habituelle, comment conclure un accord durable avec Félix Tshisekedi, quand cet homme semble viscéralement allergique aux processus institutionnels ? Respecter une procédure, après tout, l’aurait empêché d’accéder à la magistrature suprême.

La trajectoire politique de Félix Tshisekedi témoigne d’un mépris constant pour les institutions. Les Congolais gardent en mémoire l’élection chaotique de 2023 – un spectacle digne du « grand n’importe quoi » électoral trop souvent associé à l’Afrique. Près de la moitié des machines à voter étaient mystérieusement en panne, certaines zones prolongeant le scrutin cinq jours après la date officielle.

Des vidéos surréalistes montraient des particuliers votant depuis leurs salons ou leurs boudoirs, ordinateurs bricolés en main – une innovation que n’auraient pas reniée certaines républiques bananières. La Commission électorale nationale indépendante (CENI), dans un sursaut de vertue tardive, avait annulé les résultats de 82 candidats pour fraudes et intimidations. L’Église catholique dénonça alors « un gigantesque désordre électoral ».

Mais bon : l’élection rocambolesque de Félix Antoine Tshisekedi, un homme décidément incapable d’offrir une véritable émancipation politique à son pays (et donc de causer quelconque inconfort à ses anciens colons), suscita peu d’intérêt dans les journaux occidentaux. Nous connaissons bien le profil d’élus Africains que cet occident rejette généralement.

Mais, tozala concentrés.

Restons concentrés, car la dernière allocution du président Congolais met en évidence des fragilités personnelles et structurelles, qui soulèvent de sérieuses interrogations sur les accords signés à Doha et Washington.

Le discours de l’Union sacrée : entre grandiloquence et contradictions

À Kinshasa, dans une salle surchauffée par la ferveur militante, remplie de partisans scandant des slogans à chaque pause, Tshisekedi s’est porté « garant de la cohésion nationale ». Mais sa conception de la cohésion est d’une géométrie variable.

« Voilà pourquoi je dis dialogue, oui, mais dialogue avec les Congolais qui veulent reconstruire leur pays, et non les Congolais inféodés au diktat des pays voisins. » Cette phrase semble ferme et presque bienveillante, mais trahit une logique d’exclusion pernicieuse. Le dialogue inclusif devient un tri sélectif. C’est une dérive dangereuse : des leaders populistes en viennent à se confondre avec l’État lui-même. Ils imposent l’idée que le patriotisme se réduit à leur allégeance. Toute pensée qui diverge du discours de haine contre l’ennemi Rwandais et surtout le “sanguinaire Tutsi” (martelé par des cadres du parti politique du Président Tshisekedi) est aussitôt disqualifiée, jugée antipatriotique - traître à la nation.

La classe intellectuelle congolaise, critique face à l’impuissance stratégique de Tshisekedi ? Écartée. Les panafricanistes appelant à un dialogue entre frères séparés uniquement par la Conférence de Berlin ? Vilipendés.

Les Banyamulenge - autochtones - et les congolais “typés tutsi”, enracinés depuis des siècles sur ces terres ? Dépossédés, brûlés vifs, cannibalisés….aux yeux de tous.

Ce n’est plus du dialogue politique, mais une mise en scène nauséabonde où l’orateur s’assure de n’entendre que sa propre voix, répercutée par ses partisans.

La contradiction devient flagrante quand il déclare :

« Ces bonnes volontés qui veulent nous aider à parler entre Congolais, merci, mais je crois qu’elles ont d’autres chats à fouetter. Qu’elles nous laissent régler nos problèmes entre Congolais. »

Patriotisme apparent, incohérence réelle. Quelques semaines plus tôt, ce même président acceptait que Doha et Washington dictent une partie de l’agenda de paix régional. Il remercie d’une main et rejette de l’autre, comme un convive qui critique le repas tout en se resservant. Résultat : brouillage volontaire, incohérence assumée, diplomatie paralysée.

Et voici la grandiloquence à son comble :

« Je promets de m’engager pour que ce pays vive en paix. En paix avec lui-même, en paix avec ses voisins, en paix avec la communauté internationale. »

Celui qui proclame l’unité divise son peuple. Celui qui prêche la paix refuse de nommer ses voisins, tout en les accusant à demi-mot.

Deux diagnostics impitoyables

De cette gouvernance, deux constats s’imposent :

1. Malheureusement, les Africains se laissent trop souvent séduire par l’invocation d’une “démocratie idyllique”, pourtant bâtie sans institutions solides, sans égard pour les processus, sans vraie redevabilité politique…une illusion de liberté et de méritocratie qui nourrit plutôt la tricherie, à chaque niveau. Tshisekedi n’a jamais cru aux règles démocratiques. Il profite du brouhaha d’un système sans structure ni garde-fous pour cacher ses vraies intentions derrière le voile du chaos.

Mais cherche-t-il réellement la paix ? Construire une paix durable exige un dialogue inclusif, pas la fabrication de clivages ni la diabolisation des voisins. Comme l’a relevé Johan Galtung, le “père” de la Discipline des Etudes sur la Paix et les Conflits, la paix ne se résume pas à l’absence de guerre : elle réclame justice sociale, équité et réconciliation - autant d’éléments que la rhétorique présidentielle congolaise ignore ou esquive. Tout porte à croire que Félix Tshisekedi, ce civil inexpérimenté en guerre, fantasme plutôt sur une issue militaire. S’imagine-t-il peut-être derrière un bouclier de mercenaires, terroristes FDLR et Wazalendo, vainquant enfin le “petit” Rwanda, cet ennemi imaginaire… ?

2. Tshisekedi incarne l’incohérence, et ce, volontairement. Ses discours s’empilent de contradictions : des appels à l’unité mêlés à un refus obstiné du dialogue, une dépendance aux médiateurs étrangers accompagnée d’un mépris ostentatoire à leur égard. Cette schizophrénie politique supplante le véritable pouvoir, celui de transformer les promesses en réalités pour le peuple. Pendant ce temps, l’Afrique, pourtant riche - comme le rappellent sans cesse les leaders complices de notre propre misère - ne peut se permettre une telle incohérence. Le temps s’écoule, les conflits se multiplient, les ressources s’épuisent, les inégalités sociales, implacables, se creusent, et le sang coule, inexorablement.

Quand le théâtre politique fabrique la souffrance collective

Le Congo, au lieu de s’ouvrir aux bénéfices d’un accord de paix, s’enferme dans une logique d’auto sabotage qui rappelle tristement certains épisodes post-indépendance. Rappelons-nous d’ailleurs que les problèmes de violence en RDC et dans la région, comme soulignés par l’historien congolais Isidore Ndaywel è Nziem, date de maintes décennies, ou, bien avant que le « régime de Kigali » ne soit au pouvoir.

Selon moi, l’issue, quoique dramatique, reste simple. Au nom de la paix que le Congo mérite, le président Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi doit soit se retirer, soit s’engager réellement dans un processus de paix, avec la même ardeur qu’il met à danser maladroitement, aux chants d’un peuple désorienté et meurtri, les pieds couverts d’ampoules.

Le reste n’est qu’un vacarme de promesses creuses, lancé par un homme sans ethique, incapable de dépasser le petit homme qu’il fut en Belgique, chapardant dans la caisse pour s’acheter quelques “bièles” mal gagnées.

Bana Congo oye !

Les récentes remarques de Félix Tshisekedi au deuxième rassemblement de l’Union Sacrée de la Nation, coalition au sein du parlement de la République démocratique du Congo, capturent parfaitement l’essence d’une présidence marquée par l’improvisation et l’incohérence stratégique.

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