Tel est le cas de la rentrée judiciaire en République démocratique du Congo, qui n’a pas seulement été un rituel solennel, mais un dévoilement cru, presque brutal, des pratiques dissolvantes qui minent le socle même de l’État de droit. Ce qui aurait dû être une tribune de réaffirmation de la rigueur institutionnelle s’est mué en un acte d’accusation d’une rare gravité.
Dans une déclaration empreinte de gravité, Ndomba Kabeya Élie-Léon, premier président de la Cour de Cassation, a jeté une lumière crue sur un réseau tentaculaire mêlant avocats, magistrats, greffiers, huissiers et autres agents de l’ombre.
Ce conglomérat cynique, qualifié de « Folio », s’est donné pour entreprise la spoliation systématique d’immeubles appartenant tant à l’État qu’aux particuliers. Ce n’est plus là une simple dérive marginale : c’est l’édification méthodique d’un système criminel à visage institutionnel, un État parallèle niché au cœur même de la Justice censée le combattre.
Cette révélation n’est pas anodine. Elle s’inscrit dans un contexte où la corruption endémique a cessé d’être une rumeur pour devenir une structure, une colonne vertébrale invisible mais solide, qui gangrène les institutions et délite le pacte républicain. Le palais de justice, qui devrait être le sanctuaire de l’impartialité et du droit, se voit aujourd’hui transformé en bazar où la sentence se monnaye et où la vérité se troque contre des gains sordides.
Plus préoccupant encore, ce réseau, déjà solidement implanté au sein des corps judiciaires et parajudiciaires, s’emploie à élargir son influence jusqu’aux sphères législatives. Le projet est clair : recruter des élus du peuple, non pour servir la République, mais pour servir une cause infâme, celle de la prédation légalisée par le silence et la complicité. À terme, c’est tout l’édifice institutionnel qui risque de s’effondrer, faute d’armature morale.
Il serait illusoire de croire que ce scandale n’est qu’une péripétie. Il révèle au contraire une pathologie structurelle de l’État congolais : la banalisation de la forfaiture, l’effritement du sens de la probité, la confusion des rôles entre gardiens de la loi et artisans de la fraude.
Lorsque ceux qui sont investis de la mission sacrée de rendre justice s’acoquinent avec les spoliateurs, la République se trouve nue, livrée aux rapaces.
Cette situation impose un sursaut. Elle exige une catharsis institutionnelle d’une ampleur inédite : l’assainissement radical de la magistrature, la restauration de l’autorité morale du barreau, la mise hors d’état de nuire de ces « trafiquants de justice » qui se sont infiltrés dans les temples du droit.
A défaut, la justice congolaise court le risque de n’être plus qu’une parodie, un théâtre sinistre où l’équité est reléguée au rang de mythe.
La parole du premier président de la Cour de Cassation doit dès lors être entendue non comme une simple dénonciation, mais comme un ultime avertissement. Car lorsque Thémis vacille, c’est la République tout entière qui chancelle.

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