Entre sa solidarité affichée avec Kinshasa, la crainte d’une supposée déstabilisation orchestrée par Kigali et les velléités expansionnistes des rebelles sur la région d’Uvira, le régime d’Évariste Ndayishimiye évolue sur une ligne de crête, oscillant entre posture bravache et inconfort stratégique.
Cette hésitation, perceptible dans ses prises de position successives, trahit moins une doctrine cohérente qu’un désarroi politique soigneusement maquillé en fermeté.
L’attitude du chef de l’État burundais, qui a cru bon de « surjouer » sa loyauté envers Félix Tshisekedi en multipliant des gestes d’allégeance ostentatoires, dépasse les convenances diplomatiques usuelles. La décision unilatérale de fermer les frontières avec le Rwanda, sans motif apparent ni concertation préalable, a donné l’image d’un pouvoir plus empressé à démontrer son hostilité envers Kigali qu’à servir ses propres intérêts nationaux.
Ce geste, d’une lourde portée symbolique, a d’ailleurs suscité des frictions internes, jusqu’au sein même de la formation présidentielle, dont le secrétaire général n’a pas caché son irritation devant une telle fuite en avant.
Cette stratégie de surenchère, censée flatter Kinshasa tout en narguant Kigali, apparaît désormais comme une manœuvre contre-productive. Car en épousant sans nuance la ligne congolaise, le Burundi s’expose non seulement aux représailles diplomatiques, mais aussi à une instabilité frontalière accrue. Les velléités d’expansion des rebelles, notamment dans la région sensible d’Uvira, dessinent un horizon inquiétant pour Bujumbura, qui risque de se retrouver entraîné dans une guerre d’alliances qu’il ne maîtrise pas entièrement.
Loin de l’image de fermeté qu’il cherche à projeter, le pouvoir d’Évariste Ndayishimiye se retrouve dos au mur, confronté à un dilemme stratégique : maintenir une posture de défi vis-à-vis de Kigali au risque de déstabiliser ses propres arrières, ou renouer avec une diplomatie d’équilibre afin de préserver les intérêts fondamentaux du Burundi. Dans ce contexte explosif, la moindre maladresse peut transformer une démonstration de loyauté mal calculée en piège géopolitique durable.
Ce qui se joue ici dépasse les seules frontières burundaises : c’est l’équilibre fragile de toute la région des Grands Lacs qui vacille, au gré de choix politiques faits davantage sous le coup de l’émotion que dans la rigueur de la raison d’État. Et dans cette partie à haut risque, les postures de façade peuvent coûter plus cher que les silences diplomatiques.

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