L’hypocrisie de l’Occident envers le Rwanda et le M23 en RDC

Redigé par Gerald Mbanda
Le 21 février 2025 à 11:11

La prise de Goma par les rebelles du M23 a suscité une grande agitation parmi les pays occidentaux, notamment le Parlement européen. Le Conseil de sécurité de l’ONU a également tenu des sessions après la chute de Goma, où les troupes de l’ONU (MONUSCO), supposées être des casques bleus, se sont retrouvées à collaborer activement avec les FDLR, les troupes de la SADC, les forces burundaises, et, de manière surprenante, avec des mercenaires européens ; tous contre les rebelles du M23.

Le 13 février 2025, le Parlement européen a appelé à l’imposition de sanctions contre le Rwanda, tout en condamnant l’« occupation de Goma », la qualifiant de violation flagrante de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la RDC.

Le Rwanda a toujours rejeté ces accusations de soutien aux rebelles du M23 et a précisé qu’il mettait en place des mesures de sécurité le long de ses frontières pour prévenir toute attaque sur son territoire, en particulier celles émanant des génocidaires FDLR soutenus par les forces congolaises (FARDC) et leur coalition.

Pourtant, ce même parlement n’a jamais tenu le gouvernement de Kinshasa responsable pour l’intégration d’une milice génocidaire dans son armée nationale, avec pour objectif, attaquer le Rwanda.

Il est déplorable que le Parlement européen, bien conscient que les rebelles du M23 sont des Congolais parlant le Kinyarwanda, luttant contre une injustice historique et une menace existentielle, qualifie la prise de Goma d’occupation et de violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la RDC.

Cette affirmation ne fait que nourrir le récit de Kinshasa, qui présente les rebelles du M23 comme des « étrangers » (Rwandais) et des « terroristes ». C’est là l’une des raisons pour lesquelles la guerre dans l’est de la RDC semble vouée à perdurer, à moins que l’Occident et le gouvernement de Kinshasa reconnaissent que les rebelles du M23 sont des Congolais légitimes, porteurs de préoccupations légitimes qui doivent être résolues par des voies politiques.

La crise qui frappe l’est de la RDC a été engendrée par les mêmes puissances qui aujourd’hui pointent du doigt le Rwanda et le M23. En 1884, lors de la Conférence de Berlin, lorsque l’Afrique a été divisée entre les puissances européennes, des frontières artificielles ont été tracées, séparant des communautés partageant une même langue et une même culture, ce qui a conduit les Congolais parlant le Kinyarwanda à se retrouver sous la domination du Congo.

Depuis les années 1960, les régimes successifs ont imposé une discrimination systématique envers les Congolais parlant le Kinyarwanda. Les pays européens, tout en se déchargeant de la responsabilité de la crise en RDC, portent la lourde responsabilité d’avoir semé les graines du génocide contre les Tutsi en 1994, tout en alimentant un discours de haine et en permettant la persécution des Tutsi congolais, phénomène qui perdure encore jusqu’à aujourd’hui en RDC.

La Belgique coloniale a instauré une politique de division et de domination, introduisant notamment l’instrument du compas Vernier pour mesurer la taille des nez des Rwandais, marquant ainsi le début du profilage ethnique et de la création artificielle des soi-disant ethnies Hutu, Tutsi et Twa, qui étaient à l’origine des classes socio-économiques.

Le massacre des Tutsi a débuté en 1959 sous la supervision des autorités belges, et l’escalade de la discrimination ethnique a culminé dans le génocide contre les Tutsi en 1994.

La France a joué un rôle déterminant en tant que complice dans ce génocide. Des soldats français tenaient des barrages routiers pour contrôler les cartes d’identité et identifier les Tutsi, qui furent tués sous leur surveillance.

En 1994, la France a lancé l’opération Opération Turquoise, prétendant qu’il s’agissait d’une mission humanitaire, mais qui en réalité, visait à protéger les responsables du génocide contre les Tutsi au Rwanda. Ces génocidaires ont été évacués en toute sécurité vers le Zaïre (aujourd’hui la RDC), où leurs descendants forment aujourd’hui les FDLR.

La présence de ces génocidaires en RDC a engendré la crise actuelle : la persécution et le massacre des Tutsi congolais. C’est l’une des raisons majeures pour lesquelles les rebelles du M23 ont pris les armes, afin de défendre leur peuple face à une menace existentielle.

Lorsque Goma est tombée sous le contrôle des rebelles du M23, près de 300 mercenaires européens se trouvaient dans la ville, combattant aux côtés des FARDC et de leur coalition, qui incluait la MONUSCO, les FDLR, la SADC, les troupes burundaises et la milice locale Wazalendo.

Bien que le Parlement européen soit conscient qu’en 1989, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté une résolution condamnant l’utilisation de mercenaires, il n’a pas appelé à des sanctions contre la RDC pour violation du droit international. Pourtant, le M23 et le Rwanda sont toujours désignés comme les « mauvais » simplement pour s’être défendus.

Bien que les FARDC soient reconnues pour leurs violations des droits de l’homme et leurs crimes de guerre, notamment les viols, le Parlement européen continue de rejeter la faute sur le M23.

Cependant, certains analystes attestent qu’aucune zone contrôlée par le M23 n’a été le théâtre de violences massives. Au contraire, la paix y règne, et les personnes déplacées internes ont été réinstallées dans leurs foyers.

Si la question des violations des droits de l’homme en RDC devait être abordée de manière juste, qui tiendrait la Belgique responsable des millions de Congolais mutilés et tués sous les ordres du roi belge Léopold II de 1885 à 1908 ?

Le récit le plus absurde avancé par presque tous les pays occidentaux est que la crise de l’est de la RDC serait uniquement liée aux ressources minérales. L’appel du Parlement européen à la suspension de l’accord UE-Rwanda sur les chaînes de valeur durables pour les matières premières critiques sous-entend que le Rwanda serait en train de voler les minerais de la RDC, alimentant ainsi la propagande de Kinshasa.

Ironiquement, les Belges sont bien conscients qu’à partir des années 1950, des sociétés minières belges telles que SOMUKI, puis Geomines, opéraient déjà au Rwanda, non pas en achetant, mais en prenant librement ses minerais.

Si la question portait sur la responsabilité et les réparations concernant le vol des ressources minières du Rwanda et du Congo, la Belgique serait déclarée en faillite, et la plupart des pays occidentaux se retrouveraient sur le banc des accusés.

Il est d’une cynisme inouï et profondément inhumain que les pays occidentaux placent la valeur des minerais de la RDC au-dessus du sang des Tutsi rwandais massacrés en 1994, de la menace de leur extermination, ainsi que des vies des Tutsi congolais tués aujourd’hui.

Imaginez le traumatisme vécu par Pierre, un garçon de 10 ans qui a vu son père brûlé vif et sa chair mangée en public par les tueurs ! Le père de Pierre était un Tutsi congolais.

Imaginez une mère qui a été déshabillée, violée et massacrée, à la vue de tout ses enfants. Ces actes ont été commis en plein jour et des vidéos ont été enregistrées, pas des images créées par IA.

Le Parlement européen semble traiter ces atrocités comme si elles étaient normales, ce qui, de fait, valide indirectement la légitimité de la cause des rebelles du M23. Ignorer la cause des rebelles du M23 est la pire forme de violation des droits de l’homme.

Il n’y a pas eu de session du Parlement européen lorsque ces meurtres barbares et ce cannibalisme des Tutsi ont eu lieu, il n’y a eu aucune condamnation. Un village habité par des Tutsi congolais a été brûlé dans le Sud-Kivu, sous le regard de la MONUSCO et des soldats burundais. Il n’y a eu aucune condamnation. La condamnation est venue seulement lorsque le M23 a capturé Goma et Bukavu.

La Conférence de Berlin de 1884 n’avait pas pour objectif le bien-être des Africains, mais était plutôt motivée par la cupidité européenne pour les ressources naturelles de l’Afrique.

Ce même état d’esprit persiste aujourd’hui, lorsque le Parlement européen évite de prendre des positions qui pourraient froisser le gouvernement de la RDC. C’est pourquoi ils adoptent la même ligne, blâmant le M23 et le Rwanda, tout comme le fait Tshisekedi.

Le Parlement européen n’a pas appelé à des négociations directes entre Kinshasa et les rebelles du M23, ignorant les causes profondes du conflit. Ils ne se préoccupent ni des vies des Tutsi congolais tués, ni de la menace de sécurité posée par le soutien des autorités congolaises aux FDLR, qui continuent de viser leur retour au Rwanda pour « achever le génocide ».

En 1961, la Belgique et ses alliés ont orchestré l’assassinat de Patrice Lumumba, quelques mois seulement après son élection en tant que Premier ministre du Congo indépendant.

Lumumba était perçu comme une menace pour les intérêts occidentaux, qui cherchaient à exploiter les ressources du Congo. Son corps a été dissous dans de l’acide, et ses seuls restes, notamment une dent en or, n’ont été renvoyés en RDC qu’en 2022, soit 61 ans plus tard !

Ce sont ces mêmes puissances qui ont contribué à l’effondrement du gouvernement congolais, car ayant besoin d’un leadership incompétent, comme celui de Tshisekedi, veulent sécuriser leurs intérêts.

Ce sont les mêmes acteurs responsables de violations horribles des droits de l’homme qui, aujourd’hui, blâment les rebelles du M23, qui se battent pour défendre un peuple persécuté, tout en accusant ces derniers de violations des droits de l’homme.

Le camouflage des atrocités commises par le gouvernement de la RDC par le Parlement européen, la culpabilisation du Rwanda, qui a des préoccupations légitimes concernant ce qui se passe en RDC, et l’ignorance des causes profondes de la rébellion du M23, ne contribueront en rien à résoudre la crise dans l’est de la RDC.

Au contraire, ces actions risquent de prolonger le conflit. Le soutien des pays occidentaux, de l’ONU, des mercenaires européens et de Kinshasa témoigne d’une conspiration bien orchestrée contre le Rwanda et la cause du M23.

L’Occident cherche avant tout à défendre ses intérêts économiques, tandis que le Rwanda et le M23 se battent pour protéger leur peuple face à une menace existentielle. Ils ne céderont pas, quelle que soit l’intensité des pressions exercées par l’Occident. D’où le paradoxe que les pays ayant une responsabilité historique dans l’instauration du chaos en RDC soient aujourd’hui les plus bruyants dans leurs accusations contre le Rwanda et le M23.

L’auteur est consultant en médias et ancien chef du Département de développement des médias à l’Institution Nationale de la Gouvernance (RGB).

La prise de Goma par les rebelles du M23 a suscité une grande agitation parmi les pays occidentaux, notamment le Parlement européen.

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