La déroute irréversible des FARDC et alliés

Redigé par Tite Gatabazi
Le 26 novembre 2025 à 12:51

Dans leur retraite précipitée, véritable déroute aux accents de désertion, les éléments des FARDC, flanqués des milices Wazalendo et des résidus combattants des FDLR, abandonnent pêle-mêle armes, munitions et équipements, comme pour alléger la fuite panique qui leur tient désormais lieu de stratégie militaire.

Cette débâcle récurrente n’a plus rien de surprenant : chacun se souvient encore de la scène presque ubuesque où le colonel Willy Ngoma, dans une ironie mordante, exhibait un arsenal impressionnant avec des véhicules saisis et remerciait le président Tshisekedi avec la condescendance d’un « Père Noël » livrant en retard des présents inattendus.

La récente capture, par les forces de l’AFC/M23, d’une cargaison particulièrement conséquente de munitions de guerre à Mahanga, localité du territoire de Masisi faisant office, depuis plusieurs années, de quartier général des FDLR-Nyatura, n’est pas un simple épisode de plus dans le chaos sécuritaire congolais. Elle constitue un révélateur brutal.

Sans qu’il soit nécessaire d’exalter l’action de l’AFC/M23, il demeure incontestable que la présence de telles quantités d’armements lourds dans une zone demeurée durablement sous le joug des FDLR et de leurs supplétifs Nyatura pose des questions lourdes, presque accablantes, quant à la sincérité du gouvernement congolais dans son engagement proclamé à démanteler ces groupes armés.

Les engagements pris, notamment sous l’égide des accords de Washington, apparaissent rétrospectivement comme des incantations dépourvues d’effectivité. Les faits suggèrent, avec une netteté chaque jour plus difficile à dissimuler, que les FDLR continuent de bénéficier d’un soutien matériel et logistique substantiel issu de segments des FARDC eux-mêmes, consolidant ainsi un système de connivence militaro-politique désormais trop enraciné pour être nié.

A cela s’ajoute un autre fait, révélateur de synergies moins clandestines qu’assumées : quelques jours avant la chute de Mahanga, le député national Justin Ndayishimiye, figure politique notoirement proche des FDLR et considéré comme l’un des inspirateurs civils des Nyatura, s’était rendu au sein de cette zone stratégique afin d’exhorter ces milices à « tenir les lignes ».

Cette visite, loin d’être anecdotique, illustre la porosité manifeste entre un pan significatif de la classe politique congolaise et les groupes armés auxquels elle offre appui, couverture et légitimation.

Mahanga, durant toutes ces années, a constitué l’un de ces territoires où la domination des FDLR-Nyatura s’exerçait avec une brutalité systémique : taxes arbitraires imposées aux éleveurs tutsis congolais jusqu’à cinq dollars par tête de bétail et par mois, prélèvements contraints en nature pouvant atteindre vingt litres de lait chaque samedi, sous peine d’attaques ou de représailles soigneusement orchestrées.

En avril 2023 encore, des troupeaux appartenant à ces mêmes éleveurs furent méthodiquement pillés par les FDLR, les Nyatura et diverses milices Maï-Maï, parfois en collusion flagrante avec certains éléments des FARDC et, selon plusieurs sources concordantes, avec l’assentiment discret d’unités burundaises opérant dans la région.

Ces faits, mis bout à bout, dessinent une réalité que nul vernis diplomatique ne parvient désormais à masquer : le rapport de forces sur le terrain s’est déplacé de façon profonde, durable et, à bien des égards, irréversible. L’effondrement récurrent des lignes congolaises, l’abandon quasi rituel d’armements en quantité industrielle, la perte successive de bastions stratégiques et la révélation publique de complicités anciennes entre l’armée régulière et les groupes armés d’inspiration génocidaire témoignent d’un basculement qui n’est plus conjoncturel, mais structurel.

La dynamique engagée n’est plus celle d’un simple déséquilibre temporaire ; elle consacre la faillite politique et militaire d’un système miné par la duplicité, la fragmentation et l’incapacité chronique à assumer les engagements internationaux pourtant proclamés avec emphase.

Dès lors, on peut l’affirmer sans outrance : la recomposition du pouvoir coercitif dans le Nord-Kivu ne relève plus de l’hypothèse, mais de l’inévitable. L’AFC/M23, qu’on l’approuve ou non, s’est imposé comme l’acteur désormais incontournable, tandis que les alliances obscures nouées par Kinshasa avec des milices prédatrices achèvent de discréditer une architecture sécuritaire déjà vacillante.

En somme, Mahanga n’est pas seulement une localité tombée : c’est un symbole. Le symbole d’un rapport de forces désormais figé dans une asymétrie qui ne souffre plus aucune illusion de retour en arrière. Les dynamiques militaires, politiques et sociales qui s’y sont cristallisées marquent irrémédiablement la fin d’un cycle ; et, qu’on le veuille ou non, l’entrée dans un autre.

La saisie par l’AFC/M23 d’une importante cargaison de munitions à Mahanga, quartier général des FDLR-Nyatura à Masisi, révèle brutalement la gravité du chaos sécuritaire congolais

Publicité

AJOUTER UN COMMENTAIRE

REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Publicité