Depuis des décennies, ces fils et filles du Rwanda, dispersés par les affres de l’exil, avaient grandi loin de la mère patrie, portant dans leurs chairs les stigmates de l’humiliation et dans leur mémoire l’héritage d’une patrie perdue.
Ils avaient supplié, plaidé, réclamé pacifiquement le droit imprescriptible de revenir sur la terre de leurs ancêtres. Mais face au refus obstiné d’un pouvoir enfermé dans l’exclusivisme, face au silence du monde et à l’inefficacité des démarches diplomatiques, une conviction s’imposa : seule la lutte, dans son exigence la plus radicale, pouvait rouvrir le chemin de la dignité.
C’est ainsi que naquit le Front Patriotique Rwandais qui se dota de l’Armée patriotique rwandaise, levée de jeunes gens sans armures mais porteurs d’une foi inébranlable. Leurs armes étaient souvent dérisoires, mais leur résolution surpassait les montagnes. L’un d’eux, dans un message testamentaire à la fois sublime et terrifiant, avait laissé à ses proches ces mots : « Rendez-vous à Kigali ou au ciel. » Par cette phrase, il condensait la vérité de leur engagement : le retour triomphant ou le sacrifice suprême, mais en aucun cas la résignation.
Leur courage silencieux, leur refus obstiné de reculer, leur résilience forgée dans la faim et dans l’épreuve, constituent aujourd’hui les traits distinctifs d’une génération que l’histoire retiendra comme la génération libératrice. Ils marchaient dans les marais et les forêts, les corps affamés et meurtris, mais les yeux rivés vers l’horizon.
Leur souffrance se transmuta en force, leur privation en grandeur d’âme, et leur sacrifice en flambeau d’espérance pour tout un peuple.
Mais leur geste ne s’arrêta pas à la seule conquête militaire. Ces jeunes, devenus hommes d’État, bâtisseurs et réformateurs, surent transformer la victoire en projet de civilisation. Ils ne se contentèrent pas de libérer une terre : ils reconstruisirent une nation.
Au sortir des ténèbres du génocide perpétré contre les Tutsi, ils prirent en main la tâche titanesque de refonder un pays brisé. Et ils réussirent, à force de vision, de discipline et de volonté, à hisser le Rwanda dans le concert des nations respectées, non comme un suiveur, mais comme un acteur qui compte et qui inspire.
La génération du 1er octobre a donc légué plus qu’un héritage : elle a offert au Rwanda une renaissance. Elle nous rappelle que la liberté n’est jamais donnée, qu’elle s’arrache dans la douleur, qu’elle s’entretient par l’effort, et qu’elle ne s’accomplit que dans la responsabilité. Leur mémoire est une source inépuisable de fierté et un devoir sacré de transmission.
Un appel au devoir de mémoire et de vigilance
À cette génération héroïque, nous devons plus qu’un hommage : nous leur devons la fidélité. Fidélité à leur sacrifice, fidélité à leur idéal, fidélité à l’exigence morale qui fut la leur. Leur combat n’était pas celui d’une ambition passagère : il était celui de la survie d’un peuple et de la perpétuité d’une nation.
Il nous appartient, aujourd’hui et demain, de protéger cet héritage, de l’honorer non pas seulement par des cérémonies ou des discours, mais par une vigilance constante. Vigilance contre toute tentation d’exclusion, contre tout retour des idéologies de haine, contre toute complaisance envers les forces de division. Car la liberté conquise dans le sang peut, si elle n’est pas entretenue, être mise en péril.
Que chaque Rwandais, dans ses actes quotidiens, se souvienne que la patrie n’est pas un don, mais une construction collective et continue. Que la jeunesse, héritière directe de ces héros, sache que son devoir n’est pas seulement de jouir des fruits de la paix, mais de veiller à ce qu’elle demeure inviolable.
Ainsi, à travers le souvenir de cette génération libératrice, c’est à nous tous qu’il est demandé de marcher, les yeux fixés vers l’horizon, avec la même exigence, la même foi et la même grandeur d’âme.
Car le plus bel hommage à leur rendre n’est pas seulement dans nos mots, mais dans notre détermination à préserver, à perpétuer et à magnifier l’œuvre qu’ils ont commencée.

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