Pasteur Ngoy Mulunda ou l’acharnement d’un régime contre la dignité humaine

Redigé par Tite Gatabazi
Le 24 septembre 2025 à 04:03

Il est des détentions qui, au-delà de leur légalité contestable, révèlent la nature véritable d’un régime et trahissent l’état moral d’un pouvoir. L’incarcération du Pasteur Daniel Ngoy Mulunda, ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), figure ecclésiastique de renom et proche de l’ancien chef de l’État Joseph Kabila Kabange, en est l’illustration la plus criante.

Son unique forfait, aux yeux du régime de Félix Tshisekedi, est d’avoir assumé avec constance et dignité sa proximité avec le sénateur à vie Kabila. En République démocratique du Congo, voilà désormais le crime suprême : entretenir une loyauté politique et affective envers un ancien président.

Mais l’acharnement politique, lorsqu’il se fait prison, se double aujourd’hui d’une cruauté supplémentaire : celle d’interdire à un fils de rendre les derniers hommages à son père. Le 5 septembre 2025, Numbi Kahange Fumu s’est éteint, plongeant la famille Ngoy Mulunda dans le deuil.

Depuis sa cellule, le pasteur, déjà affaibli par une santé vacillante, a appris cette perte irréparable. Et pourtant, malgré les appels répétés de ses proches et la lettre officielle datée du 19 septembre adressée au président Tshisekedi, sollicitant une dérogation humanitaire élémentaire, le pouvoir demeure sourd, laissant planer l’ombre d’un refus qui ne serait que la confirmation d’une dérive autoritaire assumée.

La justice, dans son essence la plus profonde, n’est pas vengeance. Elle n’est pas non plus l’instrument servile d’une hégémonie politique. En maintenant en détention un homme dont l’état de santé s’aggrave, en lui refusant l’ultime geste de piété filiale qui consiste à accompagner son père vers sa dernière demeure, le régime de Kinshasa piétine à la fois le droit, l’humanité et la mémoire.

Car interdire à un fils le deuil de son géniteur, c’est toucher à ce qu’il y a de plus sacré dans l’ordre humain. C’est une violence qui ne s’exerce plus seulement sur le prisonnier, mais sur toute une famille, sur tout un peuple qui observe, impuissant, l’implacable froideur d’un pouvoir qui se veut démocratique mais pratique l’arbitraire.

Le cas Ngoy Mulunda dépasse la seule personne de l’ancien président de la CENI. Il symbolise le glissement d’un État censé défendre les libertés fondamentales vers une logique de règlement de comptes où l’ennemi politique est réduit à un paria privé de toute compassion. Ce qui se joue ici, ce n’est pas seulement le sort d’un détenu politique, mais la crédibilité même de l’État de droit congolais. À quoi sert-il de proclamer à la face du monde l’attachement à la démocratie, si, dans le silence des prisons, on interdit à un homme d’accomplir un devoir filial universellement reconnu ?

Félix Tshisekedi et son gouvernement sont aujourd’hui placés devant une alternative claire : soit permettre à Daniel Ngoy Mulunda de faire ses adieux à son père, affirmant ainsi que la justice congolaise n’est pas qu’un instrument de revanche, soit assumer devant l’histoire la honte indélébile d’avoir transformé le deuil d’un homme en supplice politique.

Le peuple congolais et la conscience humaine, eux, ont déjà tranché : la grandeur d’un pouvoir se mesure à la manière dont il traite ses adversaires. Et dans cette épreuve, le régime Tshisekedi est en passe de se condamner lui-même.

Certaines détentions révèlent la nature d’un régime : celle du pasteur Daniel Ngoy Mulunda, ex-président de la CENI et proche de Joseph Kabila, en est l’illustration flagrante

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