Cette réunion des chefs d’état-major, censée consolider la paix et l’intégration régionale, s’est transformée en une scène où la République démocratique du Congo, fidèle à sa rhétorique victimaire, a cherché à rallier ses voisins à une entreprise de militarisation déguisée en coopération régionale.
Le ton de Kinshasa, oscillant entre la posture plaintive et la déclamation belliqueuse, trahit un profond malentendu sur la vocation de la CIRGL. Cette organisation, fondée en 2004, visait avant tout à prévenir les conflits, promouvoir la bonne gouvernance et encourager un développement durable fondé sur la stabilité régionale.
Ses objectifs, clairs et ambitieux, reposaient sur une logique d’intégration économique, de solidarité politique et de réconciliation entre États membres. Or, loin de s’inscrire dans cet esprit, la diplomatie congolaise actuelle tend à instrumentaliser les tribunes multilatérales pour justifier l’échec de sa propre gouvernance intérieure et détourner l’attention des causes profondes de l’instabilité qui gangrène l’Est du pays.
La RDC se prévaut d’une victimisation devenue systématique, alors même qu’elle dispose d’un appareil militaire classé parmi les plus puissants du continent africain huitième selon les indices de puissance régionale.
Il y a là une contradiction criante : comment un État disposant d’un tel potentiel, tant en effectifs qu’en ressources, peut-il persister à se poser en victime impuissante, incapable de sécuriser son propre territoire ? L’argument commode du complot extérieur ne saurait éternellement masquer les carences d’une armée minée par la corruption, la politisation et le manque de discipline stratégique.
L’absence du Rwanda à cette rencontre n’est pas anodine. Elle illustre le décalage croissant entre le discours congolais et la réalité diplomatique régionale. Au moment même où Kigali et Kinshasa s’acheminent vers la consolidation des accords de paix bilatéraux issus du processus de Washington et des engagements du mois de juin 2025, Kinshasa semble se complaire dans la rhétorique de la confrontation.
Une telle posture fragilise non seulement la dynamique de réconciliation en cours, mais elle trahit également un double langage : celui d’un pouvoir qui signe la paix d’une main tout en entretenant la suspicion de l’autre.
Il est d’autant plus paradoxal que la RDC, membre fondateur de la CIRGL, ne respecte que marginalement les principes fondamentaux de l’organisation. Les piliers de la bonne gouvernance, de la démocratie participative, de la transparence institutionnelle et du respect des droits humains demeurent, à ce jour, des vœux pieux dans le contexte congolais. L’on peine à discerner, dans la politique intérieure du régime Tshisekedi, l’ombre d’une stratégie cohérente visant la stabilisation durable de la région. Tout se passe comme si la guerre de l’Est était devenue le paravent commode des insuffisances internes et des tensions politiques nationales.
À force de multiplier les accusations sans fondement et de convoquer les instances régionales à la rescousse d’un récit unilatéral, Kinshasa s’expose au risque de l’isolement diplomatique. Car les partenaires africains, désormais lucides, voient bien que la crise de l’Est de la RDC ne résulte pas d’un déficit d’engagement international, mais d’un manque de vision nationale.
L’instabilité congolaise est d’abord une crise de l’État ; un État fragmenté, clientéliste, incapable d’incarner la souveraineté autrement que par la posture et la plainte.
Le président Félix Tshisekedi, en persistant dans ce jeu ambigu, compromet le crédit moral et diplomatique de son pays. Tantôt conciliant dans les forums internationaux, tantôt vindicatif dans les discours populistes, il donne le sentiment d’un pouvoir hésitant, oscillant entre la quête d’alliances et la tentation de la désignation d’un ennemi extérieur.
Ce double discours, loin de renforcer la position congolaise, affaiblit son autorité et entame la crédibilité de la CIRGL elle-même, détournée de sa mission fondatrice au profit d’intérêts conjoncturels.
La paix régionale ne saurait s’obtenir par des incantations ni par des coalitions d’opportunité. Elle exige des États membres un engagement sincère envers la vérité, la réforme et la responsabilité.
Tant que la RDC persistera à confondre diplomatie et lamentation, à substituer la rhétorique au réalisme, elle condamnera la CIRGL à n’être qu’une coquille vide, un théâtre où se joue l’illusion d’une unité que le terrain dément chaque jour.
Ainsi, le défi de Kinshasa n’est plus de convaincre, mais de se convertir à la cohérence, celle d’un État qui reconnaît que la paix ne se quémande pas, elle se construit, d’abord, par la lucidité et par l’exemple.














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